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été tenté d’attribuer à la seule conservation de la propriété, des soins qui me paraissaient inspirés par une juste reconnaissance. En contournant dans la direction nord-ouest la côte occidentale du golfe des Arabes, nous parvînmes, après sept heures de marche, de Dresièh dans un lieu nommé Maktaërai. Les habitants donnent ce nom à un plateau en grès, où l’on voit environ deux cents ouvertures pratiquées dans la roche, qui servent d’entrée à des grottes, et distantes entre elles de trois ou quatre pas. Sur leurs bords sont encore entassés des blocs de pierre bruts que l’on a extraits du sein du plateau pour former ces excavations; leur aspect fruste me fit présumer qu’ils devaient être là depuis mie époque très-reculée. - .le pénétrai dans plusieurs de ces grottes, et je n’y trouvai qu’une petite meule à moudre le blé, et des instruments aratoires déposés sans doute par les Arabes des environs. Elles sont taillées très-grossièrement et n’ont aucune forme régulière; dans toutes celles que je visitai, leur encombrement m’empêcha de vérifier si elles avaient eu des communications entre elles. Aucun indice ne me permit de croire qu’elles eussent été destinées à un objet sépulcral; elles ne me parurent pas non plus creusées pour servir dé citernes, puisque les entassements de pierres qui ceignent leurs orifices auraient empêché d’y conduire les eaux des pluies, et qu’il eût été d ’ailleurs superflu de multiplier en si grand nombre des ouvertures si rapprochées, si toutes ces grottes n’eussent été que des bassins. L ’histoire ne fait mention d’aucune peuplade de Troglodytes, habitant la Marmarique; Hérodote et Pomponius Mêla les placent dans l’intérieur des terres vers le sud-ouest dans le pays des Garamantes. Néanmoins je ne pouvais ra expliquer un si grand nombre d’excavations souterraines qu’en supposant qu’elles avaient servi d’habitations. Le i 3, à une demi-heure de Maktaërai, nous passâmes auprès de Benaïèhr-Mbou-Sélim(i ) , ruines d’une enceinte quadrangulaire située sur une hauteur et contenant un puits. (i) Construit par Abou-Sélim. Ce nom indique que ces ruines auront été restaurées et habitées, par quelque cheik arabe. Il rappelle aussi la fameuse tribu d' Abou-Selim, qui occupait autrefois, suivant Macrizy, les contrées de Barkah et d1 AJi'ikiah, et qui avait un très-grand nombre de Berbères sous sa dépendance. A sept heures de distance de ce dernier lieu, nous franchîmes une chaîne de collines calcaires qui se prolonge par mamelons du nord au sud; et de là.nous arrivâmes par un chemin rocailleux au Kass-Djam- mernèh, autre mur d’enceinte couronnant également une élévation. Des ruines semblables se trouvent fréquemment dans la Marmarique ; leur situation, l’épaisseur des murs, et les puits dont elles sont pourvues, m’ont fait supposer qu’elles pouvaient être les restes de postes militaires destinés, dans l’antiquité, à protéger les bourgs et la voie publique contre les incursions des anciens nomades. Ces conjectures acquerront plus de probabilité, si l’on se rappelle que les Romains furent souvent obligés de combattre les Marmarides, non point dans l’intention d’asservir ces peuplades, mais dans le seul objet d’assurer la libre communication entre l’Egypte et la Cyrénaïque (1). . Les citernes-qui sont aupirès de Djammernèh , et l’examen que j ’en fis, m’offrent l’occasion d’entrer dans quelques détails sur la manière dont elles furent creusées. Une d’entre elles présente un carré régulier dont chaque côté a vingt mètres de longueur ; et quoique en partie comblée de terre d’alluvion, déposée par les eaux qu’elle contenait autrefois, elle conserve encore quatre mètres de profondeur. La couche supérieure de la roche, épaisse de trois pieds, forme elle-même le plafond, auquel sont pratiquées trois ouvertures , et qui est soutenu intérieurement par deux piliers carrés, taillés aussi dans le roc. Un ciment rougeâtre composé de briques pilées, de cendres et de sable, sert de revêtement aux piliers et aux quatre côtés de la citerne, hors an plafond qui en est dépourvu. Je remarquai qu’aux autres citernes voisines de celle-ci,.l’épaisseur du plafond était inégale, et qu’elle était formée de deux et même trois couches de la roche ; cette différence dans l’épaisseur aura été nécessitée sans doute par celle de la solidité ou des accidents que le roc aura offerts dans les endroits où ces excavations furent faites. A deux heures au nord de Djammernèh sont plusieurs puits, et des traces de fondations, non loin du cap qui forme l’extrémité occidentale (1) Voy. Joseph, de Bello Jud. I I , 16. Vopiscus, vit. Prob. I.


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