Cette sorte de reconnoissance me flatta beaucoup ; et j’y fus d’autant plus sensible que celles qui me la témoignoient n’a voient été pour rien dans ces prix de couteaux que je venois de distribuer,. Pour les en dédommager, j ’ajoutai, avec largesse, aux ornemens , dont je les avois déjà gratifiées , d’autres cadeaux du même genre,* qui parurent leur faire le'plus grand plaisir. La société des femmes de ma caravane leur avoit inspiré quelque goût pour la parure. Elléss’én glorifioient aux yeux de leurs maris, qui déjales trou- voient plus aimâblës ; et je suis convaincu que parmi les autres Houzouânasses elles auront été des objets d’admiration et d’envie. Délicieux passe-tems, momens enchantés, dans quel monde et sous quelles loix faut-il en déplorer la perte ! J ’eusse désiré retirer le Hottentot de la vie errante à laquelle il s’étbit dévoué. J ’empictyài même à ce sujet quelques instances , et lui proposai de le ramener avec moi dans les colonies ; mais il se refusa constamment à mes sollicitations. Il avoit une femme et deux enfans en bas âge dont i f ne vouloit point se séparer ; et ce motif me parut respectable. L à , les sentimens de la nature n’appartiennent* point aux livres, et il n’y a point de livre à faire pour montrer ce qui est bon, ce qui est mauvais. Enfin, la horde se sépara de moi en me serrant la m ain, et ce moment fut presque partagé par mes trembleurs. J ’apperCevois cependant sur plus d’un iront le plaisir de sé voir délivrés du poids énorme de la crainte, et que , malgré tant de services , d’amitié , de confiance , le préjugé n’avoit pu tout à fait se déraciner de tous les coeurs. Hélas ! à quoi tient la renommée ! Pour moi, qu i, loin de craindre les Houzouânas, m’étois fait une douce habitude de vivré avec eux et de les aimer., j’avoue de nouveau que je ne les ai point quittés sans regrets, et que je n’ai vuen teüx qti’ünë racé d’hoinmes active, laborieuse et intelligenteune race, â ’hoiUiUeâ toujours prête à obliger saHs: jamais trouver d’obL staclës'j et 'Supérieure aux autres par son caractère et son courage» Mais ce qui me la faisoit chérir de prédilection et m’avoit prévenu pour elle , c’étoit son air ouvert et riant. Tel est l’état habituel de sa physionomie , que, jamais on n’y voit la triste et douteuse empreinte, de. l ’inquiétude ou de la méfiance. L ’Houzouâna , il est v ra i, a des passions viplentes,. Lorsqu’il en est agité, elles se peignent dans ses traits d’une manière énergique et frappante ; mais ces orages sont passagers 5 et bientôt revenu à lui-même, on n’y apperçoit plus que spn ame fraiiche , confiante et loyale. Chez presque toutes les autres, nations africaines, j ’avois trouvé un idiotisme imbécille qui les faisoit extasier devant les divers objets, à mon usage , que je portois avec moi. Les Houzouânas les regard oient avec ce mouvement de curiosité qu’un peuple sans arts doit avoir pour tons les monumens et pour toutes les productions de l’industrie ; mais cette curiosité n’étoit chez eux ni l ’admiration stupide, ni la convoitise enfantine, des antres peuples. Il n’y a eu que mes armes qui les aient vraiment étonnés. Pendant tout le tems qu’ils ont vécu près de m oi, elles firent l ’objet de leur attention et de leurs entretiens. Mais il faut remarquer , que j ’avois cherché à leur en inspirer , par les effets, la plus grande terreur. Jamais je ne les leur laissai toucher, et je me gardai bien sur-tout de leur en montrer la manoeuvre et l ’usage. Avec le désir de s’en procurer, peut-être en auroient-ils bientôt j et alors de quel danger ne seroient pas pour les colonies et même pour le Cap, ces terribles Miquelets, qui , inattaquables dans leurs montagnes et infatigables -dans leurs courses, sont encore, par leurs invasions inopinées et nocturnes, des ennemis irrésistibles ! Plusieurs fois je me suis applaudi que la nation fut une des plus pauvres de l’Afrfi- que , et que, dénuée de tout, elle n’eut rien à offrir aux échanges du commerce. Sans ce la, ceux des colons qui se font coureurs des déserts , auroient peut-être pénétré jusqu’à elle. Peut-être lui eussent.-ils vendu de la poudre et des armes. Au moins ils lui en auroient donné le désir > Eh! qui sait ce que ce désir aur oit produit! Ces hommes redoutables sont pourtant ceux, d’entre tous les Africains, qui m’ont inspiré le plus d’amour et d’estime. Ce sont ceux avec qui j ’eusse entrepris sans crainte de traverser l’Afrique toute entière, si ma bonne fortune me les avoit fait connoître plutôt ; et
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