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nous invita à commencer le repas. Tous les notables du camp assistaient à ce festin ; et pendant qu’à la lueur des feux le cheik en faisait gravement les honneurs, les jeunes filles drapées comme des cariatides nous offraient le grand vase de la it , dans lequel nous buvions tous à la ronde... Mais il est temps que je termine ces détails, et que je reprenne le fil de mon récit. Le i 5, je quittai avec regret ces bons pasteurs qui nous avaient reçus avec tant de cordialité. Deux heures après notre départ, nous franchîmes une nouvelle chaîne de hauteurs, nommée Mendar-el-Medah, dont la direction est du N.-N.-O. au S.-S.-E. ; et de là je quittai avec M. Müller ma caravane, pour aller faire une excursion vers le sud dans la vallée Thaoun. Des ramifications de collines, les unes fertiles, les autres rocailleuses, occupent un espace de huit heures, depuis les bords delà mer jusqu’au Bir- Thaoun, situé à l’extrémité delà vallée qui porte le même nom. Ce canton a dû être autrefois très-habité ; nous y aperçûmes fréquemment des traces de fondations ; mais aucun édifice n’est encore debout. De Bir- Thaoun, en suivant la direction N.-N.-O., nous arrivâmes, après sept heures de marche, auprès d’un monument remarquable, nommé Kassaba, Zarghah-el-Ghuhlièh ; il est situé sur une élévation qui le fait apercevoir de très-loin. Cet édifice forme un carré régulier, dont chaque côté a 7 mètres 4 déc. de long sur 4 mètres 1 décim. de haut. Ses murs ont à l ’extérieur un soubassement massif, au-dessus duquel prennent naissance des colonnes engagées et des pilastres. Le côté sud offre un encadrement en relief, qui représente une porte. (Voy. pl. IV, 2. ) Mais l’entrée n’est réellement pratiquée qu’au plafond par une ouverture carrée d’un mètre 4 décim. La partie supérieure manque; elle devait être couronnée par des frises dont on aperçoit encore les fragments dispersés aux alentours. Intérieurement il est vide , et depuis le sommet jusqu’à la base les assises s’écartent successivement, et lui donnent une forme oblique. Ce petit édifice, dans lequel je trouvai des débris d’ossements, que le contact de l’air réduisait aussitôt en poussière, fut sans doute un tombeau élevé sous le règne des Ptolémées. A deux heures, au nord de ces ruines, on trouve un autre monument dont les proportions sont plus elegantes, et les pierres des assises plus petites que celles du précédent ; ses angles sont aussi ornés de pilastres, mais beaucoup moins massifs. Il est construit sur une espèce de grand piédestal, formé par quatre rangées d’assises disposées en escalier, et posées elles-mêmes sur un banc de roche qu’on a aplani à la surface, et taillé en guise de mur aux deux côtés de l ’édifice. (Voy. pl. IV, 1.) Ces ruines nommées également Kassaba-Zarghàh (1 ), mais avec la désignation de Baharièh qu’elles prennent de leur situation au nord des premières, ont au premier coup-d’oeil une grande analogie avec les tombeaux que l’on rencontre en si grand nombre dans la Cyrenaique. Toutefois, l ’intérieur voûté et revêtu d’une couche de plâtre, en diffère tout-à-fait, et je doute que ce monument ait eu la même destination. Aux environs, on aperçoit des fondations d’une belle epoque, et une grotte sépulérale contenant des niches cintrées. Tous ces indices attestent dans ce lieu l’emplacement d’une ancienne ville, peut-être celle de Gyzis( 2), dont le p or t, actuellement appelé Mahadaii, se trouverait à peu de distance vers l’est. Avant de quitter ces ruines, je ne dois pas omettre de faire mention des signes que l’on y remarque Selon le plan que j ’ai adopté, je préfère réunir les faits qui ont une liaison entre eux, et les offrir en masse, plutôt que de les exposer en détail et dans l’ordre des lieux où ils se présententsuccessivement. Cette méthode ôte peut-être à la relation d’un voyage une partie de l’intérêt local, en ce qu’elle ne met pas le lecteur immédiatement en présence des objets décrits. Mais elle me paraît plus succincte, puisqu’elle évite des répétitions, et mieux convenir aux observations, puisqu’elle les réunit et qu’elle en offre le résultat. Rien en effet ne me paraît plus susceptible d ’augmenter l’utilité d’un voyage, dans une contrée peu connue, que de comparer entre eux les divers objets qu’elle renferme, de suivre la chaîne des rapports que l’on découvre quelquefois entre les choses les plus contraires ; et quoique cet examen suivi n’ait souvent pour résultat que le doute, ce doute peut au moins nous conduire à découvrir la vérité. (1) Le mot kassaba signifie, en arabe, un bourg ou un village. (2) Je lis Gyzis dans Cellarius ; d’Anville écrit le nom de ce lieu, Zygis; l’anonyme Zygren, et il le place à sept stades de Leuce-Acte.


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