tère que j ’en étois redevable qu’à lu i, q u i, de race étrangère et depuis peu établi dans la horde, devoit y a voir, pour ce qui me regardoit, peu de prépondérance. Néanmoins, comme il nfavoiî été utile en qualité d’interprète, et que c’étoit lui principalement qui m’a- voit donné des instructions et des connoissances sur la nation, je crus lui devoir quelque dédommagement j et en conséquence je lui promis un couteau. Nos fusils, par la facilité que donnent leur mire et leur direc- - tion , sont une arme si sûre qu’en vérité c’est presque une honte de n’y être point adroit. Il n’en est point ainsi de l’arc ; et à moins que le Sauvage ne tire perpendiculairement sur sa tête, le fusillier a sur lui un avantage immense; sur-tout à mesure que l ’objet auquel on vise , s’incline et se rapproche de la ligne horisontale. Dans ce dernier cas , s’il ne tire pas à une très-grande proximité , sa flèche n’a plus de portée directe. Il faut donc , pour qu’elle atteigne le b u t, qu’il lui fasse décrire une parabole ; et la donnée de cette courbe est une combinaison qui exige quelque calcul. : Un autre élément nécessaire est celui de la juste force qu’il doit donner au trait, s’il ne veut pas, ou dépasser le b u t, ou rester en-deçà. Enfin , une troisième connoissance indispensable, c’est la hauteur de la courbe, c’est-à-dire, la combinaison de la force et de la distance. ' f Pour mieux me faire entendre, je suppose le but à cent cinquante pieds de distance. Dans ce cas, il faut que le petit rayon de la parabole, quelqu’en soit l ’étendue, ait le tiers de la longueur du grand diamètre ; ou , en d’autres termes, que le point le plus élevé où se porte la flèche soit égal à cinquante pieds. Il faut encore que ce point le plus élevé coupé presque en deux parties égales le diamètre de la distance : autrement, si la flèche l ’outre-passe, elle porte au-delà du but ; si elle passe en-dessous, le coup devient trop court. Le genre de vie que j’ai mené long-tpms m’a donné quelque expérience sur la théorie , ainsi que sur la pratique de cet art. Ceux de mes amis qui ont vécu plus particulièrement avec moi, Savent qu’avec une sarbacane j ’ai souvent démonté des hirondelles au vol; et mainte fois ils m’ont vu couper ma ballè en deux parties sur le tranchant d’un couteau qui me servoit de but; je manie encore assez adroitement un arc ; dans mon enfance j ’ai fa it , à Surinam, parmi les jeunes Caraïbes , l’apprehtiSsage de cette arme, et je m’y suis perfectionné dans mes voyages d’Afrique, toutes les fois que j ’en ai trouvé l ’occasion ; et il m’est arrivé plusieurs fois de disputer d’adresse avec les plus habiles tireurs hottentots.1 Le Sauvage ne connoît aucunement la théorie dont je viens d’exposer ici quelques principes ; mais il acquiert, par la pratique et l ’usage, une habileté qiii vraiment est étonnante. Eh ! que ne doit-on pas attendre de gens q u i, pour leur subsistance et la défense de leur v ie , n’ayant que leur arc , s’exercent à le manier dès l ’âge le plus tendre. S J ’ai vu les Hottentots de l ’est, en général, très-adroits à manier l ’are. Mais aucun n’a poussé l’adressé aussi loin que les Houzouânas. Chez eux l’exercice de la flèche est devenu un art ; et cet art fait même une partie de leur tactique, ainsi que j ’ai eu lieu de m’èn convaincre par cette fête de l’arc que je proposai pour mes couteaux. Le but fut un cercle tracé, noirci avec'du charbon sur l’aubier d’un gros mimosa que j ’avois fait dépouiller de son ëctirce. Je laissai aux tireurs la liberté de fixer eux-mêmes là distance à laquelle ils Vouloient se placer; et ils la déterminèrent par un léger sillon, tracé sur la terre, et qu’il n’étoit point permis d’outre-’passer. Apres ces préliminaires, tous coururent art lieu fixé ; mais ils s’y rendirent confusément, et en poussant des cris de joie , Comme si chacun put marché à une victoire assurée. Alors chacun choisit, dans son Carquois, la flèche qu’il croÿoit la plus propre à lui procurer cette victoire ; ét lés précâutiohs qu’il* apportèrent à Ce choix, le soin avéc lequel ris examinèrent leurs flèches , l ’une après l’autre, l ’àttéûtiôn qu’ils mirent à lés mesurer sur l ’a rc , à les peser, à les*balancèr dans la main, furent réellement une chose tres-refnarqûàble.' , Tome I L G 5
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