les parens n’ayant point de raifons de s’oppofer aux fentimens de prédileûions qui entraînent un enfant vers un objet plutôt que vers un autre, tous les mariages affortis par une inclination réciproque , ont toujours une iffue heureufe ; & , comme pour fe fou* tenir, ils n’ont d’autre loi que l’amour , ils n’ont pour fe rompre d’autre motif que l'indifférence. Mais ces unions formées par la limple Nature font plus durables qu’on ne penfe chez ces pafteurs, & leur amour pour leurs enfans rend deux époux, de jour en jour , plus néceffaires l’un à l’autre. La formalité de ces mariages fe réduifant donc à une promeffe, pure & fimple, de vivre enfemble tant qu’on fe conviendra , l’engagement pris , deux jeunes-gens font tout à coup mari & femme; & certainement cette alliance ne fe folennife point par ces afper- fions ridicules & mauffades dont j’ai parlé ; on tue des Moutons, quelquefois un Boeuf pour célébrer une petite fête; les parens donnent quelques beftiaux aux jeunes-gens; ceux-ci fe conftruifent un logement ; ils en prennent poffeffion, le jour même , pour y vivre enfemble, autant de temps que l’amour entretiendra chez eux la bonne intelligence ; car, s’il furvient, comme je viens de le dire, quelque différend dans le ménage qui ne puiffe s’appaifer que par la féparation , elle eft bientôt prononcée ; on fe quitte, & chacun de fon côté cherchant fortune ailleurs, eft libre de fe remarier. L’ordre exige que lès effets de la communauté foit partagés amiablement. Mais , s’il arrive que le mari, en fa qualité de maître, prétende retenir le tout , la femme ne manque pas pour eela de défenfeurs & d’appui : fa famille prend fait & caufe pour elle ; les amis s’en mêlent, quelquefois toute la Horde. Alors grande rumeur ; on en vient aux mains, & les plus forts font la loi. La mère garde avec elle les petits enfans, fur-tout fi ce font des filles ; les garçons, s’ils font grands , fuivent le père, & font prefque toujours de fon parti. Ces malheurs, il faut l’attefter, font affez rares ; mais ce qui n’eft pas moins digne de remarque , c’eft que, dans ces cas ainfi que dans toutes leurs autres querelles, il n’y a aucune loi prévue, aucune coutume établie pour y mettre ordre; il faut regarder comme comme des futilités , ce qu’a dit Kolbe de leur cours de juftice de leur manière de procéder dans les affaires civiles, du Confeil fupérieur de la Nation , des priions, des affemblées publiques, en un mot de toutes ces inftitutions qui ne conviennent nullement au. nom Sauvage, puifqu’un peuple ainfi gouverné ne differeroit de nous que par fa couleur & fon climat. Je n’ai jamais vu, je n’ai point appris qu’une querelle ait fini par un meurtre ; mais , fi ce malheur afrivoit & que le mort fût regretté, la famille très-modérée dans fa vengeance , fe contenteroit dé là loi du Talion; poiir un crime aufli grave, toute la Horde pourfui- vroit r-affaiîîn & le forceroit de s’expatrier, s’il échappait à là mort. La polygamie ne répugne point aux Hottentots ; mais il s’en faut de beaucoup quelle foit généralement établie chez eux ; ils prennent autant de femmes qu’ils veulent, c’eft-à-diré en proportion de leur tempérament; ce qui réduit ordinairement ce befoin à une feule. Mais on ne voit pas une femme vivre en même témps avec deux hommes, & la fage Nature qui voulut qu’un père-pût avouer-fon fils; imprima dans le coeur d’une Gonaquoife , une invincible horreur de cette infâme proftitution ; elle révolte ces peuplés au point qu’un mari qui auroit connoiffarice de la plus légèré infidélité , pourroit tuer fa femme fans courir le rifque d’être inquiété pour cela. ' On fent bien que cette remarque fouffre quelquès exceptions à & l’on fe rappelle avec quelle familiarité les premiers Hotfëritots libres que je rencontrai, vinrent fe mêler parmi les miens-; mats plus voifins de la Colonie, l’exemple eft pour eux un fédufteur bien engageant ; j’avoue même qu’il feroit rare de voir chez ces demi-Sauvages le noeud conjugal réfifter aux follicitatiôns & aux cajoleries d’un Européen; la Hottentote honorée par fa défaite avec un Blanc, ne voit plus fon mari qu’avec une forte de hauteur & le quitte avec mépris ; celui-ci de fon côté fé confolé bientôt & fe laiffe aifément appaifer par de légers préfens ; mais cette reffource même eft inutile ; & , Comme je. l'ai déjà obfervé, Tome II, F £
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