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l’employent auffi aux fritures ; amalgamée avec d’autres fubftances graiffeufes, elle fe durcit comme le beurre ,■ & le remplace , fur-tout dans les Cantons de la Colonie trop arides pour qu’on y puiffe élever des Vaches; auffi, dans les Pays gras, la nomme-t-on par plaifanterie & par dérilion le beurre de tel endroit, au Cap par exemple , beurre de Swan-Land, Canton fec où le laitage eft très-rare. Il n’y a que. les Chèvres auxquelles les terreins arides & brûlés conviennent; elles y font toujours d’une très-belle efpèce ; leur taille varie fuivant les divers Cantons; mais par-tout elles font généralement bonnes, & donnent tout autant de lait que les Vaches. Elles mettent bas deux fois par an, comme les Brebis; celles- ci font prefque toujours deux petits à la fois & les Chèvres trois , affez fouvent quatre. Les Hottentots ne connoiffent point le Cochon ; les Colons Européens même dédaignent de l’élever ; j’en ai vu cependant dans quelques Cantons particuliers ; on les laiffe multiplier & vivre en liberté ; pour les prendre, il faut tes pourfuivre & les tirer à coups de fufil. On n’eftime point la volaille chez les Hottentots ; ils ne pourvoient pas même en élever, quand ils le voudraient, puifque , ne femant rien , ils ne recueillent aucune efpèce de graine. Les racines dont ils font plus particulièrement ufage , fe rédui- fent à un très-petit nombre ; jamais il ne les font cuire ; il les trouvent bonnes mangées crues , & l’épreuve m’a convaincu qu’ils n’ont pas tort. Celle à laquelle je donnois la préférence , connue fous le nom Hottentot Kamero, eft de la forme d’un radix , groffe comme un melon , & d’une faveur agréable & douce, merveilleufe fur-tout pour étancher la foif; quelle admirable précaution de la Nature dans un Pays brûlant, où l’on périroit à chaque pas,' & qui n’offre point dans de certaines faifons, une feule fource où l’on puiffe efpérer de fe défaltérer ! Quoiqu’affez commune, cette racine ne fe trouve pas facilement, parce que, dans le temps de fa maturité parfaite, fes feuilles flétries & fanées fe détachent, & que, pour fe la procurer , il faut prefque l’avoir remarquée d’avance. Mais , avec un peu d’habitude du Pays , on apprend à connoître les places où elle croit de préférence. - Lorfque brûlé par la chaleur & les fatigues du jour , la bouche & le gofier défféchés , couvert de fueur, de pouffière , haletant, privé d’ombre & n’en pouvant plus, je foupirois après la plus infede des mares, & bornois là tous mes voeux ; lorfque mes vaines recherches & l’opiniatre aridité du fol m avoient enfin ote toute efpérance, combien je me félicitois alors dune précaution que plus .d'un élégant Midas, fur des récits publiés fans mon aveu, a tournée en ridicule, auffi bien que mon C o q , parce qu’entrau- tres balourdifes , par exemple, trouvant toujours de l’eau à la Seine , il conçoit difficilement pourquoi cette rivière ne s’étend pas jufqu’aux déferts d’Afrique , & borne fon cours à une mince portion d’une très-mince partie de la terre, & comment peut-on jamais périr de foif & de faim, quand les marchés de la Capitale font garnis de toutes parts , & regorgent de mille provifions différentes? Combien, dis-je, je me fécilitois de.pofféder dans mes animaux domeftiques les plus inutiles en apparence, d’auffi bons furveillans, & des amis fi néceffaires à ma confervation ! Dans ces momens de crife mon fidèle Keès ne quittoit point mes pas ; nous nous écartions un moment de nos voitures ; l’adreffe de fon inf- tinâ: l’àvoit bientôt conduit à quelqu’une de ces plantes; la touffe qui n’exiftoit plus , rendoit fes cabrioles inutiles ; alors fes mains labouraient la terre ; l’attente eût mal répondu à fon impatiente avidité ; mais, avec mon poignard ou mon couteau, je venois à fon fecours, & nous partagions loyalement le fruit précieux qu’il m’avoit découvert. Deux autres racines de la groffeur du doigt, mais fort longues, me procuraient un égal foulagement. Elles étoient douces & tendres , un léger parfum de Fenouil & d’Anis me les faifoit même préférer, lorfque j’avois le bonheur d’en découvrir; on en trouve dans les Colonies ; elles y font connues, l’une fous le nom à'Anys- Wortel, l’autre fous celui de Vinkel-Wortd. Il croit dans les cantons pierreux, une efpèce de pomme de


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