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356 REMARQUES SUR LE VOCABULAIRE d’aüDJELAH. d’avance de cet alphabet, si inutilement célèbre, dont Volney rêva vingt ans l’application européenne, et qui, une fois enfin, eût été appliqué avec fruit. Malheureusement, en composant son vocabulaire, l’auteur ne paraît pas s’être d’abord attaché à un système fixe de transcription; de manière que lorsqu’il a fallu ensuite convertir les lettres françaises en lettres arabes, il a souvent confondu les sons simples avec les sons emphatiques ou gutturaux, c’est-à-dire les avec les h , les avec les j» , les avec les J j, et quelquefois même les ! avec les p .Rien n’est plus propre à mettre ce fait en évidence, que la différence d’orthographe dans un même mot répété en deux ou trois endroits du vocabulaire, pour représenter des significations analogues ou identiques. Cherchez, par exemple, le mot é c a il l é , vous trouverez taserimt-, cherchez ensuite le mot E corce , vous trouverez t commençant par un h ; cherchez encore le mot P elure , vous retrouverez avec u n o . Il est évident que les mots écaille, écorce, pelure, sont employés ici comme synonimes, quoiqu’il n’y ait entre eux que de l’anologie ; mais quelle est la véritable prononciation du mot taserimt? faut-il un faut-il un i ? la critique ne fournit à cet égard aucun moyen de solution : il faudrait retourner sur les lieux. Cette irrégularité de transcription se reproduit fréquemment et de diverses manières ; en voici d’autres exemples, fidèlement copiés du manuscrit : A c h e v e r . Ammartet. S c o r p io n . - Téghardim. H F i n i r . Amartet. R e p t i l e . Taghardira. fiéyk B o u l e . Tahhallaq. P a p i e r . Kartayah. R o n d . Tahallaqt. L e t t r e . Tékhartey.' H ü l E c h e l l e . Tahadit. D a t e . Tékartay. - E s c a l i e r . Tahadit. XoLs“5 J’ajouterai un dernier exemple : le mot Boeuf est traduit dans le manuscrit par akjik qu’on a transcrit ’ ; en cherchant le mot V ache , on trouve ahfiqeh, qui n est que le féminin d’akfik; mais cette fois deux 3 ont pris la place des deux^tV, et Ion a transcrit ajùUI ( i )-. Si cette inexactitude de transcription, ne m’avait pas été démontrée par les synonimes , je l’aurais bien plus facilement encore reconnue dans les mots qui appartiennent à une racine arabe. C ’est ainsi que j ’ai rendu à leur véritable origine les mots : p j Le manuscrit portait même ai-ül, mais j’ai corrigé cette transposition. REMARQUES SUR LE VOCABULAIRE DAUDJELAH. 357 kj,jt, fendreh dérivé de l’arabe í f , qui a la même signification; 3-.p, chargé, participe irrégulièrement formé du verbe 3__, charger ; mordre, dont la racine arabe est le verbe sourd ,«■. Dans le manuscrit, ces trois mots étaient orthographiés ainsi : , Le mot aian, m a i g r e , quoique désigné comme arabe dans le vocabulaire, est transcrit ^bt ; il faut certainement , qui en arabe signifie fa ib le , maladif, fatigué. Delaaouar, borgne , était indiqué au crayon comme persan ; je ne vois dans ce mot que la transcription de l’arabe j jé ir , le borgne, précédé d’un J ajouté. Dans le vocabulaire, on a écrit jIj'Jj. , bêche , est un mot arabe, mais il faut le lire SU?—» ; car la suppression de \ a le f le ferait dériver du verbe sain - w , tandis qu’il a pour racine le verbe défectueux U~. > Le son du 3 a été représenté tantôt par un q , tantôt par un g , tantôt par les deux lettres g h , qui répondent assez bien au son que les Arabes d’Afrique donnent au 3 , qu’ils prononcent en effet comme un g dur et guttural. Mais comme les lettres gh ont été aussi employées dans le vocabulaire pour représenter le il en est résulté quelques méprises : le mot bagh, p u n a i s e , en est un exemple ; c’est incontestablement le mot arabe 3 i qui a la même signification. Dans le vocabulaire, on a transcrit bagh par ¿b . Je bornerai là mon examen; et je dois me hâter de dire que, malgré les imperfections que j ’ai signalées, le vocabulaire de M. Millier n’en est pas moins un document utile et important. C ’est un travail tout fait pour le premier voyageur qui visitera, après lu i, l’Oasis d’Audjelah : il n’y aura plus qu’à l’étendre et à le régulariser. Des hommes dévoués à la science ont déjà sillonné l’Afrique dans tous les sens ; ils ont rapporté de leurs courses avantureuses des vocabulaires recueillis sur divers points de ce vaste et inexplicable continent. Mais M. Müller est, à ma connaissance, le premier voyageur qui ait publié un vocabulaire delà langue parlée à Audjelah;et, à une époque où toute notion acquise sur l’Afrique est accueillie comme une conquête, l’auteur me paraît avoir bien mérité des savants, et s’être préparé, pour l’avenir, des titres à leurs suffrages. AGOUB.


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