fi cependant elles fe marient du vivant de leurs parens, elles ne reçoivent, pour dot, que quelques pièces de bétail, en proportion de la richeffe des uns & des autres. On n'enterre: point ordinairement les morts ; ils font tranfportés hors du Kraal par la famille, & dépofés dans une folfe ouverte & commune à toute la Horde ; c’eft là que les animaux viennent fe repaître à loifir ; ce qui purge l’air que gâteroit bientôt la corruption de plufieurs cadavres entaffés. Les honneurs de la fépulture ne font dus qu’au Roi & aux Chefs de chaque Horde ; on couvre leurs corps d’un tas de pierres amaffées en forme de dôme ; c’eft de là que provient cette fuite de petites monticules qu’on voyoit autrefois rangées fur une même ligne , dans les environs du Bruyntjes-Hoogte, ancienne domination des Caffres. Je ne connois point le caraûère des Caffres , Relativement a Famour, & ne fais pas s’ils font jaloux; tout ce que je crois, c’eft qu’ils ne connoiffent cette fureur que par rapport à leurs femblables ; car ils cèdent volontiers leurs femmes, moyennant une petite rétribution, au premier Blanc qui paroît la defirer, Hans m’avoit fait plus d’une fois entendre que toutes celles que j’avois reçues dans mon camp, étoient à mon fervice, & que je pouvois choifir ; en effet, il n’étoit forte d’agaceries auxquelles elles ne fe liyraffent devant leurs hommes pour m’attirer dans leurs pièges, & ceux-ci n’étoient peut-être feandalifés que de la froideur avec laquelle je paroiffois recevoir ces careffes. Je ne poufferai pas plus loin ces détails, j’en ai dit affez pour montrer à quel point un Peuple diffère du Peuple fori voifin, quand il n’y a point d’autre communication çntr’eux que celle qu’établiffent des guerres fanglantes, & d’éternelles inimitiés. Le huitième jour , ce jour heureux qui devoit nous rapprocher du Cap, parut enfin, Je fis une revue générale de mes chariots, équipages, Boeufs, attelages , &c. ; j’avois mis en ordre mes nouvelles collections & repaffé les plus anciennes; les balles que j’avois commandées, & le plomb néceffaire à la chaffe , étoient coulés; mes Boeufs qui, depuis long-temps, fe repofoient & n’avoient pas manqué d’excellens pâturages , étoient à pleine peau & dans le meilleur meilleur état poflible ; en un mot j’étois prêt à partir ; j’accordai deux jours de plus pour prendre congé de nos bons voiûns & nous divertir avec eux. La nouvelle de ce départ définitif s’étoit répandue ; je vis bientôt arriver toute la Horde par peletons , hommes & femmes. Haabas étoit à leur tête ; tout ce qui avoit pu marcher,le fuivoit» ils accouroient pour nous faire leurs adieux & recevoir lés nôtres. Que j’étois aife qu’ils vinffent paffer ces deux derniers jours avec moi! Le bon Haabas me préfenta quatre ou cinq Gonaquois d’une autre Horde que la fienne & qui, ayant ouï parler de moi » avoient été députés pour m’engager à aller viïiter leur canton • il étoit trop tard ; mais j’adoucis mon refus , en leur promettant de me fouvenir de leur tendre Invitation, au premier voyage que j’entreprendrois dans ces contrées. Tant que durèrent ces quarante-huit heures, on fe livra, de part & d’autre , à tous les excès de la folie & du plaifir; mon eau de vie ne fut pas épargnée non plus que l’hydromel que Haabas avoit fait exprès préparer & apporter avec lui; mais la belle Narina & fa foeur, qui étoient de la partie, ne prenoient aucune part à ces orgies, tout innocentes qu’elles fuffent : la trifteffe avoit fur-tout voilé les traits de Narina ; je la confolai comme je pus, je l’accablai de préfens ; je lui en remis pour fa foeur, fa mère & tous fes amis; en un mot , je me défis, dans ce moment de prefque tous mes bijoux ; mais la parure n’étoit pas ce qui l’occupoit en ce moment Je donnai à Haabas & à tout fon monde tout ce qu’il me fut poflible de leur donner, fans me faire de tort à moi-même & me priver de toutes reffources pour mon retour ; le tabac fut fur-tout réparti entre ces braves gens jufqu’a profufion ; je n’en gardai que pour les miens & le temps du retour. Enfuite je pris à part le vénérable Haabas & le preffai avec tendreffe, même avec émotion, de fuivre les cortfeils que je lui avois donnés pour fon falut & celui de toute fa Horde ; je m’efforçai de lui perfuader que la tranquillité apparente des Colons Tome. I I . x x toujours affemblés dans le même endroit couvoit quelque nouveau
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