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sait à quoi s’en tenir sur ses prétendues mines d’or et d’argent. EK bien, il en est de ses arts et de ses loix comme de ses mines. L ’homme par qui se sont accréditées toutes ces fables , estKolbe.' Moi-meme, sans aucune notion sur ces peuplades éloignées et in- connues , j ’avois ajouté quelque foi aux rêveries de cet écrivain. En conséquence, et à mesure que je pénétrois dans' l ’intérieur de l’A frique et que je visitois les Hottentots, je cherchois par-tout les vestiges de cette florissante agriculture qu’ ils entendent incompara- blement m ieux que les Européens du C ap, qui s’adressent très- souvent a eu x p o u r avoir leu r avis la-dessus,- Je désirois voir quelqu’un de ces mariages solemnels qu’un prêtre forme et légitime en inondant de son urine les deux conjoints. Je v oui ois visiter les prisons publiques de ce peuple, assister aux audiences de ses tribunaux et aux sentences de son Gonseil suprême. Peut-être avois-je détruit en Afrique assez de monstres , pour aspirer à l’honneur d’être admis dans cet ordre de chevalerie dont l’historien nous décrit la marche et les cérémonies , avec autant de pompe que d’exactitude. Helas ! toutes ces brillantes ehimères se sont évanouies devant moi. Religion , police , lo ix , tactique des armées , ordre de bataille,, traites de paix , experience militaire , prisonniers , vainqueurs et vaincus, toutes ces hâbleries n’ont jamais existé que dans le cerveau» de l ’auteur, et dans les cabarets», où , en se moquant de lu i, on les fcîi a débitées. Trente ou quarante ans après la publication de Gë voyage, l ’abbé de la Caille fut aussi séjourner au Cap et p a r - là fut à portée de prononcer sur cet ouvrage , au moins en quelques matières; il en a parlé comme il devoit- Depuis la Caille, d’autres voyageurs ont aussi porté sur Kolbe leur jugement, et aujourd’hui nous savons à quoi nous en tenir sur le récit de ce voyageur. A l’en croire, dams toutes les peuplades hottentotes, sans exception , les mères ont l’horrible préjugé de ne pas vouloir deux jumaux, et l’abominable coutume d’en étouffer ou d’en égorger un des deux. Si ce sont deux filles ou deux garçons, c’est le plus foible qu’elles sacrifient ; si c’est garçon et fille , c’est la fille, dit-il, qui est la victime : et de ces crimes, il ne rougit point d’attester qu’il en a été le témoin. Et moi, j ’attesite que cette imputation est la plus noire calomnie contre la nature dont jamais écrivain sans pudeur ait souillé sa plume Pour m’en convaincre, il me suffisoit d’avoir vu les deux ju maux d’une des femmes du chef. Mais cependant, comme ces en- fans auraient p u , par quelque raison particulière , être une exception à la loi générale, je voulus interroger leur père sur ce prétendu massacre. Tous les matins , avant mon départ pour la chasse, il yenoit me Voir avec ses deux femmes , et se régaler en fumant une pipe et avalant un sopfe ( petit verre d’eau de vie). Quoique son langage fut différent de celui des Hottentots de la côte de l ’ouest, néanmoins, depuis près de deux mois que je parcourais le pays , j ’avois appris à le comprendre un peu et à me faire entendre. Un jour qu’avec lui et ses deux femmes j ’étois assis sur l’herbe près de ma tente, je mis la conversation sur l ’objet des jumaux, et fit demander à la femme s i , dans le cas où elle auroit deux enfàns, elle n’en étoufferait pas un r Cette question parut la fâcher ; elle garda le silence et tomba dans une rêverie stupide. Mais le mari, se tournant vers moi et me rappellant que déjai je lui avois fait plusieurs questions pareilles, m’attesta avec violence que ce sacrifice' étoit impossible» Ainsi donc , voilà les Blancs qu i, d’après Kolbe, accusent les N a- maquois d’un crime abominable , et qui outrage la mère commune de tous les êtres. . j ’ajouterai ici que les Namaquois, non-seulement ne se défont pas d’un de leurs jumaux quand ils en ont, mais qu’ils conservent et élèvent tous leurs enfans ; ce devoir est si naturel, que je n’âurois pu parvenir à faire comprendre une idée contraire. - Outre la grande inculpation révoltante dont je viens de parler, on m’avoit débité sur les Grands Namaquois , une fable absurde' dont je vérifiai également la fausseté» Ce n’étoit point au Cap que' celle-ci m’avoit été racontée , ainsi que l’autre. Je la tenois de Klaasf


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