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293 V O Y A G E étanben guerre avec les nations voisines, imaginèrent pour se recoa- noître. Je sais qu’en pareil cas, des peuples presque nus et se ressemblant par les traits et la couleur, ont besoin de signes caractéristiques et de moyens de reconnoissance. C’est dans ce dessein, que la plupart de ceux qui fournissent à latraite des esclaves, lesLoangos, Pombos, Cormantins, Abos, Papas, etc., se cicatrisent le visage, les bras, la poitrine , et la partie antérieure du corps , depuis le haut de la tête jusqu’aux pieds. L’ordre et la forme de ces stigmatës sont tels qu’au premier coup-d’oeil 011 peut distinguer de loin chaque nation. J ’ai même vu, à Surinam, les esclaves amenés en traite.être vendus plus ou moins cher selon ces cicatrices qui désignent les races. Après tout, On conçoit que des marques extérieures, aussi apparentes et aussi visibles, peuvent avoir été imaginées par des nations grossières. Mais qu’une d’elles ait adopté, pour se reconnoître, un signe très-difficile à distinguer , et caché d’ailleurs par la pudeur ; voilà ce qui me paroît invraisemblable et qu’on aura de la peine à, croire. An reste , il y a deux manières de faire l’opération ; et comme l’une est moins douloureuse que l’autre, on les emploie selon l’âge de l’individu et la force de son tempérament. Je n’entrerai sur cela dans aucune explication. Les procédés sont à peu près les mêmes qu’ils le seroient chez nous, et le résultat en est suffisamment expliqué. Je remarquerai seulement que c’est presque toujours le père qui se charge de l’opération, et qu’ordinairement il la fait, a la naissance de son enfant. Quelquefois cependant il la retarde jusqu’à sa troisième année , et même plus tard ; et alors il emploie, comme je viens de le dire, d’autres procédés. Il n’eût tenu qu’à moi d’être témoin de la cérémonie. Une femme de la horde étoit près d’accoucher ; mais il m’eût fallu attendre plusieurs jours peut-être ; et ce retard eût contrarié l’impatience que j’avois de rejoindre mon camp. D’un autre côté, j’aurois voulu ne pas me remettre en route, dans la crainte d’être attaqué de nouveau par les Boschjesman. J ’eusse fort désiré instruire Swanepoel de ma situation et lui demander un renfort qui me mît en état de les repousser; mais comment lui faire parvenir mes ordres ? En vain, le premier jour de mon arrivée , j ’avois proposé cette commission aux geifs de la horde ; aucun d’eux n’a voit voulu s’en charger. Les miens eux-memes en par- loient avec tant de répugnance et d’effroi , qu’après les avoir tates je crus prudent de ne point la leur proposer. Klaas étoit assez intrépide et assez dévoué à mes intérêts pour * l’accepter seul ; et il s’offrit meme .à partir. Mais dans les circonstances , ce brave homme me devenoit plus que jamais nécessaire. Il étoit l’ame de ma troupe ; il en soutenoit le courage par son exemple1; et dans le cas d’une nouvelle attaque j avois trop besoin d un pareil second , pour m’en priver volontairemént, Je renonçai donc au renfort, et me vis forcé de continuer ma route comme je l’avois commencée , c’est-à-dire , réduit à mes propres forces. Cependant, je me hasardai à demander au chef quelques hommes qui me servissent d’escorte jusqu’à mon camp; et'afin de les déterminer, j’annonçai qu’à mon arrivée je récompénserois leurs services ', et que je m’empresserois également de reconnoître les siens. J ’attendois un refus ; et je fus fort étonné de voir plusieurs personnes s’offrir d’elles-memes à m accompagner. Bien plus, le chef me fit suivre par une de ses filles , à qui il me pria de remettre les présens que je lui destinois, et de ne les confier absolument à personne d’autre ; ce que je lui promis. Nous partîmes deux heures avant le jour, afin d’avoir une plus forte journée et d’avancer davantage. On ne doutoit pas dans la horde que les Boschjesman ne fussent aux environs pour nous épier et nous attaquer , à la faveur des ténèbres; et cette conjecture étoit d’autant plus vraisemblable qu’àyant à traverser une très-longue plaine., nous marchions à découvert. Mais si, d’un côté, e’étoit-là un inconvénient, de l’autre nous avions l’avantage de promener


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