Page 110

27f 59

très-portatif ; mais les précieux documents qu’ils renferment sur cette contrée, me les rendent indispensables. Des pieux en fer pour remuer de gros blocs de pierre, des bêches pour faire des fouilles, de longues cordes pour descendré dans les puits, des caisses, des tentes et des tapis, composent le reste de mon équipage. Ces objets doivent passer, pièce à pièce, du fond des grottes sur le dos 'des chameaux. Quelquefois la charge est à peine à demi faite, qu’une forte pluie survient; on se hâte de replacer le tout dans la caverne, et l’on attend le beau temps. D’autres fois 011 est en marche; l’orage survient encore, mais alors on doit l’essuyer. Je me moque un peu à mon tour des grimaces de mes domestiques; il faut entendre leurs exclamations; il faut voir le brave Abd-èLAzis se taire, et n’en penser pas moins. Mais terminons ces frivoles récits, et arrivons, par la pluie ou par le beau temps, il n’importe, à Sqffhèh, situé à une heure et demie à l’ouest de Djaus. Un édifice élevé a attiré de loin mon attention; je m’en approche, et je trouve encore les restes d’une tour antique; les ruines du village ne m’offrent non plus rien que je n’aie déjà vu; toutefois des excavàtions d’une disposition nouvelle me dédommagent en partie de ces tristes et continuelles répétitions. J’ai déjà fait remarquer autre part de petits monticules perces horizontalement; ils m’ont paru former de cette manière des mausolées populaires, humbles mais indestructibles et derniers asiles pour la classe la moins aisée des Cyrénéens. Je retrouve ici, dans un sens inverse, au liéu de ces monticules qui s’aperçoivent de loin, des creux irréguliers faits dans la plaine à quinze ou. vingt pieds de profondeur. De petits tombeaux sont taillés dans leurs parois circulaires ; au milieu est un tapis de verdure, et des degrés ménagés çà et là aident à y descendre. Au-dessus de ces excavations sont d’autres emplacements sépulcraux destinés à des funérailles plus somptueuses. On y voit, tantôt un sarcophage placé isolément dans une enceinte découverte ; et tantôt, avec, les mêmes détails, on y remarque des voûtes qui, malgré leur forme en ogive, n’ont cependant nullement le caractère sarrasin (Voyez pl. XV , 2). • , L ’examen de ces restes d’antiquité ne nous retient pas long-temps à Saffnèh, et nous poursuivons notre route dans l’ouest, nous détournant toutefois de quelques degrés vers le sud. Des renseignements nous oiit engagés à prendre cette direction, qui doit nous conduire auprès de ruines plus importantes. La plaine que nous parcourons est partout dépouillée de forêts; les lentisques et les térébinthes sont les plus grands arbustes que nous y rencontrons; le derias bisannuel continue d’élever çà et là, au milieu de ses larges feuilles luisantes et découpées , de longues tiges où brillent des capsules argentées, dont nous détournons toujours attentivement nos chameaux étrangers à ce Sol. Après une heure et demie de marche nous arrivons au lieu indiqué 3 à Ghernès, petite ville antique dont le grand nombre d’édifices encore debout frappent notre vue habituée à ne rencontrer le plus souvent à leur place que des pierres éparses. On aperçoit d’abord sur une colline deux élégants mausolées construits immédiatement au-dessus d’une grotte sépulcrale (Voyez pl. X X IV et X X V , fig. 2 et ses détails). Plus loin, auprès des traces d’un grand monument, est une porte, dont Farchitrave est ornée d’un vase en relief (Voyez pl. XXV, fig. 3). Plus loin encore, dans un bas-fond, on voit un château entouré d’un la rg e . fossé ; e t , à quelques pas de distance, les ruines assez bien conservées d’anciens bains. Ces bains sont remarquables par des voûtes semi-sphériques qui terminent, tant horizontalement qu’au sommet, de petites pièces carrées enduites de ciment à. citerne intérieurement, et de plâtre extérieurement. Cette disposition et ces détails, et surtout de petits soupiraux pratiqués dans la partie supérieure dès voûtes, offrent une ressemblance frappante avec les bains que l’on voit dans l’Orient (Voyez pl. XXIII et XX V, fig. 1), et portent à croire que ces ruines appartiennent à la période arabe, d’autant plus que celles de la ville même ont des caractères qui sont relatifs à la même période. Les maisons bâties en belles assises ont conservé presque toute leur hauteur, et ne sont distantes entre elles que de deux ou trois mètres. De cette proximité des domiciles , et de leur élévation très- grande en raison de leur peu de superficie, il résulte qu’ils ne peuvent remonter à une époque bien reculée. L ’usage des chars, anciennement répandu dans toute la contrée , aurait empêché les Cyrénéens de construire leurs villes dans le système oriental actuel. Ce système ne peut donc avoir été introduit dans la Cyréna'ique que par les Sarrasins.


27f 59
To see the actual publication please follow the link above