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zaines de mouchoirs des Indes, et notamment ceux d’une couleur rouge ou bleue ; tous ces articles que les femmes ou filles des colons demandent sans cesse aux voyageurs, sont nécessaires pour gagner leur affection, et quelque chose de plus même quand l’occasion s’en présente. J’emportois aussi, fort mal-à-propos, une caisse remplie de serrures et de cadenats, croyant avec ces objets rendre service à quelques habitans de l’intérieur ; mais ce qui m’eut fait grand plaisir dans mon premier voyage, me devint inutile dans celui-ci, puisque je n’ai trouvé l’occasion de placer qu’une seule serrure chez un colon de Nameroo ; et encore, je crois qn’il ne l’accepta que pour ne pas me désobliger; car j’avouerai bonnement qu’en la lui donnant, j’igno- rois moi-même où il la poseroit, puisqu’il n’y avoit à sa maison que deux ouvertures, dont l’une , qui servoit de porte, étoit bouchée, la nuit seulement, avec une pean de boeuf, et l’autre, tenant lieu de fenêtre , se fermoit avec le fond d’un vieux tonneau. Sachant combien le tabac en poudre étoit recherché des femmes, je m'en munis aussi de plusieurs livres. Quelque minutieux que pourront paraître ces détails, l’utilité dont ils pourront être pour d’autres voyageurs qui entreprendraient les mêmes courses, m’ont fait une loi de ne pas les pa'sser sous silence. J ’avois appelé Swanepoel à la ville pour présider à mes emballages , et le consulter sur mes appovisionnemens. Son intelligence en ce genre , pouvoit m’être très-utile ; et, en effet, il me rappela certaines circonstances où, faute.d’outils nécessaires nous nous étions trouvés dans le plus grand embarras. Pour n’avoir plus à craîndrè de pareils inconvénients, je lui donnai l’inspection générale de tous mes préparatifs, et le chargeai de faire un bon assortiment de tout ce qui pouvoit m’être utile, pour que rien ne nous manquât en route. Après avoir rempli les fonctions de son intendance, il se rendit sans retard à la horde de Klaas, pour le prévenir du jour de mon départ, et lui donner rendez-vous dans le Swart-Land chez mon ami Slaber, où je comptois rassembler toute ma caravane , et où depuis long-tems déjà une de nos voitures m’avoit dévancé. î)es Hottentots qui m’avoient suivi dans mon premier voyage, il n’y en avoit que huit dont j ’eusse été constamment satisfait ; il n y eut aussi que ces huit que je voulus conserver, et que je fis avertir. En vain d’autres vinrent, avec instance , me supplier d’accepter leurs services , je les refusai tous. Pour les remplacer, Swanepoel à son retour me proposa quelques braves de sa connoissance,. dont il me répondoit ; dans ce nombre étaient deux bons tireurs qu’il avoit cru pouvoir me devenir utiles ; et qu’en effet j ’acceptai sans hésiter. Il ne tenoit qu’à moi de grossir ma troupe de plusieurs personnes. Comme tout le monde savoit an Cap que mon premier voyage avoit été heureux, qu’il ne m’étoit arrivé d’autres accidents que ceux qui sont inévitables dans une pareille entreprise, beaucoup de Colons et d’Européens vinrent me solliciter pour obtenir de moi d’être du second. Je ne puis dire tout ce qui me fut fait d’instances à ce sujet; mais, toujours fidèle à mes principes, déterminé plus que jamais à rester parfaitement libre dans mes opérations, je ne me laissai ébranler ni par les considérations personnelles, ni par les prières ; et sons différens prétextes, adoucis par les égards de l’honnêteté, je trouvai moyen de me débarasser de tous les solliciteurs. De ce nombre étoit spécialement un certain Pinar, chasseur déterminé , grand coureur de bois, et renommé sur-tout pour son adresse à la chasse des éléphans. Cet homme, à qui ses hauts-faits en ce genre, avoient acquis dans la colonie une certaine célébrité, et dont on racontait cent prouesses toutes plus merveilleuses les unes que les autres , m’avoit aussi proposé de m’accompagner ; et au ton de confiance avec lequel il se présentait, il me parut convaincu que je devois me trouver heureux d’avoir avec moi un héros de son mérite. J’osai le remercier cependant ; et l’on jugera si j’eus tort, quand on. saura qu’ayant eu le malheur de le rencontrer dans ma route, il manqua de faire perdre la vie à mon vieux Swanepoel. Je fus tenté néanmoins de faire une exception en faveur d’un jeune chirurgien, qui paroissoit très-empressé de me suivre. Le talent d’un homme de cette profession pouvoit, dans le besoin, de


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