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ao4 : V 0 -Y A G E Pendant toute la longue route qu’ils ont faite avec moi, jamais ils ne se sont démentis. Sous bien des rapports ils me paroisspient •se rapprocher des Arabes j qui, également nomades y également braves et voleurs, sont d’une fidélité inaltérable dans leurs engagemens, et défendroient jusqu’à la dernière goutte de leur sang le voyageur qui achète leurs services et se met sous leur protection. Si mon pro j et de traverser l ’Afrique toute entière, du nord au sud, étoit pratiquable.j je le répète , ce ne pouvoit être qu’avec les Hou- zouânâs. Je suis convaincu que cinquante hommes de cette nation sobre, infatigable et brave, m’eussent suffi pour l ’effectuer; et je regretterai toujours de les avoir connus trop tard et dans des circonstances où des malheurs sans nombre m’avoient réduit à y renoncer, au moins pour le moment. Cependant, quelque confiance que m’eut inspirée leur loyauté, je ne m’oubliois pas au point de négliger les précautions que peut dicter la prudence. Jamais je ne me hasardois avec eux hors de mon camp, que bien armé. J ’avoué’ même que dans las commencemens , je faisois veiller du monde, que j ’avois toujours un chien dans ma tente pendant la nu it, et que mes armes étoient toujours toutes chargées. Mais j ’avoue aussi, en même tems, qu’en me précaution- nant ainsi, j ’avois moins en vue les Houzouâùas de la horde que ceux de leur nation, q u i, ne me connoissant point et n’ayant pas encore contracté d’alliance avec m oi, pouvoient découvrir mes feux et se croire permis de venir m’attaquer et me surprendre pendant la nuit, à la manière des brigands, connus généralement sous le nom de Boschjesman. Mainte fois déjà mes aventures m’ont donné lieu de parler de ces Boschjesman. J ’ai dit qu’au Cap on désignoit sons ce nom général tout homme, de quelque nation ou couleur qu’il pût être , qui, désertant , se retiroit dans les forêts ou les montagnes, s’associoit à d’autres fugitifs, y vivoit avec eux, sans autres loix que celles que comporte un assemblage de voleurs ; et subsistoit de brigandage, sans même épargner les associations pareilles de ses semblables. Lès Houzouânas n’étant connus que par leurs incursions et leurs pillages , on les confond dans la Colonie, aussi sous la dénomination commune de Boschjesman. Quelquefois cependant, à raison de leur couleur sémi-blanche, on les appelle chineese Ilottentots (iloitentots chinois); et ce double nom peut induire en erreur un voyageur mal instruit, et mettre du louche dans ses relations. Leur vrai nom, le nom qu’ils se donnent à eux-mêmes, est celui d’Houzouâna; et ils n’ont rien de commun avec les Boschjesman, qui ne sont qu’un amas de fugitifs et de marrons. Jamais ils né s’allient qu’entre eux. ■ Presque toujours en guerre avec les nations voisines , jamais ils ne se confondent avec elles ; et s’ils consentent à admettre dans leurs peuplades quelque étranger, ce n’est qu’après un long noviciat, qui constate sa fidélité , et sur-tout son courage. Le Hottentot de la horde avoit subi ces épreuves; et la manière dont il en étoit sorti lui avoit valu une grande considération. Quoique les Houzouânas soient nomades dans leur contrée, et qu’ils passent une partie de l ’année à émigrer et à faire des courses lointaines , néanmoins ils ont un vaste canton qu’ils habitent, dont ils sont, en effet, presque les seuls habitans, et dont je ne crois pas qu’aucune nation quelconque soit capable de les expulser. C’est cette partie de l’Afrique qui, de l ’est à l’ouest, s’étend depuis la Caf- frerie jusqu’au pays des Grands Namaquois. Quant à sa profondeur du sud au nord, je l’ignore; mais je la crois très-considérable, tant parce qii’il faut une immense étendue de terrain à une nation nomade , que parce que cette nation est, je crois, fort nombreuse. Au Cap, on leur suppose une population très-foible ; et la ra ison Sur laquelle on se fonde, c’est que, quand ils passent sur les côtes de l’onest, soit pour y v iv re , soit pour y p ille r, on ne leur voit pas de gros détachemens. Mais c’est-là, chez eux, une ruse de guerre. Dans la crainte d’être attaqués, si on connoissoit leur nombre , ils cachent leur marche le plus qu’il est possible ; ils suivent les ravins et les sommets des montagnes ; et souvent même ils ne voyagent que de nuit : ce qui fait qu’on les craint toujours, et qu’on les suppose encore voisins, quand déjà ils soiit à cent ou deux cents lieues d’éloignement.


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