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sur le prolongement rocailleux de la côte qui forme le port et le préserve de tous les vents, excepté de celui d’est. Parmi des entassements de pierres de taille et des débris de poteries, je ne pus distinguer que des arcs détachés d’anciennes voûtes et des puits comblés ; quelques tronçons de colonnes et des fragments de marbre et de granit me prouvèrent l’antiquité de ce lieu, qui, selon les distances données dans le périple de Scylax, correspondrait au bourg ¿4ntipyrgus. Ces ruines sont entourées d’un mur construit en belles assises et d’un état de conservation qui contraste avec la grande destruction de la ville : il forme un carré irrégulier dont la plus grande longueur est du S .-S .-E . au N.-N .-O .; dans ce sens il a deux cent quarante - six mètres, sur cent quarante du S.-O. au N.-E, Sur les côtés intérieurs de ce mur, on voit des escaliers pris dans son épaisseur pour arriver au sommet; ils sont dirigés en sens divers, de manière à décrire entre eux des lignes tantôt parallèles et tantôt divergentes (Voyez pl. V , fig, 6). Il me parut hors de doute que cette enceinte était postérieure aux ruines de l’ancienne ville, et qu’elle avait été élevée par les Sarrasins. L ’heureuse situation de Toubrouk auprès d’un port bien abrité, aura engagé quelque prince arabe à fortifier ce poste maritime. Si l’aspect des monuments ne m’induit en erreur, je trouve une grande analogie pour le genre de construction et le degré de conservation, entre l’enceinte de Toubrouk, le Kassr-Ladjedabiah et Lamaid, trois édifices élevés pour protéger le littoral. L ’inscription de Lamaid atteste, comme je l’ai déjà fait remarquer, que ce château fut construit par les ordres du fils du sultan Bibars. On sait que Bibars, en apprenant le débarquement de saint Louis à Tunis, fit fortifier ses frontières et mettre divers points de la côte libyque en état de défense (i). Ce ne serait donc pas beaucoup hasarder que d’attribuer à une époque approchante les fortifications de Ladjedabiah et de Toubrouk, qui ont tant de rapports avec le château Lamaid. Dès que j ’eus rejoint ma caravane, avant de descendre avec elle les hauteurs qui de Toubrouk s’écartent de la côte, je me rendis, en suivant leur prolongement occidental, dans un lieu nommé Klekah, où, parmi les ruines d’un petit bourg, on voit quatre massifs en briqués crues, conservant les restes d’un revêtement en pierres : ils sont rangés symétriquement, de manière à former les quatre angles d’un grand carré, dont le point central est occupé par un puits orné d’auges et creusé dans le roc d’un grès schisteux. Le mieux conservé a vingt-un mètres de chaque côté; l’intérieur est comblé de briques fondues par les pluies, et ne présente qu’une surface concave et unie. Auprès de chacun de ces massifs est un immense bloc de calcaire compacte, arrondi, percé au milieu et parfaitement semblable, par la forme et les dimensions, à une meule dé moulin. Ces massifs sont indubitablement les restes de quatre tours, et peut-être que le petit bourg où ils se trouvent, comme celui du mont Catabathmus, aura pris dans l’antiquité le nom de Tetrapyrgia. De Klekah je descendis de nouveau les hauteurs de Toubrouk, et je me trouvai dans une vallée spacieuse nommée Ouadi-el-Sedd. De même que celle de Daphnèh, elle est côtoyée par deux collines de hauteur inégale; l’une, celle de Toubrouk, est composée de couches de grès bariolées par les oxides, de différentes couleurs; l’autre est en calcaire très-dur et d’une couleur obscure à sa surface. Cette dernière, moins élevée, suit les bords de la mer, et ne s’étend que sur un espace de onze heures jusqu’auprès d’une anse que l’on peut considérer comme le prolongement oriental du golfe de Bomba. Deux heures avant que d’arriver dans ce lieu, on voit sur le côté méridional de la colline un grand nombre de catacombes, nommées par les Arabes Magharat-el-Heabès, grottes des prisons; et sur le revers opposé plusieurs traces de belles fondations indiquent le gisement d’une ancienne ville, probablement celle de Petras-Parvus, distante, selon Scylax, d’une journée de navigation d' Antipyrgus. Ces grottes offrent des particularités remarquables à cause de leur style greco - égyptien. Devant leur entrée on voit ordinairement une cour découverte, ceinte d’un mur dont la base est taillée dans le roc, et la partie supérieure construite eh assises. Intérieurement elles sont subdivisées en plusieurs pièces a angles droits (Voyez pl. V, fig. i et 2 ) , mais avec une ou plu


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