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i 44 v o y a g e ture, ainsi que celle de l’ éléphant, consiste en végétaux , et qu’il en trouve par-tout ; comme il est plus farouche encore, il s’éloigne , ainsi que l’éléphant, des lieiix habités. On voit, d’après ces habitudes, que, loin de choisir de préférence pour son séjour un canton peuplé de hordes et de fermes, tel que le Quammedaka, il doit, au contraire, le fuir. S i, de tems en tems, on y en voit quelques-uns, ce sont, pour ainsi dire, des voyageurs égarés ; qui, bientôt découverts et poursuivis par les liabitans, sont, ou tués, ou obligés de regagner , au plus vite, leur pays natal. Si du tems du docteur Spaarman il y avoit beaucoup de rhinocéros dans le Quammedaka,-Al n’y en avoit plus de mon tems, non plus que dans toute la Colpnie, d’où ils ont fui depuis qu’elle s’est peuplée davantage. ' I l y a long-tems , ajoute Spaarman, que Bontius a / a it l ’observation que le rhinocéros est ordinairement tué avec de la poudre et des balles. Bufïon n’a probablement point fait attention à ce passage , lorsqu’il assure , sur l ’autorité de Gervaise , que la peau du rhinocéros në peut être entamée par aucune balle. Si l’on en croit certains voyageurs, le rhinocéros unicorne , dont la peau écailleuse et répliée sur le cou en forme de mantelet, est si dure qu’elle résiste au coup de fusil ; et probablement c’est de ceux-là qu’a voulu parler Buffon. Pour moi, qui ne connois que ceux de l ’Afrique méridionale je dirai que je n’y en ai vu que de bicornes, ayant la peau lisse comme l ’éléphant. On ne connoît point d'autres rhinocéros au Cap et dans les colonies. Ainsi, quant à ceux-ci, ils ne sont point à l’épreuve de la balle, comme la chasse dont j ’ai donné l ’histoire, m’en a fourni la preuve ; et je suis persuadé qu’il en est de même du rhinocéros unicorne. La petite corne de celui que nous tuâmes étoit de plus d'un tiers plus courte que l’autre. J ’ai déjà remarqué que la grande avoit dix- neuf pouces. Mais ce qui me surprit,’ ce fut de voir que cette arme si redoutable, avec laquelle il sillormoit profondément la terre et lançoit çoit au loin des pierres fort grosses , n’étoit point, implantée dans les os de la tête ; qu’elle ne tenoit qu’à la peau , et qu en remuant cette peau, je la faisois mouvoir tomme elle. L ’oeil du rhinocéros , beaucoup trop petit respectivement à une si énorme masse, est aussi très-enfonce dans la tete ; a raison de la peau extérieure,' qui, formant au-dessus de l’orbite plusieurs plis circulaires, y fait une sorte de tube, long de plusieurs pouces , au fond duquel il se trouve. Peut - être ce canal, en diminuant le champ et concentrant les rayons- visuels , comme le tuyau de nos lunettes , sert-il à renfoicer l ’organe , mais' il empêche au moins l’animal de voir d autres objets que ceux qui sont dans la direction de son oeil, Aussi les Sauvages , lorsqu’ils ne sont point dans cette direction, se croient-ils en sûreté, même fort près de lu i; parce qu’alors ils n’en sont point apperçus. Mais une singulière particularité du rhinocéros bicorne , c’est de sillonner la terre avec sa corne, en courant, et de j etter en meme tems son urine très-loin par derrière, en faisant des espèces de ruades. Une autre coutume très-remarquable de cet animal, c’est de pulvériser avec ses pieds ses exçrémens, qu’il 11e laisse jamais entiers comme l ’éléphant. Quoique la chair du rhinocéros n’approche pas de celle de l'hippopotame , cependant elle est fort'Supérieure à la chair de l ’éléphant. ■ Mes Sauvages s’en promettoient des festins délicieux,- et 1 idee seule de ce régal leur présentoit un plaisir d’un prix bien supérieur à tous les dangers qu’ils avoient courus. Que de jouissances pour eux dans une bête qui pésoit deux à trois mille au moins. La nuit approchoit : pressés de s’en régaler et voulant, dès le soir même , en festoyer tout le camp, ils se mirent tous à couper sur l ’animal les morçeaux qui leur convenoient. En moins d’une demie heure, chacun, d’e u i en emporta sa charge, sans qu’il y parût presque aucune diminution ; mais ils se proposoient bien d y reve- Tome I I . T


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