il fuit néceffairement que les Caffres qui, d'ailleurs s’entendent à la culture, font aufli Nomades; & c’eft ce qui arrive quand on ne va point troubler leur repos; le terrein qui les a vu naître les voit mourir, à moins qu’ils ne foient affaillis, je ne dis pas feulement par de harbares perfécuteurs avides de leur fang , mais par quelques-uns de ces fléaux défini ¿leurs qui n’épargnent pas plus les hommes que les animaux , & qui, dans un* moment, couvrent de deuil d’immenfes. pays. Un logement agréable & folide, placé près d’un ruiffeau, au milieu du champ défriché qu’on a reçu de fes pères, n’en efl-ce pas affez pour enrichir l’idiome Cadre du doux nom de Patrie que ne connoîtra jamais l’errante infouclance du Hottentot. J’ai cependant fait une remarque qui, pour être étrange , n’en eft pas moins certaine & générale ; malgré les forêts & les bois fuperbes qui couvrent la Caffrerie , malgré ces pâturages magnifiques qui s’élèvent de façon à dérober aux yeux les troupeaux épars dans les champs, malgré les rivières , les ruiffeaux qui fe croifent en mille fens divers pour, les rendre féconds & rians, les Boeufs , les Vaches & prefque tous les animaux y font plus petits que- ceux des Hottentots ; cette différence provient affurément de la nature de 1a féve, & d’un goût fur qui prédomine dans toutes les efpèces d’herbages ; j’ai fait cette obfervation non - feulement fur les animaux domeftiques des cantons qui me font connus, mais aufli fur tous ceux qui font Sauvages, & je les ai trouvés réellement plus petits que ceux que j’avois précédemment vus dans des Pays fecs & arides ; j’ai remarqué , dans mon Voyage chez les Namaquois qui n’habitent que des rochers & la terre la plus ingrate peut-être de l’Afrique entière , qu’ils avoient les plus, beaux Boeufs que j’euffe rencontrés , & qu’il n’efl pas jufqu’aux Eléphans & Hippopotames, qui ne fufïent plus forts que par-tout ailleurs. Audi le peu de pâturage-, qui fe trouve dans ces leu x maudits , efl: - il fort doux & fort fuàve ; cette qualité des plantes fe difl-ingue aifément ; j’avois, pour cela, un moyen infaillible , lorfque j.’arrivois dans un canton nouveau ;, quand mon troupeau, revenoit de la pâture, je jugeois de l’âpreté des herbes» pur l’empreffemênt avec lequel il fe répandoit dans mon camp pour y chercher, de tous côtés, les os que mes chiens avoient abandonnés: ils foulageoient leurs dents , .vivement agacées , en rongeant ces os qui, par leur nature calcaire, devoient en effet émouffer & éteindre l’agacement & l’acidité qui les tourmentoient ; jamais nous ne jettions les os dans le feu; Iorfqué nous en manquions , du bois fec ou même des pierres -y fuppléoient ; & même à défaut de tout cela, ils fe rongoient mutuellement les cornes ; quand les pâturages étoient excellens , cette cérémonie n’avoit jamais lieu. Une induftrie mieux caraétérifée , quelques arts de néceflité première, il efl vrai, un peu de culture, quelques dogmes religieux annoncent, dans le Caffre , une Nation plus civilifée que celles du côté du Sud ; la circonciiion qu’ils pratiquent généralement prou- veroit affez ou qu’ils doivent leur origine à d’anciens Peuples dont ils ont dégénéré, ou qu’ils l’ont Amplement imitée de voifins dont ils ne fe fouviennent plus ; car, lorfqu’on leur parle de cette cérémonie, ce n’eft, félon eux , ni par religion, ni par aucune autre caufe myftiqne qu’ils la pratiquent ; ils ont pourtant une très-haute idée de l’Auteur des êtres & de fa puiffance ; ils croyent à une autre vie, à la punition des méchans, à la récompenfe dis bons ; mais ils n’ont point d’idée de la création; ils penfent que le monde a toujours exifté , qu’il fera toujours ce qu’il efl ; ils ne fe livrent, du refte, à aucune pratique religieufe, ne prient jamais, en forte qu’on poujroit très-bien dire qu’ils n’ont pas de religion , s’il n’y a point de religion fans culte; ils font eux-mêmes les Inftituteurs de leurs enfans , & n’ont point de Prêtres. En revanche,ils ont des forciers que la plus grande partie révère & craint beaucoup; je n’ai jamais joui de la fatisfaâion d’en joindre un feul ; je doute fort, malgré tout leur crédit, qu’ils en impofent, autant que Içs nôtres, à la multitude. Les Caffres fe laiffent gouverner par un Chef général, ou , fi Ion veut, une efpèce de Roi ; fon pouvoir, comme j’ai eu occafion de l’obferver, efl très-borné ; ne recevant point de fubfides ; il ne peut avoir aucunes troupes à fa folde ; il efl loin du Defpo
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