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même vers le cèdre et le melèse avec le thyon , porte à présumer que ce dernier devait être également un conifère. Si l’on parcourt au printemps ces forêts-de thyon, qui du sommet des montagnes de Cyrène s’étendent jusqu’aux vallées maritimes, -on rencontre fréquemment à leur pied une petite liliacée, qui jouit aussi par son utilité de quelque illustration dans l’histoire agricole de la Cyrénaïque ; c’est le safran. Quoique cette plante fût infiniment répandue dans plusieurs autres contrées, et qu’à Cyrène elle eût une couleur dont l’intensité s’approchait du noir (i) ; ce que le pollen très-obscur de ses étamines peut confirmer de nos jours, néanmoins la plupart des auteurs de l’antiquité s’accordent à louer la beauté du safran de la Cyrénaïque. Les divers usages que l’on faisait de cette plante expliquent sa renommée un peu éclipsée de nos jours. Non seulement on le mêlait comme nous dans la préparation des mets, des médicaments et des teintures ; mais on s’en servait aussi comme parfum ; et préparé avec de l’huile 011 en obtenait une essence très-estimée chez les Grecs et les Romains (a). Toutefois cette essence ne pouvait être comparée à celle que l’on faisait dans la Cyrénaïque avec les roses, et dont l’antiquité a vanté la haute valeur, et assigné même l’époque de sa plus grande perfection, qu’elle a attribuée à Bérénice, fille de Magas. Indépendamment des usages d’une utilité réelle auxquels elle servait, employée tantôt comme antiseptique, à arrêter le progrès des blessures et à empêcher la putréfaction des cadavres; et tantôt comme préservatif, à défendre les meubles précieux contre les injures de l’a ir; on ne doit pas être surpris que les Cyrénéens aient apporté le plus grand soin à la confection de-l’essence de rose, puisqu’elle servait principalement à parfumer les cheveux et le linge, et généralement tous les objets de luxe (3). On ne doit pas l’être davantage que la plus belle comme la plus suave des fleurs ait eu dans cette riante L ib y e , dans ce jardin de Venus, un parfum et un éclat qu’elle n’avait point-dans les autres contrées (4). (i) Pl.INF , 1. X XI, C. (>■ . (2) T h rig e , Hist. Cyrën. p. 25a , 25,3. (3) Id. ibid. p. 254, n * 35. (4) Athen. 1. XV, c. 29. Que si mon témoignage pouvait être utile en ceci, je répondrais que ces belles roses libyques vantées par l’antiquité, quoique de nulle valeur aux yeux des Arabes, font peut-être encore l’ornement des fraîches vallées. Du moins j ’en ai rencontré fréquemment deux espèces à corolle blanche, qui m’ont paru s’accorder par leurs caractères à celles connues des botanistes sous les noms' de Rosa silvestris et spinosissirha ; n’osant toutefois affirmer que celles-ci, croissant spontanément parmi les autres plantes, soient les mêmes q u i, transplantées autrefois dans les jardins, fournissaient l’essence dont je viens de parler. Les anciens auteurs font encore mention de deux plantes de la Cyrénaïque qui acquirent quelque renommée ; ce sont le sphagnos ou bryon et le misy. La première qu’ils ont dépeinte comme une mousse odorante qui pendait aux arbres , ne me paraît pas facile à déterminer avec quelque certitude, puisque, malgré le grand nombre de cryptogames qui couvrent les forêts de la Cyrénaïque, il n’en est aucune dont l’odeur offre un caractère remarquable. Quant à la seconde le misy, c’était, selon Pline, une truffe d’un meilleur goût et d’un parfum plus agréable que les autres. Il est certain que l’on rencontre souvent dans les parties sablonneuses du littoral de la Libye une espèce de truffe de couleur blanche. Les Arabes m’ont affirmé qu’il en existait en quantité aux bords de la Syrte ; toutefois je ne répète qu’un oui-dire, et je ne saurais par conséquent rien avancer de positif à ce sujet. 34


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