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place dans ce même lieu l ’île Aphrodisias (i). Cette île est sans doute la même que celle nommée par Hérodote (2), et peut-être aussi que les deux îles du même nom d’Etienne de Byzance (3) ; ajoutons encore que la Lcea de Ptolémée (4). Des circonstances m’ont empêché de visiter cette partie de la côte, et je n’ai pu reconnaître l’île mentionnée par l’antiquité. Toutefois il resuite des traditions citées qu’un temple de Vénus existait dans ce canton. Les ruines imposantes de Tammer se trouvent vis-à-vis de la situation présumée de l’île ou du port Aphrodisias ,* et quoique ces ruines soient sur le sommet des montagnes, je ne pus révoquer en doute qu’elles ne fussent celles du temple de Vénus. Cette situation d’un édifice appartenant aux premiers âges de la Pentapole, correspond d’ailleurs au système alors adopté par les Cyrénéens, de même qu’elle s’accorde avec celle d’un temple élevé en l’honneur de la déesse de la beauté. Aurait-on placé le sanctuaire' des Grâces dans une plage stérile, ou dans une île hérissée de rochers (5) ; tandis que les collines voisines offraient des tapis (1) Ed. Gronov. p. 108. Grokovius (ibid.) interprète ce passage de Scylax différemment deVossius et d’Hudson; il pense qu’il faut ponctuer la phrase grecque dé manière â lire: De la Chersonèse à l’île Aphrodisias stades cinq cent quarante. Cette opinion est d’autant plus vraisemblable, qu’en comptant les stades à sept cents au degré, cette distance de cinq cent quarante stades fait coïncider exactement la position de l’île Aphrodisias de Scylax avec la station du même nom du stadiasme. $ 1'.. iv, 169. (3) Mot Aphrodisias. Ptolémée place l’île de Vénus, Læa, sous la longitude d’Apol- lonie. Étierne de Byzance indique une île Aphrodisias auprès de Cyrène : c’est sans doute celle de Ptolémée ; et une seconde dans une autre partie du littoral de la Libye : elle me paraît être celle de Scylax. Cet auteur est le seul qui fasse mention de deux îles de Vénus dans la Cyrénaïque; d’après d’autres répétitions analogues à celle-ci que l’on trouve dans sa compilation, on est porté à croire que ces deux îles sont probablement la même. (4) I.. IV, c. 4. M En vain on me répondra que Plaute, dans le Rudens, place un temple de Vénus sur la plage aride, du port de Cyrène ; je prouverai plus tard que la fidélité locale a été généralement violée dans cette comédie. En admettant d’ailleurs l’existence de ce temple auprès d’Apollonie, elle serait motivée par le voisinage d’une grande ville. On peut donner la même raison pour le temple de Vénus placé par Strabon au milieu du lac Tri- tonis, voisin, selon lui, de Bérénice. de verdure, des bocages riants et de limpides ruisseaux ? Que cette idée serait contraire au goût des convenances locales porté à un si haut point par les Grecs! Que la mienne, au contraire, lui devient favorable! Du monticule de Tammer, on voit à ses pieds des bosquets touffus, et la vue s’étend au loin sur la vaste plaine de la mer. Ainsi, le temple de Vénus pouvait offrir aux jeunes amants un asile pour leurs feux dans les secrets ombrages, et l’image de leur durée dans l’infini de l’horizon. A peu de distance vers l’e s t, on trouve même encore dans uu site agréable des myrtes d’üne grande hauteur, et dont le tronc, crevassé par le temps, est néanmoins orné d’un vert feuillage. Ces beaux arbres ont vu sans doute plusieurs siècles s’écouler; peut-être sont-ils du même âge que le temple, mais que leurs destins et leurs symboles sont changés ! Le temple est écroulé ; il n’offre plus que des pierres éparses, ses antiques emblèmes ont disparu; tandis que le tronc crevassé des myrtes est encore orné des grâces de la jeunesse : c’est toujours l’arbre de la beauté ; il a même embelli en vieillissant. D’autres témoignages ajoutent encore à la vraisemblance de mon rapprochement; ils prouvent du moins que ce canton fut un des plus florissants de la Pentapole : en s’avançant dans les terres, sur un espace de deux heures, chaque élévation est creusée en tombeaux, de même que le sol est partout couvert de ruines de bourgs et de villages. A sràk, Tadenet et Koubbèh paraissent de loin des collines percées circulairement, ou des rubans de roche tachetés de- points noirs. Kaffram, Zatrali et Kraât hérissent encore la plaine des pierres angulaires de leurs édifices, et contiennent chacun un petit château. Mais au point le plus reculé de cette distance est un monument qui mérite d’attirer notre attention. Huit pilastres à chapiteaux unis forment une galerie couverte de longs blocs monolithes adossés contre la colline. Cette disposition ne justifie point le nom de Koubbèh, coupole, que lui donnent les Arabes ; remarquons cèpendant qu’elle a quelque chose d’égyptien. Dans l’intérieur de la galerie est une petite ouverture pratiquée dans le rocher, au niveau du sol ; un escalier aide à y pénétrer : dès que les yeux sont plus familiarisés avec l’obscurité, on se trouve dans une grotte dont le plafond, tapissé de capillaires, s’arrondit en voûte sur une source d’eau cristalline. Le murmure que l’on entend 16.


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