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en route, que nous ne pourrions ni avancer ni reculer, et que nous serions retenus dans les marais jusqu’à l’hiver. Notre départ de Séchéké fut des plus tristes. C’était par une nuit obscure et avec une pluie battante. Depuis plusieurs jours, la crue des eaux du Zam- bèze augmentait nos inquiétudes. Je ne dirai rien de notre séparation d’avec notre chère nièce et son mari, avec la perspective de plus de cent lieues de distance entre nous et d’un revoir que le cbmat et les circonstances rendent difficile, sinon problématique. Nos coeurs se serrent en pensant à nos bien-aimés, à leur isolement et à leur position tout particulièrement débcate et pénible. Je ne saurais trop demander pour eux vos instantes suppbcations. Séchéké, comme chef-lieu d’une immense province et la porte du pays, est un poste qui ne le cède en importance qu’à celui de Léalouyi même. Que nous ne soyons qu’à deux pour les occuper, c’est dérisoire. Nous attendons impatiemment le renfort que nous avons demandé à Dieu et à vous. Quand viendra-t-il ? Que Dieu veille sur Séchéké et sur ses serviteurs ! Malgré les prévisions les plus sinistres, nous avons fait un voyage heureux et rapide. Il a plu, c’est la saison, il a plu beaucoup, mais généralement pendant la nuit, le dimanche ou pendant les haltes. La pluie ne nous a pas fait manquer une seule étape. Les rivières débordaient et nous ont causé de la peine; nous nous y attendions. Il a fallu à chacune passer nos bagages en canots, et une fois même démonter complètement nos voitures comme à Kazoungoula; mais partout les ma-Ngnété et les ma-Totéla ont fait preuve de bonne volonté et ont montré de l’empressement à nous aider. Us nous saluaient joyeusement comme de vieilles connaissances. Non seulement ils se sont contentés de fort petites rémunérations, mais ils ne nous ont rien volé, ce qui est beaucoup dire. Il faudrait que nous pussions mettre un canot sur chacune de ces rivières. Mais les canots sont difficiles à trouver aussi longtemps que le roi et les principaux de la nation ne sont pas encore pourvus. Me prévalant des dons spéciaux qui nous ont été faits dans ce but, j ’en ai commandé plusieurs; j ’ai fait aussi une forte commande d’objets d’échange qui nous arriveront probablement vers la fin de l’année1. Que nos amis prennent patience et reçoivent encore ici nos remerciements. Outre une dizaine d’hommes, Léwanika avait envoyé trois petits chefs ma-Totéla « pour prendre soin » de ma femme et <t l’amener en sûreté à la Vallée ». Ils appartenaient au clan des Mayéla-fatsé, les mange-par-terre, ainsi nommés parce que le roi Sépopa, dont ils étaient les serviteurs personnels, les nourrissait en versant par terre les restes des écuelles royales. Ils surent gagner la confiance de leur maître au point que celui-ci les établit au miheu de la tribu des ma-Kouengoa dont il n’était pas sûr. Nos petits personnages,


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