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nattes, à cinquante pas plus loin. Notre fommeil ne fur point interrompu ; le lendemain , Hans fe détacha avec deux de mes Hottentots bien armés pour aller en avant ; je leur donnai rendez- vous à deux lieues plus loin,. c’eft-à-dire à une lieue de ce Kraal, & , leur dis de venir auffi-tôt m’y rendre compte de ce qu’ils auroient vu. Ils fuient de retour à deux heures , & m’apprirent, avec un étonnement mêlé de douleur , quils lavoient effectivement trouvé en fort bon état ; mais qu’il étoit i comme les autres, abfolument déferté; alors je continuai ma route jufques- là , & nous prîmes poffeffion de ce nouvel Empire. 11 étoit ample & vafte ; nous trouvâmes plus de cent Huttes très - anciennes , 8c folidement conftruites y elles étoient efpacees a la manière ordinaire y il étoit probable que les habitans avoient pris l’alarme malà propos; nous n’aperçûmes aucun débris 8c pas un feul cadavre. Ils avoient oublié dans une de ces Huttes , deux fagayes dont le fer étoit rouillé, 8c, dans un autre, un petit tablier de femme des outils de bois pour le labourage, «8c quelques bagatelles de peu de eonféquence L je m’emparai de ces divers objets. Les petits champs de bled n’offtoient point ,.comme dans le premier Kraal ou nous nous étions arrêtés , l’image de la défolation 8c du malheur ; il paroiffoit au contraire que la récolte en avoit été paifi- blement enlevée ; nous décidâmes que nous nous arrêterions la. pendant deux ou trois jours , afin de diftribuer au loin quelques, patrouilles, 8c de voir fi dans les environs nous ne découvririons- point quelques Caffres. Je favois fort bien qu’en tirant direûement. au nord , je tombois dans le centre de la Caffrerie; c eft ce que je: voulois éviter fans ceffe , préférant de gagner peu à peu par de- long circuits, 8c, de ne me hafarder qu’en proportion des dangers, que j’apercevrois , ainfi que des connoiffances que je ferois durant la route. ( ■ Toutes nos recherches 8c toutes nos rufes n aboutirent a rien.. nul Caffre ne fe préfenta. Je ne diffimulerai point que d’après mes préjugés perfonnels. 8c Tes. défcriptions faftueufes de la magnificence 8c du luxe des. Defpotes Afiatiques, j’avois penfé que j’en retrouverais au moins, l’efqulffe dans les Etats d’un' Roi des Caffres ; c’étoit ce qui m’avoit fuggéré le plus vif défit de voir Pharoo » mais ma curiofité n’avoit plus le même aliment, depuis que les derniers, hôtes que j avois reçus dans mon camp 8c qui demeuroient ordinairement près de lu i, m’avoient appris que cet homme, fans aucune fuite particulière , habitoit, comme le dernier de fes Sujets , une Hutte qui n’étoit ni plus grande ni mieux ornée que les autres; qu’il pouvoit, tout comme eux, devenir très-pauvre , fi la mortalité s introdui- foit parmi fes troupeaux ; que fes Sujets ne lui devoient ni fub- fides ni impôts ; qu’il n’avoit nul droit d attenter a leur propriété j qu’en un mot ce n’étoit qu’un fimple Chef comme chez les Hottentots; que la feule différence remarquable entre ce Chef 8c les autres, étoit qu’il commande à une Nation plus nombreufe , 8c que fa place eft héréditaire ; mais que privé d’ailleurs de toute autre décoration extérieure 8c de tout apareil de royauté, il ne jouit que d’un pouvoir très-limité. D’après ces détails, mon imagination avoit beaucoup rabattu des idées brillantes qu’elle s’étoit faites du Roi; ne pouvant rien gagner à le voir ; 8c, défefpérant de le rencontrer , tous mes voeux ne fe tournèrent plus que vers le vaiffeau naufragé c fur le rapport de mes Caffres je n’avois pas plus d’efpoir de me fatisfaire; cependant je tournois mes pas vers la cote, toujours bercé de 1 idée chimérique que j’en obtiendrois des nouvelles plus certaines. Nous ne trouvâmes par-tout que des Huttes défertes >• nul Habitant , nulles traces d’humains ne s’offrirent à nos regards ; en revanche, le Buffle, la Gazelle 8c généralement toutes les efpèces de gibier abondoient dans tous les lieux que nous parcourions; ce qui prouve, mieux que de vains raifonnemens, que le Caffre n’eft point autant Chaffeur que le Hottentot ; qu’il vit moins que lui d’efpérance, 8c qu’il compte plus fur fon blé 8c fur, fon troupeau, que fur les reffources de.l’adreffe 8c de fon habileté à manier la fagaye 8c la maffué. Plufieurs Eléphans que nous aperçûmes , ne nous donnèrent pas le temps de les joindre pour les tirer. Depuis mon départ de Koks-Kraal, j’avois déjà fait, enoifeaùx, une colleûion fi confidérable que je ne favois plus ou la placer; S s ij


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