Page 156

27f 59

V O Y A G E D A N S L A M A R M A R IQ U E chevaux, n’étant point indigènes en Grèce| y auraient été transportes de l’Afrique par les Phéniciens, d’où serait dérivée la fable du présent d’un cheval que Neptune fit à Athènes. Quoi qu’il en puisse être de ces ingénieuses hypothèses, il me paraît certain que les Libyens littoraux , de même que les Cyrénéens, avant la domination de Rome en Afrique, se servirent exclusivement de chevaux, et ne firent aucun usage de chameaux, soit pour les travaux agricoles, soit pour le transport. Ce ne fut que sous la période romaine que ce précieux animal fut introduit par les Libyens, des provinces intérieures de l’Afrique, dans les champs de la Pentapole cyrénaïque. Nous savons positivement que ceux-ci se servaient de chameaux dans leurs courses dévastatrices ( t ) ; et l’on peut ajouter que ces chameaux devaient être de cette espèce aux formes déliées, connue sous le nom de dromadaires (a); ce qui me semble d’autant plus probable que les Touariks, nomades qui habitent l’mte- rieur de la Libye au sud de la Cyrénaïque, ne se servent aujourd’hui que de dromadaires, réputés les plus sveltes et les plus rapides de toute l’Afrique. Cette cause de la propagation du sobre habitant des sables, dans les champs fertiles de la Libye septentrionale, est la seule explication que je trouve de ces nombreux troupeaux de chameaux qui couvraient, du temps de Synésius, la campagne de Cyrène (2), quoique les auteurs antérieurs à l’évêque de Ptolémaïs n’aient jamais fait mention de ce quadrupède parmi ceux de la Cyrénaïque. Quant aux mulets et aux ânes dont les Cyrénéens faisaient aussi usage aux mêmes époques ( Ç f leur utilité dut les faire apprécier dans un pays montueuxV mais d e s t douteux que les Cyrénéens des âges plus reculés s’en soient servis. (Y) Synes. Epist. n 3 , éd. Petay. p. a54- fa} Je ferai remarquer, en faveur de mon opinion, que les peuples nomades de 1 antiquité se sont servis de dromadaires, même dans les expéditions militairés régulières. Je bai qu'à rappeler ees Arabes de l'armée de Xerxès, qui, au rapport d’Herodote, 'étaient montés sur des chameaux dont la vitesse égalait celle des chevaux ( Herod. 1. V I I, 86). • ,(3!j Synes. Epist. 129, p. 266. • (4) Id. Epist. 109, p. 2S2. Il n’en est pas de même des grands troupeaux de boeufs, de moutons et de chèvres, principal objet de tout temps, des richesses des habitants de cette partie de la L ib y e , Grecs et Romains , Libyens et Arabes. Le nombre de boeufs dut être si considérable dans cette contrée dès la plus haute antiquité, que les peaux en étaient employées dans le commerce, et transportées à cet effet à l’étranger (i). En outre, la femelle de cet animal était en Egypte, comme on sa it, le symbole de la déesse Isis ; et cette allégorie religieuse sous laquelle la terre ët ses productions étaient adorées, se retrouve à Cyrène et dans les cantons environnants consacrée par un usage qui avait le même but. Hérodote d i t , en effet, que les femmes de Cyrène et les Libyens voisins s’abstenaient de manger de la chair de vache par respect pour la déesse Isis (2). Le changement même de gouvernement et de religion ne put détruire dans ce pays cette tradition antique ; elle y existait et y était pratiquée à l’époque chrétienne (3); et , chose plus surprenante, elle y existe encore de nos jo u r s , puisque les Arabes de Barcah s’abtiennent de boire le lait de vache, tandis qu’ils font un grand usage de celui des autres bestiaux. Le bétail à laine de la Cyrénaïque fut connu des G re c s , sans doute par l’expédition des Argonautes, avant l’établissement de la colonie de Théra sur le sol d’Afrique, témoin l’ordre quelle reçut de l’oracle de Delphes, et les promesses, réalisées qui en furent l’objet (4). Néanmoins, il est à présumer que les chèvres durent y être de, tous temps plus nombreuses que les moutons , d’autant plus qu’en ceci encore des traditions antiques s’accordent avec le climat de cette contrée qui n’est point le même, comme je l’ai indiqué plus haut, dans la région boisée et dans les plaines méridionales. Remarquons d’abord que, selon Diodore, tous les Libyens de la Cyrénaïque (5) , et selon d’autres leurs femmes seulement (6), s’habillaient de peaux de chèvres; d’où il suit incontestablement que les (i) T hrige, Hist. Cyren. p. 257. . (2) Hérod. 1. IV, 186. (3) Synes. Epist. 147, p. 267. (4) Hérod. 1. IV, i 55. . (5) Diod. 1. IV, c. 4. (6) Hérod. 1. IV, 189.


27f 59
To see the actual publication please follow the link above