partie des chairs voifines de la plaie qu’on regarde comme dân- gereufe ; mais le refte ne fe reffent en aucune manière des atteintes du poifon ; j’ai fouvent mangé de ces viandes fans avoir éprouvé la plus légère incommodité ; mais j’avoue que je n’aurois pas voulu courir les mêmes rifques à l’égard des animaux chez qui le poifon auroit féjourné quelque temps. A la première infpedion de leurs flèches, on ne foupçonneroit pas à quel point elles font meurtrières ; elles n’ont ni la portée ni la longueur de celles dont les Caraïbes font ufage en Amérique; mais leur petiteffe même les rend d’autant plus dangereufes, qu’il eft impoffible à l’oeil de les apercevoir & de les fuivre , & par conféquent de les éviter ; la moindre bleffure qu’elles font eft toujours mortelle, fi le poifon touche le fang & la chair déchirée; le remède le plus fûr eft la prompte amputation de la partie bleffée, fi, c’eft quelque membre ; . mais, fi la plaie eft dans le corps, il faut périr. Ces flèches font faites de rofeaux, & très-artiftement travaillées; elles n’ont guères que dix-huit pouces ou tout au plus deux pieds de longueur, aulieu que celles des Caraïbes portent fix pieds. On arrondit un petit os de trois à quatre pouces de long, & d’un diamètre moindre que celui dn rofeau; on l’implante dans ce rofeau par l’un des bouts, mais fans le fixer; de cette manière, lorfque la flèche a pénétré dans un corps, on peut bien erç retirer la baguette; mais le petit os ne vient point avec elle; il refte caché dans la plaie d’autant plus fûrement qu’il eft encore armé d’un petit .crochet de fer placé fur fon côté , de façon que, par fa réfiftance & les nouvelles déchirures qu’il fait dans l’intérieur, il rend inutile tous les moyens que l’Art voudroit imaginer pour le faire fortir ; c’eft ce même os qu’on enduit d’un poifon qui a la fermeté du maftic & à la pointe duquel on ajoute fouvent encore un petit fer triangulaire & bien acéré , qui rend l’arme encore plus terrible. Chaque Peuplade a fa méthode pour compofer fes poifon? , fuivant les diverfes plantés laiteufes qui croiffent à fa portée ; on les exprime du fuc de ces plantes dangereufes. Certaines efpèces E N A F R I Q U E . de Serpens en fourniffent aufli ; &pour l’aûivité j ce font celles que les Sauvages recherchent & préfèrent fur-tout dans leurs expéditions & leurs combats. 11 n’eft guères poffible de leur arracher des éclairciffemens certains fur la préparation du venin extrait des Serpens ; c’eft un fecret qu’ils fe réfervent obftinément ; tout ce qu’on peut affurer , c’eft que l’effet en eft très-prompt , &- je n’ai pas manqué d’occafions d’en faire 1 experience ; j inclinerois pourtant à croire qti’en vieilliffant, ce poifon perd beaucoup de fa force, malgré l’épreuve qui en a été faite au jardin du Ro i, & dont on garantit le fuccès ; mais tous ces poifons , comme je le dis , ne fe reffemblent point ; celui qu’avoit rapporté M. de la Condamine à fon retour du Pérou, ne fait pas loi pour 1 Afrique. Au refte, c’eft une expérience qu’il feroit facile de répéter publiquement fous les yeux de plufieurs Savans , puifque je poffede dans mon cabinet, enrr’autres armes, un carquois garni de fes flèches que j’ai eu le bonheur d enlever a un Hottentot Boffis, dans une a&ion oit je n’ai fauvé mes jours quaux dépens des fiens ; je raconterai cette Hiftoire en fon temps. Les arcs font proportionnés aux flèches , & n’ont que deux pieds & demi, ou tout au plus trois de hauteur ; la corde en eft faite avec des boyaux. La fagaye eft ordinairement une arme bien foible dans la main du Hottentot ; mais, en outre, fa longueur la rend peu dangereufe ; comme on la voit fendre l’air, il eft aifé de l’éviter. D’ailleurs au-delà de quarante pas, celui qui la lance n’eft plus sur de fon coup, quoiqu’on puiffe l ’envoyer beaucoup plus loin ; c’eft dans la mêlée feulement quelle peut être de quelqu’utilité ; elle a la forme d’une lance comme la fagaye de tous les Pays; mais deftinée à être jetée à l’ennemi ou au gibier, le bois de celle d'Afrique eft plus léger, plus foible & va toujours en diminuant d’épaiffeur .jufqu’à l’extrémité oppofée au fer. L’ufage de cette arme eft mal-entendu ; car le guerrier qui s’en fert avec le plus d’adreffe , eft aufli le plus tôt défarmé. Les Go- naquois, & tous les autres Hottentots, n’en portent jamais qu’une, & l’embarras qu’en général elle leur caufe, ainfi que le mauvais
27f 81
To see the actual publication please follow the link above