mal.-; et il avoit fallu les placer sur les boeufs de monture que j’avois destinés à cet usage et qui nous suivoient en relais. De leur côté, mes Hottentots colons étaient sur les dents. Accoutumés au climat tempéré du Cap, ces hommes, naturellement indolens et lâches , ne pouvoient supporter les chaleurs brûlantes de la zone torride à laquelle nous touchions. Eux qui pendant mon premier voyage fournissoient quelquefois, quand les circonstancesl’exi- geoient, à des marches de douze heures, maintenant, 'après -une marche de six , ils se trou voient anéantis et ne pouvoient plus faire mot pas. Us me voyoient subir volontairement les mêmes fatigues qu’eux sans m’en plaindre , et mon exemple n’opéroit rien sur leurs courages abattus. C’étoit particulièrement de la soif qu’ils se plaignoient, plus que ,de tout autre mal encore. En vain je les exhortais à user du remède que j’avois découvert; c’est-à-dire, à ne pas boire beaucoup et à se contenter de lapper dé tems en tems un peu d’eau, comme mes chiens ; ce qui sufifisoit peur humecter les glandes s ali v aires et pour tenir la bouche fraîche ,; leur opiniâtre ignorance n’écouloit rien- Dès qu’ils trouvoient de l’eau, je les voyoîs tous s’en remplir l’estomac jusqu’à perdre haleine t ils buvoient pour la soif présente , et croyoient boire encore pour la soif à venir ; ils ne voyoient pas que cette ruasse de liquide , après avoir pesé sur leur estomac et al- lourdi leurs mouvemens , -s’échappoit bientôt en sueurs abondantes qui les aff'oiblissoient et leur communiquoient un relâchement général, dont ils attribuoient à tort la cause au climat. D’ailleurs, les eaux étant presque toutes plus ou moins saumâtres, elles leur donnoient des diarrhées qu’ils perpétuoient eux- mêmes, en refusant le seul remède que nous avions pour les arrêter. Déjà Us avoient oublié ces protestations de zèle et ces sermens qu’ils s’étoient empressés de me faire à mon départ du camp de l ’Orange, et l’humeur qu’ils eommençoient à prendre ru’en don- jtait beaucoup à moi-même. A ce sujet d’inquiétude s’en joignit un autre. Aux approches du kraal kraal, tous les membres'de la horde qui n’étaient point avec moi vinrent à ma rencontre , mais tumultuaireinent et sans chef. Ce chef étoit mort tout récemment ; et depuis ce tems-là il n’y avoit jilus dans la société qu’anarchie, désordre et confusion. D’abord on s’étoit réuni pour nommer un successeur au défunt. Mais eelui-ci ayant refusé d’accepter, la horde s’étoit divisée fen deux parties, celui des hommes ët celui des femmes ; et chacun des deux avoit nomme un chef; de sorte qu’elle en-avoit trois sans en avoir un seul. De cette triple élection étoient nées des disputes et des dissentions sans lin. On se battait journellement; soir et matin le sang couloit, et ces combats ne f'aisoient encore qu’exalter les haines. A peine la troupe fut-elle près de moi qu’elles se manifestèrent. Tous, tant ceux qui arrivoient que ceux qui m avoient accompagne, ne s’ occupèrent plus que de leur querelle. Us cherchoient à m y intéresser, mol qui n’entendois pas un mot de leur langue. A voir là chaleur qu’ils y mettaient, ou eût dit que leur élection interessoit la terre entière et que le sort du genre humain alloit dépendre de leur chef. Tous parloient à la fois. Tous cherchoient à couvrir la voix de leurs camarades par la leur. C’etoit un vacarme affreux; et au milieu de tout ce tapage, les yeux etinceloient de fureur, et de toutes parts on se menaçoit. Cette guèrre intestine, parmi des Sauvages, etoit pour moi un spectacle nouveau ; et quoiqu’en apparence elle eut je ne Sais quoi d’allarmant, néanmoins elle offroit aux observations d’un voyageur quelque chose d’intéressant. A la vérité, l ’espoir de la terminer avec équité me dédommageoit en partie du désagrément de me voir constitué juge suprême dans une si grande cause. Il falloit bien que je me crusse quelque chose , puisque j’allois être, par un mot, ou le fondateur ou le restaurateur du plus grand pouvoir qu’un mortel puisse dispenser à des mortels. J ’avois appris, par le moyen de mes interprètes, que le mort avoit laissé plusieurs fils en âge de lui succéder ; et Ces fils étoient totalement oubliés, maigre tout ce que Kolbe nous raconte de merveilleux sur l’ordre des successions dans les peuplades d’Afrique et Tome I I . Q
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