« vous charge d’acquitter pour moi en en faisant usage selon le voeu.' a de ma respectable mère.» • On sent très-bien que le présent d’une robe-de-chambre à un voyageur accoutumé à un autre costume, presque toujours en habit de chasse et les armes à la main, présente l’image d’une carricature assez ridicule, et qu’un pareil accoutrement eût elé plus plaisantent adapté aux épaules de nos procureurs ou de nos médecins d’autrefois ; mais cette scène si digne pour tant d’autres du théâtre de la foire, prend ici un caractère touchant de simplicité, de bonhom- mie, de vérité, qui m’attendrit encore. L’objet n’est rien par lui- même, mais les idées que cet objet rappelle, sont touchantes; la main qui donnoit m’est si chère , que même après dix ans je ne revois point sans plaisir les lambeaux de la robe, que je me suis fait un devoir d’user jusqu’à la cordeî lorsque je suis devenu plus sédentaire; enfin, la plus belle antique ne seroit pas plus religieusement conservée. i Je mejèttaiaans les bras de riion ami les larmes aux yeux, et je sentis les. siennes inonder mon visage. Le spectacle de sâ maison, de toutes parts en mouvement, étoit extrêmement touchant ; on eût dit un déménagement à l’approche des brigands : l’abandon des lieux auxquels on, fut si attaché, où l’on goûtoit des plaisirs iniiQ- cçns et vrais, a quelque chose d’affligeant et qui consterne une ame sensible. Lia maison fle mon ami pârticipoit un peu des regrets que je donnois au maîtrç ; im meuble, le plus simple ustensile dont il a voit coutume de se servir» fixoft douloureusement mes regards : cette sensibilité active fst le partage et le malheur d’un petit nombre d’humains ; elle donne véritablement de la vie aux objets les plus inanimés. Mais çe. qui rendoit ia scène encore plus douloureuse, c’étoit le silence de nos amis communs rassemblés autour de l’ami qui par- toit. Nous l’accompagnâmes jusqu à la chaloupe qui allojt nous l’en- levet ; il ne.nous permit pis de le suivre jusqu’au bâtiment ;. il nous fallut rester suj-le rivage, contens d.e lç’suivre encore des yeufl. Arrivé à bord , ïl.monta sur le. tillac , et là, avec son mouchoir ,. il nous fit lès derniers signaux de l’aittitie. Un de ses meilleurs (unis et des miens eût pitié de l’angoisse ou j’é- tois, il m’emmena chez lui ; nous passâmes tout le .jour à no.usrap- peller tous les traits de bienfajsance qui avoiçnjt honoré la Vie publique et privée du meilleur des hommes. Son nom reyenoit sansçpssç, à chaque propos. Un dernier trait vint mettre le comble à notre douleur. Tout-à-coup .se fit entendre le canon de la rade et, du fort qui annonçoit le départ du navire, et quisaluoit pour la dernière fois le fisoal. Je m’élançai vers le belvéder, et, avec une lunette, je vis lç bâtiment qui fendoit les flots à pleine voile, et qui se perdit bien-: tôt dans l’horison. Cependant je regagnai dans la nuit mon appartement; il me sem- bloit une prison. Abandonne â moi-même , jjetois dans là situation d’un coupable que tout le monde fuit, et qu’on livre à ses remords ; jamais un amant ne sentit avec plus de force une séparation si cruelle. ' Le lendemain matin M. Serrurier, son successeur ; le colonel Gordon, commandant delaplace ; Hakker, gouverneur en second; Con- vray, colonel du régiment de Pondichéri, et que depuis j ’ai eu Iq plaisir de revoir à Paris ; enfin, tous le§ amis du voyageur, et les personnes auxquelles il m’avoit recommandé, et dont quelques-unes m’étoient même inconnues, vinrent à l’envie m’offrir leurs services • m’assurant toutes qu’ellés s’empresseroient de me faire oublier, par leurs soins, une perte qui leur étoit,aussi sensible qu’à poi. Chacun me prioit d’accepter un logement chez lui ; niais, parmi ces offres, je dois distinguer sur-tout celle de Gordon; il fit la sienne, tant en son nom, qu’au nom de son épouse, et y mit tant d’instance et de franchise, que je ne pus le refuser. D’ailleurs, indépendamment des obligations personnelles que je lui avois et des services qu’il m’avoit rendus dès les premiers jours de mon arrivée au Cap, je lui étois aussi sincèrement attaché par notre conformité de goût pour l’histoire naturelle, qué par la reconnôissance et l’âmité. Cependant j ’étois résolu à ne point user encore, pour le moment, de son offre obligeante, et je le priai de permettre que je gardasse mon appartement jusqu’après la vente des effets de Boers : car là maison de mon
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