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leur intention formelle de ne point me laisser continuer mon voyage avant d’y être engagés par des ordres supérieurs. Je m’attendais à ces difficultés ; Mohammed-el-Gharbi me les avait fait pressentir à Alexandrie. Aussi, loin d’essayer d’ébranler par de vaines paroles une décision prise entre eux d’avance et d’un commun accord , je m’empressai d’expédier un courrier à T rip oli, porteur de la lettre du pacha d’Égypte, et des recommandations de MM. Drovetti et Sait. Quarante mortels jours étaient cependant rigoureusement nécessaires pour recevoir une réponse. L ’idée de voir mes recherches paralysées, durant ce long espace de temps, et celle plus affligeante d’être réduit à habiter l’enceinte d’une ville, étaient bien susceptibles d’alarmer mon imagination. Dans le trouble où me jeta la perspective de cette désespérante inactivité, je formai d’abord mille “projets aussi peu sensés les uns que les autres ; et ce ne fut, comme il arrive souvent, qu’après avoir bien extravagué, que j ’eus recours à l’expédient le plus simple. J’écrivis au bey de Ben-Ghazi, pour le prier de me laisser parcourir, jusqu’à l’arrivée du firman de Tripoli, une partie au moins des déserts soumis à son gouvernement. Rassuré par l’espoir de réussir dans cette démarche, je profitai du peu de liberté qui m’était accordée, pour faire de fréquentes promenades dans la ville et ses environs. CHAP ITRE VI. Derne. » C in q villages, séparés l’un de l’autre par de petites distances, et places irrégulièrement, les uns sur les premières ondulations de la montagne , et les autres dans la plaine, forment collectivement la ville de Derne; mais chacun d’eux est distingué par une dénomination spéciale qui en peint la situation propre ou relative. Le plus considérable, entouré d’une muraille d’enceinte, est nommé par ces raisons el-Medinèh, la capitale, ou bien Beled- el-Sour, la ville fortifiée. El-Magharah, le village de la grotte ( i) , est à l’ouest et un peu au-dessus du précédent. El-Djébeli;rapproche de la mer, doit son nom à son état d’abandon bien plus qu’à sa situation isolée. Enfin, Mansour-el-Fokhâni et Mansour-el-Tahatani, sont séparés des trois que je viens de nommer par un vallon formant en hiver un torrent considérable. Le premier, au sud de Beled-el-Sour, est situé sur la sommité de la rives méridionale du vallon; et le second, presque au niveau de la plaine, se trouve par conséquent au-dessous du précédent, mais dans une position plus orientale. C’est vis-à-vis de ce dernier village qu’est le port de Derne, mauvaise petite rade dont le fond, sillonné par des rescifs, et l’entrée très- ouverte, ne peuvent offrir qu’une station peu sûre aux navires, qui n’y viennent mouiller en effet que rarement et seulement en été. Les nombreuses excavations sépulcrales que l’on voit auprès de Derne et dans ses environs, indiquent le gisement d’une ancienne ville, q u i, si je ne me trompe, devait occuper la position centrale des villages actuels, et correspondre à Beled-el-Sour. Nul doute que cette ville ne fut Darnis, ou Dardants, que Ptolémée place à l’extrémité orientale de la Cyrénaique (2). (1) Ainsi nommé à cause d’un ancien puits qui se trouve au milieu du village. (2) Voyez Description de la Marmarique, page 55.


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