ces Nations ; mais il prend fa fource, le croiroit-on, dans l’amour le plus tendre. C’eft la crainte de ne pouvoir nourrir fes jumeaux, & de les voir périr tous deux, qui a porté quelques mères à en facrifier un ; au refte , les Gonaquois font exempts de ce reproche, & je les ai vus s’indigner de ma queftion. Mais de quel droit oferoit-on faire un crime à ces Sauvages de cette précaution dont j’ai donné du moins un motif plauiible, lorfqu’au fein des Pays les plus éclairés, on voit chaque jour , malgré les hofpices ouverts parla bienfaifance , des mères affez dénaturées pour expofer elles- mêmes & abandonner dans les rues le fruit innocent de leurs entrailles ? C’eft donc calomnier ces peuples que de donner comme une pratique confiante quelques actions barbares qu’ils défavouent & démentent ii bien par leur conduite : j’ai rencontré dans plus d’une. Horde, des mères qui nourriffoient leurs jumeaux & ne m’en pa- roiffoient pas plus embaraffées. Des Voyageurs cependant n’ont pas craint d’attefter l’ufage de' cette barbarie ; c’eft avec auffi peu de vérité que M. Sparmann lui-même s’exprime ainfi dans fon Voyage au Cap, pag. 73 du Tome I I , touchant le fort des enfans à la mamelle qui perdent leur mère. «Une autre coutume non moins horrible qui n’a jufqu’à » préfent été remarquée par perfonne , mais dont l’exiftence chez » les Hottentots m’a été pleinement c e r t i f i é e ; c’eft en cas » de mort de la mère , d’enterrer vivant avec elle fon enfant à » la mamelle ; cette année même, dans l’endroit où j’étois alors, a le fait qu’on va lire étoit arrivé.— Une Hottentote étoit morte » à cette ferme d’une fièvre épidémique. Les autres Hottentots » qui croyoient n’être pas à portée d’élever l ’enfant femelle qu’elle » avoit laiffé ou qui ne vouloient pas s’en charger, l’avoient déjà » enveloppé vivant dans une peau de mouton pour l’enterrer avec » fa défunte mère ; quelques fermiers du voifinage les empêchè- i> rent d’accomplir leur deffein ; mais l’enfant mourut dans des » convulfions; mon hôteffe qui cofflmençoii à n’être plus jeune, » me dit qu’elle-même, il y avoit feize ou dix - fept ans, avoit » trouvé dans le quartier de Swellendam, un enfant Hottentot », empaqueté dans des peaux, attaché fortement à un arbre, près „ de l’endroit où fa mère avoit été récemment enterrée ; il reftoit » encore affez de vie à cet enfant pour le fauver ; il fut éleyé » par les-parens de Madame Kock; mais il mourut à l’âge de huit »> à neuf ans. Il réfulte de ces exemples & de plufieurs autres •» traits que je t ie n s d e s C o l o n s , &c. » ^ | Il faut d’abord conclure des paroles de ce Botanifte, quil n avoit rien vu de ce qu’il r a p p o r t e , puifqu’il déclare ici comme par tout fon ouvrage, qu’il tient ces détails des Colons..Il les a trop fréquentés pour ignorer jufqu’où l’on doit compter fur leur mémoire ou leur efprit ; c’en étoit affez pour nous épargner beaucoup de fables , qu’il étoit au contraire important de renverfer. Ce n eft pas fur des ouï-dire qu’on juge les peuples, & que l’on compare. Dans le récit le plus véridique , que de nuances même vous echa- pent, qui porterOient la lumière fur des faits toujours mal interprétés , quand on n’eri a pas été le témoin oculaire. Ne fuffifoit-il pas que la première mère dont il parle fût morte ; comme il le dit, d’une maladie épidémique, pour que les Hottentots alarmés s'éloignaient du cadavre & de l’enfant, dans la crainte d’une contagion , motifs & préjugés affez forts chez eux pour les porter à tout abandonner à l’inftant, jufqu aux troupeaux , leur feule richeffe. A l’égard du fécond enfant trouvé dans le Canton de Swellendam, les circonftances pouvoient être encore les mêmes; &, jufqu a ce qu’on m’ait fait voir les caufes raifonnées de cette barbarie, j’en purgerai l’hiftoire du peuple le plus doux & le plus fenfible que je connoiffe. Au refte, il y a long-temps que tout ces contes ridicules fur ces pauvres Sauvages, feroient oubliés avec les hiftoires des forciers & des revenans , s’il n’y avoit des vieilles pour les redire , & des enfans pour les entendre. Il femble qu’on ait pris à tâche de vilipender & de décrier la Nation Sauvage de tout le globe connu la plus tranquille & la plus patiente, tandis que , pénétrés d’eftime 8c de refpeft pour les peuples les plus orientaux , les Chinois, par exemple , on gliffé légèrement fur l’ufage confiant où font les mères à Péquin, d’expofer pendant la nuit au milieu des rues les enfans dont elles
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