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SU R LE H AU T -Z AM B È Z E . leurs pétales, comme cinq petites plumes en miniature et d’une délicatesse extrême; tous embaumaient l’air de leur parfum. Mes ma^Soubiya n’avaient aucun sens pour apprécier un tableau qui me ravissait. Eux, ils tombaient sur les plantes aquatiques, en arrachaient les tiges pour les brûler et les mêler à leur tabac et les racines pour se régaler. Hélas ! le vandalisme est partout. Le 20 mars, un samedi, nous arrivâmes à Nalolo. C’est, vous vous le rappelez, la deuxième capitale du royaume. D’ancienneté, c’est la coutume des rois ba-Rotsi de s’adjpindre dans le gouvernement de la nation une de leurs soeurs, quelquefois leurs mères. Cette reine a sa cour, ses tambours, ses sérimba, et s’entoure de tout le cérémonial en usage à la cour du roi. Elle siège au discute les affaires, juge les procès. On la salue comme le roi: Taou-tôna! On l’acclame : yo cho! (la salutation royale par excellence). On se prosterne devant elle, et personne, en sa présence, n’a le droit de s’as- seony pas même son mari, le Mokoué-Tounga (le gendre de la nation), qui n’est qu’un serviteur qu’elle peut congédier à son gré. Ce serait peut-être un peu forcé de dire qu’elle est polyandre. Quand Sa Majesté ne siège pas au lékhothla, elle se retire dans une hutte entourée de deux cours. C’est là qu’elle donne ses entrevues privées. De quelque côté que l’oeil se porte, il tombe sur des charmes de toutes sortes. Il s’y trouve généralement de jeunes esclaves attachées au service de la reine et occupées, sous sa direction, à tisser des nattes de fantaisie ou à faire des travaux de verroterie. C’est là que Mokouaé me reçut. Mokouaé n’était pas une étrangère pour moi. Je l’avais vue, l’an passé, prisonnière chez Mathaha, où elle aurait été réduite à la condition d’une esclave, sans cette bonne Maïbiba, qui était alors reine malgré elle. J’avais trouvé le moyen de causer un peu avec Mokouaé. Cela l’avait consolée et avait relevé, son courage, paraît-il.'- —; Cette fois-ci, je la trouvai assise sur une natte, sous un pavillon.de chaume. Dès qu’elle me vit, elle se mit à rire; elle me tendit la main et me.fit asseoir en face d’elle. Elle me regarda fixement pendant quelques moments, souriant toujours, et à la fin, trahissant le cours de ses pensées, elle s’écria d’un ton qui me fit tressaillir : « Mathaha! Mathaha! nous l’avons tué, liii et tous les siens ! » Elle me présenta ses enfants, qui, entre parenthèses, ne l’appellent jamais leur mère, mais Moréna, s’assoient toujours derrière elle et jamais sur sa natte/Puis, pendant qu’une charmante petite fille, entre mes genoux, jouait avec ma chaîne de montre, nous nous. trouvâmes bientôt engagés dans une conversation des plus captivantes. Elle me racontait toutes les péripéties de la révolution, sa fuite du village de Mathaha, le dévouement de ses partisans, qui, pendant que la fortune de la guerre était contre eux, l’emmenèrent à marches forcées à Séoma; de là, pour plus de sûreté, jusqu’à là rivière Machi, -S0 | ;-LE H A U T - Z A M B È Z E .


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