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76 V O Y A G E mit les effets à terre ; et les conducteurs, reconnoissant, à la couleur des étiquettes, ceux qui alloient leur être confiés , les ran- geoient à part et en iorinoient un tas, en attendant le moment de charger. Pour moi, je résolus de ne partir que le lendemain matin et de passer encore la nuit dans mon camp, afin de tout régler et de donner mes dernières instructions à Swanepoel. Avec la moitié de mes gens, je lui laissois, pour sa garde et sa défense, la moitié de mes armes. Je laissois également aù camp Klaas Baster, qui, pendant mon absence, pouvoit me servir, en allant dans lés hordes namaquoises m’acheter des boeufs d’attelage ; tandis que, de mon côté, je travaillerois à m’en procurer d’autres dans les contrées que je devois traverser. En supposant!que j ’en trouvasse, qu’allois-je faire? qu’allois-je devenir? sans plan et même sans possibilité de m’en faire un, puisque les pays que je devois parcourir m’étaient totalement inconnus ; j ’étois combattu par mille idées confuses et contradictoires qui me troublèrent pendant toute la nuit. Mon premier projet, il est vrai, avoit été de traverser l ’Afrique d’une extrémité à l ’autre. Tous mes préparatifs à l’époque de mon départ du Cap, toutes mes démarches et mes précautions depuis ce jour n’avoient tendu qu’à ce but unique; et je me le proposois encore exclusivement, malgré les obstacles toujours renaissans que m’opposoient les saisons. Jusques-là, mon courage s’étoit roidi contre les contrariétés, et je me sentois celui de les braver encore. Mais je me croyois arrêté par une difficulté insurmontable; celle de me faire suivre désormais par mes charriots et de les. conduire avec moi : et ce qui m’étoit bien plus douloureux encore, c’est qu’en laissant mes voitures sur les bords de l’Orange, j ’abandonnois en même tems ces oiseaux, ces quadrupèdes, ces insectes que je m’etois procurés depuis mon départ du Cap, cette giraffe dont la conquête m’avoit causé tant de joie , enfin cette collection précieuse et chérie, achetée par tant de fatigues, de sueurs et de dangers. Ainsi falloit-il en revenir tou- E N A F R I Q U E . 77 jours à cette réflexion, que la traversée de l ’Afrique, si elfe est possible, ne comporte tout au plus avec elle que. des observations rapidés, et que vouloir ensemble marcher toujours, et toujours recueillir, est un projet fou, auquel ne pourraient suffire des armées de boeufs attelés à des charriots. Mais jé n’en assemblois pas moins toutes ces idées dans ma tête. Dans ces inextricables perplexités, mon parti le plus sage étoit d’achever l’excursion préparatoire que j ’allois commencer, et de remettre à prendre, à ce sujet, une dernière résolution ,• selon les circonstances qui m’attendoient. Jusqu’au moment de cette détermination fixe, je me proposai de travailler dans la route à augmenter nies collections d’histoire naturelle ; de me faire sur mon passage autant d’âmis qu’il me seroit possible; enfin de percer, si je le pouvois , vers l ’est, jusqu’à cette partie du centre de l’Afrique qui n’a guère que trois cents quarante lieues de large, pour y découvrir quelque passage plus favorable que ceux où je me trouvois engage, et- m’assurer au moins, dans le cas où quelque malheur inattendu m’empêcheroit d’avancer plus avant, la ressource de recommencer mon voyage sous de meilleurs auspices et avec des espérances plus fondées. Voilà ce qu’il y avoit en dernier résultat de plus raisonnable. La suite montrera si, même en cela, mes désirs étoient fondés sur des possibilités. D’après ce plan provisoire, je dis à Swanepoel de m’attendre sur l ’Orange pendant quatre ou cinq mois. Mais ce terme une fois écoulé, je lui permis, s’il trouvoit des attelages, de retourner au Namero m’attendre chez Van der Westhuysen pendant quelque tems encore; après quoi il devoit retourner au Cap. Je lui livrai mes notes, avec des instructions pour les faire passer à ma famille, dans le cas où il n’entendroit plus parler de moi. Enfin, après l’avoir chargé de deux lettres, l’une pour Gordon, l’autre pour Serrurier ; après avoir consenti qu’il rappellât Adam, je montai sur le radeau, et rejoignit ma caravane. Nous étions aux jours les plus longs et les plus chauds de l ’année; et chacun d’eux étoit marqué par un orage. Mais nous n’avions


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