partie, & que le défir d’un pareil Voyage pourroit tenter , je prendrai plaifir à en indiquer la forme. Elle avoit deux pieds & demi de haut, dix-huit pouces de profondeur & autant de largèur. Elle étoit divifée , fur fa longueur, en huit parties qui contenoient chacune une layette qui ne fe prolongeoit que jufqu’à trois pouces du fond. Ces layettes , ainii pofées verticalement , fe tiroient par le b au t,& n’avoient d’échappement que leur épaiflear,de telle forte que fi les fecoufles (& nous en éprouvions à tous momens de violentes) venoient à détacher quelques infectes de leurs cadres, ils tomboient au fond de la raiffe dans le vide de trois pouces que j’avois fu ménager , & ne pouvoient offenfer ceux qui tenoient plus ferme. Une couche de deux à trois lignes de cire vierge , fondue avec de l’huile de lin , & appliquée fur le fond de la caiffe , en bouchoit tous les pores , & , par fon odeur, écartoit les Infeéles mal-faifans. C e ll ce premier chariot qui portoit prefquen entier mon arfenal. Nous l’appelions le 'Chariot-?Maître. Une des cinq caifles dont j’ai parlé étoit remplie par compartimens de grands flacons qitar<rés, qui contenoient chacun cinq à fix livres de poudre. Ce n’étoiï là que pour les détails & les befoins du moment. Le magafin général étoit compote de plufienrs petits barils. Pour les préferver du feu ou de l’humidité , je les avois fait rouler féparément dans des peaux de mouton fraîchement écorchées. Cette enveloppe une fois féchée étoit ahfolumenl impénétrable ; tout calculé je pouvois compter fur quatre à cinq cents .livres de poudre , & deux mille au moins de plomb ;& d’étain tant en faumon que façonné. De feize fufils, j’en avois douze fur une voiture; l’un de ces fufils deftiné pour la grande bête, comme Rhinocéros, Eléphant., Hyppopotame, portoit un quart de livre. Je m’étois muni, outre cela , de plusieurs paires de piftolets à deux coups, d’un grand cime terre & d’un .poignard. Le fécond chariot odroit en caricature le plus plaifant attirail qu’on ait jamais >vu.; mais il ne .m’en étoit pas pour cela moins cher. C’étoit ma cuifihe. Que de repas exquis & paifibles ! Que le Souvenir de ces 'détails de ma vie domeftique & charmante Sont encore délicieux S mon coeur ! Je n’aflifte jamais à ces dîners d’étiquette & de gêne oit l’ennui vient diftribuer les places, que lé dégoût qu’ils me caufent ne me reporte foudain au milieu de ce doux charivari de nos haltes , & ne préfente a mon imagination le tableau fi vivant & fi varié de mes bons Hottentots occupés à préparer le repas de leur ami. Ces meubles de ma cuifine n’étoient pas confîdérables. J avois un gril, une poêle à frire , deux grandes marmites, une chaudière, quelques plats & afliettes de porcelaine, des Cafetieres , tafles, théières, jattes, des bouilloirs. Voilà ce qui compofoit a peu près tout mon ménage. Outre cela , pour moi perfonellement je m’étois muni de linge de toute efpèce, d’une bonne prôvîfion de fucre blanc & candi, de café, de thé , & de quelques livres dé chocolat. Je dévois fournir du tabac & de Te au de vié aux Hottentots qui faïfoient ce voyage avec moi. Aufli avoîs-je forte provifion du premier article & trois tonneaux du fécond. Je voiturois encore une bonne pacotille de verroteries , quincaillerie & autres curîofités, pour faire, fuivant l’occafion, des échanges ou dès amis. Joignez à tous ces détails de ma Caravane, une grande Tente, une Canonnière ; les inftrumens néceffaires pour raccomodér mes voitures , pour couler du plomb; un cric, des cloux , du fer en barre & en morceaux, des épingles, du f i l , des aiguilles, quelques eaux fpi- ritueùfes , &c. & vous aurez une idée parfaite de ce ménage ambulant. Telle étoit la charge de mes deux voitures qui pouvoient pefer quatre à cinq milliers chacune. Je ne dois pas oublîèf de parler dé mon néceflaire. II m’a trop fonvent amufê. Rien nell comparable à l’étonnement qu’il caufoit aux Sauvages dès Pays lointains. Je m’en fervois toujours devant eux. Leurs dîfcours à ce fuj et ont plus d’une fois ptolongé ma toilette , & m’ônt procuré d’agréables récréations. Mon train étoit compofé de trente Boeufs ; favoir, vingt pour les deux voitures, & les dix autres pour relais ; de trois Chevaux de chaffe , de neuf Chiens, & de cinq Hottentots; j’augmentai con- fidérabrement par la fuite le' nombre de niés animaux & de ijiés G i j
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