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triflée à vingt jours de Ben-Ghazi du P. Godefroi. Ainsi, la capitale des Nabatæens, Petra, contenant encore, au rapport des savants voyageurs Burckardt et Bankes, un grand nombre de statues et de configurations sur la pierre, explique YEnsana (ï) d’Yakouti. Mais ce serait abuser du temps et de la patience du lecteur que de le retenir davantage sur un pareil sujet. Indépendamment des niches dont j ’ai fait mention, le séjour des Chrétiens à Massakhit est plus irrévocablement encore attesté par les sculptures de l’intérieur d ’une grotte, située à l’extrémité occidentale de la ville. Deux colonnes à chapiteaux en volute, dont un ne fut point terminé, soutiennent les angles d’une frise intérieure, taillée, ainsi que les colonnes, dans le rocher. Cette frise est composée de trois faces, chacune sculptée d’une manière différente : sur celle qui est vis-à-vis de l’entrée, on voit un médaillon formé d’une couronne de laurier, au milieu duquel est une croix entourée de deux serpents; latéralement au médaillon sont d e grossières arabesques où la figure du coeur se trouve souvent répétée. Le symbole du christianisme était aussi sculpté sur les deux autres faces de la frise; mais les coups de pioche dont il est mutilé offrent le témoignage de la haine des Musulmans, qui cherchèrent à faire disparaître de cette contrée les signes d’une religion proscrite. Cette intention est d’autant plus évidente que les autres ornements sont restés intacts : on y remarque une vigne avec ses grappes et ses feuilles, allusion naturelle à la vigne du Seigneur; de même qu’on y retrouve le poisson, offrande habituelle des Chrétiens de la Cyrénaîque (Voyez pl. XIII). Ces indices prouvent que Massakhit fut un bourg de quelque importance dans la Pentapole chrétienne; mais quel fut ce bourg? Le défaut de renseignements me laisse dans une ignorance complète à ce sujet. J’ose à peine hasarder le nom d’Olbie, ville épiscopale, nommée par Synésius (2), et q u i, d ’après une liste très-peu géographique, il est vrai, de la Géographie sacrée, aurait été placée aux confins de la Libye Pentapole (3). (1 ) Mot qui correspond à peu près à celui de Massakhit, puisque Ensan, en arabe, signifie un homme (d’H erbeeot, mot Ensan). (2) Epist. 76. Quittons donc ces restes mutilés des derniers âges de la civilisation de cette contrée; peut-être, en remontant à des époques plus reculées, en foulant des débris plus défigurés encore, nous trouverons des notions moins incertaines et des souvenirs plus intéressants. Au sud, et en vue de Massakhit, on aperçoit un monticule" couronné de ruines dont l’aspect même de loin est imposant. Je me hâte de m’y rendre, et un vaste édifice quadrangulaire se développe à mes regards : (les blocs de grès, de six pieds d’épaisseur, forment ses assises, et sa lpngueur de chaque côté est dé quarante-trois mètres. Cependant la main du temps est parvenue à abattre ces masses monolithes; il n’en reste plus que quelques mètres àu-dessus du sol. Dans l’intérieur, ses efforts destructeurs ont exercé plus de ravages encore : une corniche dorique, e t quatre chapiteaux de marbre ornés de feuilles d’acanthe et de grappes de raisin, seuls ont échappé à une complète mutilation (Voyez pl. X X V I I, fig. 3, 4). On les voit à demi enfouis dans la terre, au milieu de blocs écornés; de fûts, les uns renversés, lès autres debout, mais n’offrant plus que des tronçons placés de manière à ne donner aucune idée exacte de l’ancienne distribution de l’édifice (Voyez pl. X I , fig. 3). Cependant de tels débris et leur vénérable vétusté indiquent suffisamment que l’on se trouve auprès d’un temple d’une antiquité reculée. Que de regrets on éprouve en voyant sa grande destruction ! et que ces regrets augmentent encore si l’on invoque sur ces lieux les inductions de l’histoire! Le. cap Tourba, situé à peu de distance à l’est de Massakhit, et à cinq lieues et demie de Derne, est sans contredit le Zephirium de l’antiquité, port et promontoire placé par le Périple anonyme à cent cinquante stades de Zarine (j). Suivant le même stadiàsme, une autre station, Aphrodisias, se trouvait à soixante stades à l'occident de la précédente; un temple de Vénus lui avait donné ce nom. Scylax (1) I r ia r te , Bibli. Matri. v. I , p. 486. Strabon ( 1. X V I I , c. 2 ) fait mentipn de deux Zephirium, situés entre le p o r tNaustathmus et la Chersonèse. L’un offrait, dit-il, un abri aux vaisseaux : c’est celui du Périple anonyme;,l’autre paraît être le cap de Deme. Ptolémée (1. IV, c. 4) place de même le promontoire Zephirium entre üarnis, et le village de Chersis situé à l’orient du Naustathmus. Enfin Pomponius ( 1, I , c. 8) ne connaît dans tout le littoral de la Libye que les promontoires Zephirium et Naustathmus. I. - 16


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