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pourfuivis à la courfe ; j’en fis tomber un fur la place ; cet animal eft parfaitement décrit par le Dofteur Sparmann ; les Sauvages le nomment Kana ; ce n’eft point du tout l’Elan dont Buffon a donné la defcription ;. il en diffère effentiellement ; c’eft uniquement la plus grande efpèce des Gazelles du Cap. , De retour au camp , je vis arriver tous mes chaffeuts qui s’é- toient répandus de côtés & d’autres pour gagner la prime ; ils étoient haraffés & fort raécontens ; l’un d’eux m’avertit qu’il avoit rencontré une Horde fauvage dont le Kraal étoit fitué abfolument au pied de la montagne; j.e ré ¡plus de l’aller reconnoître; mais je n'emmenai avec moi que trois bpns tireurs, & celui qui m avoit donné cet. avis le lendemain, à la pointe du jou r , nous étions à peine à moitié chemin que nous rencontrâmes cinq de ces gens qui vendent eux-mêmes à mon camp pour me voir. Ils rebrouffè- rent & me ponduiârent chez eux; les .enfans en me voyant arriver fe mirent à fuir pour fe cacher, en pouffant des cris horribles. Cet effroi général me paroiffoit hors de la Nature, & déepncertoit mes idées ; lorfque j’étois pour la première fois entré dans la Horde de Haabas & dans plufieurs autres , les femmes & les enfans à la vérité s’étoient retirés , mais n’avoient montré ni crainte ni horreur i j’étois curieux 4e connoîrre la caufe de cet effroi.; j’appris d’abord que ces gens n étoient venus que depuis très-peu de temps s’établir dans l’gndroit où ja les voyois ; qu’ils avoi,ent éprouvé dans le Camdebo , leur Patrie , mille perfécntions de la part des Colons, & qu’animés contre les Blancs d’une haine cruelle & fanguinaire, ils infpiroient cette horreur à leurs enfans , afin qu’elle s’accrût avec l’âge, & qu’ils n’étoient pas fâchés de les avoir vus dans cette rencontre réciter aufli bien le catéchifme de la vengeance. Quant aux hommes, ils fourirent à mon approche , & ne parurent point étonnés de me voir; ils étoient prévenus, dès la veille, qu’infailliblement je les irois vifiter ; leur Horde ne montoit guères qu’à cent ou. cent trente hommes; en me tendant chez eux., j ’avois rencontré leurs troupeaux ; une centaine de bêtes à cornes, & peut-être1 trois cents à laine , n’annonçoient pas une grande àifance; auffi je trouvai çes miférables occupés à faire fécher, fur des nattés , dés Sauterelles Auxquelles ils retranchoient les ailes 8t les pattes; comme l’amas de ces provifions touchoit a la plus grande fermentation , je fus contraint de prendrè le deffus du vent pour éviter les exhalaifons infeûes qui s’en échappoient par intervalles. Il n’y avoit pas fix mois que ces pauvres Hottentots s’ëtoient confinés dans cet endroit, pour échapper aux cruautés des Colons ;. ils ivenoient, fans le favoir, fe livrer à des atrocités d’un autre genre; outre les Boflifmans dangereux qui pouvoient à tous momens les découvrir, ils avoient encore à fe défendre des bêtes féropes ,& particulièrement dés Chiens Sauvages qui dévalloient leurs troupeaux! Je leur donnai quelques confeils pour leur tranquillité , & leur fis des ptéfens ; je leur propofai en outre l’échange dé quelques Moutons qu’ils me promirent dè m’amener le lendemain. Comme ;je me difpofois à prendre congé d’eux, je fus obligé d’entrer dans une de leurs Huttes, pour me mettre à l’abri d’un orage affreux qui fondit fur nous comme un trait , & qui dura trois grandes heures ; je n’en-fus pas moins inonde ; le Kraàl entier faillit td’ôtre emporté; des' huttes furent ébranlées ; les tôr- rens chàrioient dèvant nous des fables , des terres éboulées & des arbres déracinés; le lieu que-j’occupôis étoit mieux abrité; je con- templois avec extafe, quoique noyé jufqu’au genoux, les cafca* des & les colonnes .d’eau qui s’échappoietit avec fracas dix haut des montagnes: , & , is’entre-choqüant dans' leur chute , gagncrient: la terré en mille gerbes variées, & la couvroient de vapeurs & d’écume. Les bords de la rivière plate, que javois à deux pas, difpa- rurent en un moment à mes regards; je donnai le temps aux p'us gros amas de s’écouler ; inquiet pour mon camp , je profitai du premier intervalle que nous laiffa la pluie, & je partis pour m y rendre. J’avois eu beaucoup à- fouffrir dans cette hutte remplie de facs de Sauterelles déjà féchées, mais qui:n’en rendoient pas moins Une • odeur fétide, infupportable ; la pluie continua par orage; toute la nuit ; le jour fuivant les inondations groflirent , & ces Hottentots ■ ne purent joindre mon camp, 'comme ils me-Pavoieht promis. | |p asar 't «IBS» a inSgttt ?! tÎffS? Nous ne craignions plus de manquer d’eau ; cependant nous ne Z z ij


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