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des qu’il occupe successivement l ’une après l ’autre. Le joueur commence par tirer quelques agneaux de leur trou et par les mettre dans d’autres trous du tigre. Probablement celui-ci. a une marche réglée, comme certaines pièces de nos échecs ; et la finesse du joueur consiste à éviter cette marche, pour sauver ses agneaux et les empêcher d’être dévorés. Au moins , quand il lui falloit les placer ailleurs, je le voyois redoubler d’attention. Mais quelquefois il les approchoit ou les éloi- gnoit si confusément, que, ne pouvant plus suivre la partie , je me perdois dans ses combinaisons, et n’y comprenois plus r ien , jusqu’au moment où l ’on ramassoit les enjeux. Il y a un autre jeu qui, beaucoup plus facile, parce qu’il est uniquement de hasard , est par-là même d’autant plus dangereux que le Namaquois, l ’-aimant avec fureur, il y risque souvent ses troupeaux et tout ce qu’il possède. Celui-ci ressemble à ce jeu de cro ix ou p i l e , que jouent en France les gens du peuple. Le mimosa du pays porte pour graine uné espèce de fève qui fait la principale nourriture des giraffes. On prend une certaine quantité de ces semences ; on grave sur un de leurs côtés quelque signe, qui devient pour les joueurs ce que sont pour les nôtres le croix ou pilé ; et après les avoir agitées pendant quelque tems entre les deux mains, on les jette à terre, où il ne s’agit plus que d’examiner si les fèves qui présentent leur marque l’emportent en nombre 6ur celles qui n’en présentent point. Ce jeu , fait pour réussir également et auprès des esprits indo- lens , parce qu’il ne les fatigue point, et auprès des esprits bornés , parce qu’il n’exige d’eux aucune combinaison, avoit singulièrement plu à mes Hottentots. Bientôt même ils s’y livrèrent avec une telle fureur que depuis le matin jusqu’au soir ils ne faisoient autre chose, et que plusieurs d’entre e u x , après avoir perdu tout ce qu’ils possédoient vaillant, jouoient, pour dernière ressource, la portion de tabac et d’eau-de-yie qui devoit leur revenir les jours «uivans. Il ne"leur restoit plus après cela que de me voler. J ’avois à craindre que l’envie ne leur en vînt ; pour couper court à cette tentation , je rétablis l’équilibre dans les fortunes, en rendant a chacun ce qu’il avoit perdu ; certain que le seul espoir de regagner fait les joueurs. Ensuite il ne fut plus besoin d’affiches pour empêcher ce, désordre dans mon camp. De la horde précédente, plusieurs Namaquois mavoient.accompagné dans celle-,ci : ils paroissoient même se plaire beaucoup près de moi; mais dès le moment qu’il ne fut plus permis a aucun de mes gens de jouer avec eux, ils ne trouvèrent plus dans mon camp la même satisfaction , et vinrent m’annoncer; leur départ. Néanmoins, n’ayant qu’à se louer de mes procédés, ils me témoignèrent, en me, quittant, beaucoup d.attachement et d amitié , et même , comme je venois d’acheter quelques boeufs pour mes attelages, ils m’offrirent de les emmener avec eux et de les remettre a Swanepoel, dans mon camp de l ’Orange. J ’acceptai leur offre. En, reconnoissance, je leur distribuai quelques cadeaux ; je leur confiai mes bêtes., après les avoir fait marquer ; et ils partirent satisfaits. A peine m’avoient-ils quitté qu’un de mes Hottentots vint me demander une gracé. Cet homme vouloit faire présent d’une belle vache à un Namaquois de la horde. Déjà il avoit, pour la payer, quelques gains faits au jeu ; mais son avoir ne suffisoit pas , et il me supplioit de lui avancer sur ses gages un peu de quincaillerie, afin de se trouver en état de conclure le marché. Un don d’une pareille importance supposoit quelque grand , service rendu. Avant de consentir à la demande, je voulus savoir sur quoi elle étoit fondée ; et j ’appris que ce n’étoit point d’un cadeau qu’il s’.agissoit, mais d’un troc ; que mon Hottentot étoit amoureux de la fille du Namaquois ; que pour l’obtenir de lui , il avoit offert une vache , et que celui-ci y avoit consenti. Ainsi ;se font les mariages chez tous ces peuples africains. Tels ils ont été primitivement par toute la terre, avant que l’imagination des poëtes et la politique des sociétés humaines policées eût substi- \ tué à l’amour un représentant, q u i, sous le nom d’hymen, s’arro


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