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yeux font fermés, Celui que j’y ai vu , me difoit tranquillement qu on ne vieilliffoit point à ce métier là , & je n’avois pas de peine à le croire; car il étoit lui-même dans un trille état; & , quoiqu il n’eut alors que trente-cinq ans, fes genoux & fes jambes étoient tellement roidis qu’il ne marchoit qu’avec beaucoup de peine. Tallai viliter auflî le fameux territoire de Confiance derrière la Table, Ce vignoble ne produit peut-être pas la dixième partie du vin qu on débite fous fon nom, Il apartenoit alors à M. Cloéte. Les uns difent les premiers plants originaires de Bourgogne , les antres de Madère, d’autres encore de Perfe ; ce qu’il y a de cer- tain , c eft que ce yin , bu au Cap , eil délicieux ; qu’il perd beaucoup par le tranfport , & qu’après cinq ans il ne vaut plus rien. A mon arrivée , le Demi-Haam ( c’eftrà-dire environ quatre? yingts bouteilles) fe vendoit trente-cinq à quarante Piaftres; à mon départ il en valoit plus de cent. A côté de Confiance , eft un autre vignoble appelé U Petit Confiance. C’eft feulement depuis fept ou huit ans qu’il marche de pair avec fon voifin. Il eft même arrivé qu’on en a quelquefois payé la récolte plus cher aux ventes de la Compagnie. Comme il n’eft féparé de l’autre que par une fimple haie , qu’il jouit, d’ailleurs , de la même expofition , il eft probable qu’il n’y avoit, jadis, entre ces deux vins , de différence que dans la façon de les travailler. Tout l ’efpace compris entre la baie Falfo & celle de la Table eft orné de maifons de plaifance & de belles habitations où l’on fe borne à la culture des légumes, des fruits, & lùr-tout du vin. Les plus eftimés & qui approchent le pltts du Confiance font ceux de Becker & de Hendrik. Les Marchands de vin du- Cap favent les apprêter & les vendre pour du vrai Confiance. Outre ces vins doux , d’autres cantons des Colonies, tels que-la Perle , Stellembofch , Drageflein , fourniflent des vins fecs très-eflimés. On y fait aufli du vin qui approche du Rota , à qui l’on donne ee nom , & qu’en effet j’ai trouvé' tout au moins auiH bon. Lorfqu’on fe propofe d’en acheter au Cap , il faut s’adreffer aux Cultivateurs E N A F IL I Q U E. mêmes, afin d’être bien fervi. Les Marchands , au; contraire, font des. fripons qui •, fachant bien qu’il n’eft pas de garde, fouirent les bariques , & les chargent d’eau de vie pour le conferver le plus long-temps poffible , s’ils ne trouvent pas à s’en défaire. Le vin commun du pays paroît rarement fur les bonnes tables. Les vins.rouges de Bardeaux font la boiffon ordinaire,; & ceux importés pat les vaiffeaux Hollandois ont toujours Ja préférence fur ceux des François qui ne les apportent que dans des futailles mal - conditionnées , où ils ne fe confervent point. Le prix mitoyen de ce, vin eft d’un Florin la bouteille. Il varie fuivant les circonflances. Je l’ai quelquefois vu à; trois Florins ; quelquefois à douze fous. On n’eftime pas beaucoup la bierre qui fe braffe au Cap ; mais on fait grand cas & grande confommation de celle d’Europe. Sort prix varie entre douze & vingt-quatre fous la bouteille. En général , toute efpèce de boiffon eft d’un grand débit.’ On offre: toujours un Sopi , c’eft-à-dire un verre d’arrach ou de genièvre, ou mieux encore d’eau de vie de France , à tous ceux qui fe préfentent dans une maifon. Le génièvre eft cependant la boiffon du matin la plus en ufage. Avant de fe mettre à table , l’étiquette veut encore qu’on offre un Sopi, ou du vin blanc dans lequel on-a infufé de l’ablinthe ou de l’aloës, pour exciter l’appétit; A table,- on boit indiftinâement de la bierre ou du vin. A la fin du deffert, les dames fe lèvent & fe retirent dans une pièce voifine ou fur le perron. Alors, on apporte des pipes, du tabac & de nouvelles bouteilles pour les hommes y tandis qu’on envoie préfenter aux dames du café , du vin de Rhin oft dé MOféllë avec du fucre & de l’eau de felfe. On commence enfuite des parties de jeu, ce qui n’empêche pas les hommes de boire & de fumer-; & , s’il arrive un coup intéreffant ou piquant, c’eft toujours' le lignai ou le prétexte d’une rafade de plus; Cette manière de vivre eft commune à toutes les maifons , avec cette différence que celles qui ne font point fortunées , n’ufent que du vin du terroir. Mais, fur ce point, la vanité des Habitans


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