& leurs ufages les appellent. Je n’ai entendu parler que de certains jours de fête qui reviennent affez rarement. Séparées de l’Europe par l’immenfité des mers, & des Colonies Hollandoifes par des déferts, des montagnes & des rochers impraticables, trop de communication d’un, peuple à l’autre, ne les a point encore conduits à ces excès de notre dépravation ; loin de cela, dès qu’elles jouiffent du bonheur d’être mères , la Nature leur parle un autre langage ; elles prennent plus qu’en aucun autre Pays, l’efprit de leur état, & fe livrent fans réferve aux foins impérieux qu'il exige. Auffitôt qu’il eft né , l’enfant ne quitte point le dos de fa mère ; elle y fixe ce cher fardeau avec un tablier qui le preffe contre elle; un autre attaché avec des courroies fous le derrière de l’enfant, le foutient & l’empêche de gliffer ; ce fécond tablier formé, comme l’autre, de peau de bête, reffemble affez à nos carnaffières de chaffes ; on l’orne ordinairement avec des raffades , & voilà tout ce qui compofe la layette du nouveau-né. Soit que la mère aille à l’ouvrage , foit qu elle fe rende an bal, & même qu’elle y danfe, elle ne fe débarraffe point de fon enfant : ce marmot, dont on n’aperçoit que la tete, ne pleure jamais, ne pouffe aucun vagiffement, fi ce n’eft lorfqnil éprouve le befoin de teter ; la mère alors le fait tourner & l’attire de côté, fans qu’il foit néceffaire qu’elle le démaillote ; mais lorfqu elle eft avancée * en âge , ou qu’elle a eu plufieurs enfans , fans déplacer celui qu’elle porte, elle lui paffe la mamelle par-deffous le bras ou la lui donne par-deffus l’épaule ; l’enfant fatisfait ceffe alors de pleurer, & la nourrice continue fa danfe. Lorfqu’enfin on juge qu’il eft en état de s’aider & de s évertuer lui-même , on le pofe à terre devant la hutte ; à force de ramper, il fe dévelope & , de jour en jour, il seffaye a fe tenir debout; une première tentative en amène une fécondé ; il s’enhardit, & bientôt il eft affez fort pour courir & fuivre fon père ou fa mère. Cette méthode fi fimple , fi naturelle vaut bien, à ce que je crois, celles de nos bretelles meurtrières ; elles écrafent & rétré- ciffent la poitrine ; la difproportion entre la force des jambes & la pefanteur du corps qui contraint nos enfans à pefer fur ces bretelles t r o p .officieufes , finit fouvent par les eftropier, altère leur fanté & les défigure pour le refte de leurs jours. Jamais , foit en Amérique , foit en Afrique, je n’ai rencontré de boiteux ou de boffus parmi les Sauvages. C’eft en Europe qu’il faut voyager poür en voir. Ce qui contribue encore à donner aux enfans des Sauvages cette foupleffe & cette force qui les diftinguent , c’eft le foin que prennent les mères de les frotter avec de la graiffe de Mouton. Les hommes faits ont befoin eux-mêmes d’ufer de cette précaution , qui rend à la peau la flexibilité que lui ôteroient l’impé- tuofité des vents & les ardeurs du Soleil. Moins favorifé par les produirions des climats Africains, que les Caraïbes par ceux d’Amérique , le Hottentot n’a pas, comme ces derniers , le Rocou , qui lui rend un fervice continuel. Tout le monde fait que cet arbre donne une efpèce de fruit ou de. filique qui s’ouvre en deux parties, & laiffe échapper une foixan- taine de graines, dont la pellicule eft graiffeufe & rougeâtre.’ L’Indien qui va toujours nud, ne manque jamais de s’en frotter tous les matins, depuis les pieds jufqu’à la tête; il fe préferve, au moyen de cette onirion, des atteintes du Soleil, & de la piqûre des Moufquittes, & intercepte la tranfpiration trop abondante entre les tropiques. Lorfqu’une Hottentote touche au moment d’accoucher , c’eft une vieille femme de la Horde qui vient lui prêter un miniftère officieux ; ces couches font toujours heureufes ; on ne connoît point chez des Sauvages l’opération Céfarienne & de la Symphyfe; on ne confulte point, on n’agite jamais la queftion de favoir s’il faut fauver l’enfant aux dépens des jours de la mère ; & f i , par un exemple extrêmement rare, on ne pouvoit accorder la vie qu’à l’un des deux, certes d’horribles diftinâions n’ordonneroient point l’affaflinat d’une mère, & l’enfant ne feroit pas épargné. Je me fuis informé des Hottentots mêmes, s’il étoit vrai qu’une mère qui accouche de deux enfans à la fois, en fit périr un fur le champ ; d’abord ce crime contre Nature eû fort rare, & révolte E e ij
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