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tage. Nous passâmes la rivière une troisième fois ; et après nous être: arrêtés pour prendre quelque nourriture , nous reprîmes la piste ,. qui d’abord, pendant une lieue , nous conduisit nord-ouest ; puis se rapprochant de l’Orange par un grand circuit, nous y ramena,, à peu de distance de l’endroit où nous l’avions passée , la veille, G’étoit donc pour la quatrième fois, qu’après bien dès tours et des; détours, après trois journées de courses et de fatigués extrêmes,, nous allions être obligés de traverser le fleuve. C’était pour me tromper et m’abuser-sur leur fuite, que les brigands , par une ruse scélérate et très-bien combinée, 1* avoient eux-mêmes passée et repassée trois fois. C’étoît enfin , avec ces marches et ces contre - marches* forcées qu’il me fallût courir fort loin après une hordè qui n’étoit guère qu’à dix-huit ou vingt lieues démon 6amp, et qui habitait sur Ta même rive. Certes, si j’àvois eu connoi'ssance de ces faits, je me seroîs épargné* bien dés sueurs et des peines ; mais comment le deviner ? et qui* n’eût pas éré trompé ? Mes guides eux-mêmes, confondus par tant* d’astuce , craïgnoient que je ne voulusse pas y croire et que je ne les* soupçonnasse de favoriser les voleurs, et de les aider, en me faisant perdre un tems précieux, à mettre leur butin en sûreté. Pour me* prouver leur Bonne foi, ilsvoulurent passer l’Orange avant moi; et ce ne fut qu'après s’être convaincus par eux - mêmes que la trace re- commériçoit de l’àutre côté , qu’ils vinrent m’exhorter à lès suivre. Ce dernier passage faillit à me coûter la vie. Je le fkisois, à l’ordinaire, sur mon cheval*, tandis que deux nageurs conduisoient l’animal par la bride. Vers le milieu de la rivière,une des branches de son mords se rompit. Tiraillé par l’autre, il donne un coup de tête qui fait lâcher prise au second nageur , et il est entraîné par le courant. Skn's aucim moyen dé m’fen rendre maître, je me penche sur son cou;, et cherche à le diriger*de la main, ën le flattant; mais il- lui eût fallu* dès forces pour nager, et la route l’avoit tellement* fatigué qu’il n’en avoit plus. Il dériva pendant plus d’un quart- d’heure,, sans faire d’autres efforts que ceux qui étoient nécessaires pour se soutenir., Heureusement pour moi, le courant qui devoit nous noyer, le porta sur la rive ; mais tellement épuisé qu’il ne put se relever. En vain mes gens, accourus à mon secours , tentèrent de le-remettre sur ses pieds ; tous leurs efforts furent inutiles ; il ne se releva que le lendemain matin, après avoir demeuré en place le reste du jour et toute la nuit. Afin de lui donner plus de tems pour se remettre, je ne partis qu’assez tard dans la matinée. Nous reprîmes la piste de nos bêtes, qui nous conduisit à quatre lieues , dans l’est ; où nous rejoignîmes un sentier qui conduisoit à la horde ; sentier auquel aboutissoit lés traces de nos boeufs, qui tous avoient été réunis dans cet endroit; nous ne doutâmes plus alors que nos voleurs ne fussent les habitans de cette horde. Mes deux conducteurs Kaminouquois me demandèrent la permission de ne pas nous suivre plus loin; ils craignoient. qu’en avançant avec nous, on ne pût les reconnoître, et que, soupçonnés par la horde de m’avoir Conduit contre elle , ils n’occasionnassent une guerre entre les deux nations. Leur crainte était fondée, et leur prévoyance très-raisorinable. N’y voyant rien que de juste, j’y consentis ; ët ce fut pour leur malheur. Il fut convenu qu’ils resteroient où nous étions, et qu’ils y attendroient notre retour. Néanmoins, comme il n’eût pas été prudent d’avancer en plein jour et de nous mettre trûp à découvert, je résolus d’attendre.jusqu’à la nuit. Quelque fût l’obscurité, le sentier étoit trop battu, pour que nous pussions nous égarer. Nous partîmes à deux heures du matin , dans le plus grand silence ; et bientôt nous apperçûmes lalumière de plusieurs feux que mes gens estimèrent à trois quarts de lieue de distance. En avançant davantage, nous .entendîmes des chants, des cris de joie, des rires immodérés. Les voleurs se divertissoient. et faisoient bombance à mes dépens. Néanmoins, leur charivari produisit un bien. Mes chiens, en approchant d’eux, se mirent à hurler si fort qu’il fallut les museler ; mais sans l'effroyable tumulte qui couyroit leur voix., nous * ■ M m s


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