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premiers pas que nous y fîmes, j ’y trouvai tant de difficultés et d’obstacles , que si je n’avois point eu de pareils guides, j ’au- rois , je l ’avoUe, regardé l’entreprise comme folle, et ordonné de rebrousser chemin. Mais ils s’étoient attendus à ce premier effet ; et en conséquence', ils ne songeoient qu’à nous animer et à nous encourager de leur mietix. Je les voyôis courir en avant, grimper sur les rochers pour découvrir les passages les moins difficiles, et revenir pour nous les- indiquer. Ils ne craignoient pas de doubler leurs fatigues, pourvu qu’ils réussissent à nous épargner quelque difficulté ; et ils met- tôient dans tout cela tant de zèle , d’attention et d’intelligence, que l ’admiratipn qu’ils me causoient me faisoit oublier le dur et pénible travail de notre marche. Il en étoit de même pour nos animaux. MeS gens n’étant plus en état de les mener, il avoit fallu en charger nos guides ; et ceux-ci mettoient à cette partie de ma caravane la même ardeur. Tandis que les uns nous dirigeoient à travers les ravins, les gorges et les fondrières „les- autres condüisoient, par le haut des montagnes, nos boeufs chargés; Du bas des rochers que nous gravissions, nous les entendions , au-dessus de nos têtes, animer les animaux par leurs cris ; oe bruit confus, le premier sans doute qui ait troublé ces solitudes, battoit tous les rochers d’alentour. Il effrayoit les animaux sauvages ; je voyois fuir au loin et se retirer dans leurs trous les damans , les hiennes et jusqu’aux tigres. Le vautour fuyoitdans les airs, abandonnant son asyle aecéutumé et répondant au beuglement de mes animaux par des croassemens épouvantables. Le voisinage des bêtes féroces devenoit très-mquiétânt dans la situation où nous nous trouvions. Séparés forcément les uns des autres par l ’apreté des lieu x , ét hors d’état par conséquent de nous sécourir mutuellement, nous avions tout à craindre si elles nous at- taquoient. Falloit-il passer par quelque ravin étroit et profond , c’é- toit une autre sorte de péril ; serrés entre des rochers entassés les uns sur les autres, et qui quelquefois s élevoient verticalement à plus de deux cents pieds au - dessus de nos têtes, nous courions E N A F J I Q U E ; le' risque d’être écrasés par la chûte de quelque éclat, détaché par ceux qui marchoient au - dessus de nous. Au milieu de tous ces dangers et de ceux que leur imagination y ajoutoit encore, mes trem- bleurs n’étoient pas à leur aise. La consternation étoit peinte sur leurs visages. Ils marchoient dans un profond silence , mais avec des mouvemens d’inquietude, qui annonçoient 1 état de leur ame.- F.nfin cependant, à force de monter et de gravir, nous atteignîmes la crête de la chaîne ; et ce fut pour nous un moment de satisfaction bien agréable que celui où les premiers de la troupe qui y parvinrent, portant au loin devant eux les yeux sur la plaine, et l’appercevant, s’écrièrent tous , comme s’ils eussent échappé à un. naufrage. . . Tout le monde accourût ; et alors l ’allégresse devint universelle. Les Houzouânas paroissoient jouir de la joie commune. Ils se plai- soient à me montrer dans la plaine les sinuosités du fleuve et les arbres qui bordoient ses rives; de leur côté, mes gens montraient un peu de honte de les avoir soupçonnés, et bientôt la confiance alloit,surpasser toute leur inquiétude. Il nous restoit à descendre la montagne; et nous devions nous attendre aux mêmes fatigues que nous avions éprouvées en montant. Mais outre que la joie d’approcher du terme ne pouvoit manquer de les adoucir, elles s’annonçoient réellement comme moindres , parce que la plaine du fleuve étant plus élevée que le côté opposé, l’espace à parcourir étoit plus court. D’ailleurs, à une certaine distance du sommet, nous trouvâmes, én descendant, une station qui nous arrêta : c’étoit un vallon frais et charmant, arrosé par un ruisseau, et dont là rencontre nous fut d’autant plus agréable qu’au milieu de ces montagnes h ideuses nous n’avions vu jusques-là que des objets d’horreur. A cet aspect, mes gens oublièrent et les fatigues qu’ils venoient d’essuyer et celles qui les attendoient encore. Ils ne songèrent plus même au voisinage de ces tigres dont ils avoient été si effrayés. Tous me demandèrent de m’arrêter et de leur laisser passer la nuit dans le vallon ; j ’y consentis d’autant plus volontiers que le lieu


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