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CHA P ITR E VII. Départ de Derne. — Hydrax et Palæbisea. — Vallon Betkaâl. — Château de Maârah. — Massakhit.— Ville pétrifiée.— Zephirium.— Aphrodisias.— Tëmple de V énus.— Bains. V in g t jours s’étaient écoulés depuis que je languissais dans une inactivité forcée, lorsque enfin une lettre de Ben-Ghazi vint me rendre à la liberté. Grâce aux pressantes démarches du vice-consul anglais M. Ros- soni, le gouverneur Moukhni me permit de visiter la partie de la province ■ comprise entre Derne et Grermah, m’enjoignant toutefois de ne point franchir ces limites avant l’arrivée d’un firman de Tripoli. Il m’envoya en même temps plusieurs lettres pour les principaux chefs des tribus arabes,.et donna ordre à son premier écrivain, Hadji~^4bd~el-j4z is, de m’accompagner, afin de me garantir, autant qu il serait possible, des t dangers auxquels je voulais, disait-il, si aveuglement m exposer. Là joie que me causa cette nouvelle fut néanmoins troublée par l’état peu rassurant de la sànte de M. Millier. Sa maladie, au lieu de se calmer, avait empiré à un tel point qu’elle le rendait absolument incapable dé supporter de nouvelles fatigues. Quelque peine qu’il m’en coûtât, je me vis forcé de le quitter. Hadji Uamçdèh se chargea de veiller à son rétablissement; le plus fidèle de mes Nubiens resta auprès de lui pour le soigner; et je rentrai dans le désert. Si la contrainte et les précautions auxquelles un Européen est soumis dans les petites villes de l’Orient, lui en rendent le séjour désagréable lorsqu’il est volontaire, que l’on juge de l’anxiété qu’elles doivent produire sur son esprit, lorsque ce séjour est forcé. Aussi, dès qu’il en est affranchi, dès qu’il a pu rentrer dans les solitudes, il se sent comme débarrassé de lourdes chaînes : il a quitté la gênante livrée des villes, et repris le manteau du désert; monté sur la jument docile ou sur le fougueux dromadaire, il éprouve le besoin de se répandre dans l’espace; il respire avec volupté cet air du désert, cet air de liberté qui change en idée de sécurité et de plaisir la frayeur que sans lui son immensité ferait naître. Cependant les lieux où je me trouvais n’étaient rien moins qu’effrayants, et leur aspect ne pouvait qu’ajouter au plaisir de recommencer mes promenades aventureuses. La partie du plateau qui s’étend au-dessus dé Derne, quoique en général dépourvue de haute végétation, est agréablement ondulée de vallées vers le nord, et devient toutefois moins fertile vers le sud. Les ruines que j ’y aperçus sont peu remarquables par elles-mêmes; mais les souvenirs qü’elles m’occasionnèrent ne sont point sans intérêt. Au sud, et à trois heures de Derne, je rencontrai d’abord une petite construction isolée; cet édifice est moderne, il est la demeure d’un santon. Après avoir suivi encore cette direction pendant quatre heures, j ’entrai dans un enfoncement peu, sensible que décrit la plaine vers l’ouest sur un espace de deux heures et demie. A son extrémité, je vis un grand château, grossièrement construit avec des matériaux plus anciens, et à une heure plus au nord les vestiges d’un bourg antique. Quelques mesquins rejetons d’oliviers, épars çà et là aux environs du château, lui ont fait donner le nom de Zeitoun; de même que des bouquets de figuiers ont fait donner celui de Kouroumous aux ruines du village. Dans l’un et l’autre lieu, on trouve les restes défigurés de plusieurs tombeaux antiques (V . pl. IX , i et 2), Il serait superflu d’entrer à leur sujet dans une minutieuse description ; nous aurons plus d’une fois l’occasion de nous arrêter devant-ces innombrables mausolées qui couvrent la Pentapole, et dont l’étonnanfe conservation nous présentera l’image du deuil survivant presque seule dans cette contrée aux témoignages de son ancienne splendeur. D’autres objets attirent maintenant notre attention. A cinq heures plus vers l’ouest de ces lieux , sont les vestiges d’un autre village avec une tour antique, qui fut pendant long-temps la résidence d’un chef arabe, d’où elle a pris le nom de Bon-HassanÇV. pl. IX , 3). .Ces nouvelles ruines n’ont rien de plus remarquable, et je n’en fais mention dans le moment, qu’à cause de leur position qui les rattache, selon mes conjectures, aux premières plus intéressantes. Ces deux bourgs se trouvent sur les confins des terres réellement fertiles , puisqu’à quelque distance dans le sud on ne voit plus d’autre végé


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