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mieux eonnoître en publiant ses découvertes. Il doit compte à l’Europe de ce complément de recherches sur lefc contrées si intéressantes de l'Afrique ; elles sont une propriété de la science qui ne peut pas rester plus long-tems ensevelie dans l’oubli. Gordon s’ex- tasioit fréquemment en voyant la multitude et' la variété des espèces que j ’avois apportées ; lui-même avouoit que la plus grande partie lui en étoit entièrement inconnue. Il est vrai que ne tenant à la société par aucun des liens qui entravent ou ralentissent les projets les plus heureux, maître absolu de mon tems et dégagé de toute autre affection que la chasse, je me livrois a son exercice en vrai sauvage ; et plus qu’nn sauvage que le besoin seul excite, je savois attacher à la conquête,d.’ùnindividu dont je découvrais l’existence, un prix qu’aucune fatigue n’eut pu modérer à mes yeux. A peine à son cri ou à quelque signe semblable me sentais-je appelé -par quelque nouvel oiseau, les moyens ordinairès ne me suffisoient pas ; j ’en inventois aussitôt pour qu’il ne fût m’échapper, et fallut-il passer un mois ehtier à le poursuivre ou bien à l’attendre , je campôis là et ne quittais ma place qu’après avoir obtenu ma proie. C’est à cette opiniâtre persévérance que je dois l’avantage de posséder presque toutes les espèces d’oiseaux qui appartiennent à la partie d’Afrique que j ’ai parcourue : je dis presque tous ; car il est des événemens qui dépassent la borne de notre puissance. Qui ne sait, par exemple, combien la différence des saisons peut éloigner du chasseur ou mettre à sa portée des espèces qu’alors il ne devra plus qu’au hasard. Il en est ainsi des oiseaux de passage. Sans doute dans une contrée sujette à de fortes pluies , à de longues sécheresses, à de grandes variations de l’atmosphère, ces oiseaux de passage se rencontrent et s’éloignent pins fréquemment que dans notre Europe où nous né sommes soumis qu’à l’alternative du froid et du chaud; et c’est encore en proportion de la variété des espèces que le plus adroit chasseur doit s’attendre à n’en obtenir qu’une suite pins ou moins complette ; la vie d’un homme ne pouvant suffire à la recherche de tout ce qui existe en ce genre. Mes journées se trouvoient utilement et presqu’entièrement remplies à classer, à entretenir mon cabinet, à méditer sur les moyens d’en remplir les_ lacunes , à former un système suivi qui pût un jour au sein de la vieillesse me dédommager .de l’impuissance d’en aller chercher les élémens à leur source et ne vînt mêler aucun regret au souvenir d’une épreuve qu’on ne peut recommencer qu’en recommençant sa vie, Je me promettois en idée, dans ce second voyage de plus grandes jouissances que dans le premier. La boussole de l’expérience devoit cette fois guider ma marche et m’ap- planir de terribles obstacles. On verra jusqu’où peut s’étendre notre prévoyance, et si le précipice n’est pas souvent voisin du précipice auquel on échappe. J’avois en partie disposé tout Ce qui m’étoit nécessaire pour partir ; le moment de sortir du Cap n’arrivoit pas assez tôt à mon gré. Un homme que j ’attendôis avec une mortelle impatience, que je n’avois point vu depuis mon retour, sans lequel je ne me promettois ni plaisir ni sûreté, tout à coup se présente à mes yeux : c’étoit Klaas. Il y avoit alors chez le fiscal compagnie nombreuse et choisie. Klaas jouissoit par-tout d’nne grande renommée. Associé à mes travaux et chargé pins particulièrement d’en exécuter les plans, je n’avois point tari d’éloges sur ce conseiller fidèle ; son arrivée subite excita la plus vive curiosité dans la maison de Boers. On ne fut plus occupé que de mon ami ; par un mouvement spontané chacun se leva lorsqu’il parut. Je devois tout à son attachement et à sa fidélité. Il en recueillit dans-un instant de précieux témoignages. Le fiscal tira sa bourse et lui fit un présent considérable ; tous les assistans imitèrent son exemplê : Klaas étourdi, stupéfait, se crut aussi riche que le gouverneur. Une amère pensée absorboit pourtant toutes celles qui naissoient de cette réception imprévue ; il s’étoit, en entrant, avancé vers moi pour me témoigner sa joie que son émotion même l’empêchoit d’exprimer ; il tenoit aussi dans ses mains un présent ; les yeux mouillés de larmes, la bouche entr’ouverte , il me présentait certain paquet, certaine boîte auxquels il paroissoit attacher un grand


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