marchands me font asseoir sur un divan qui est fort misérable. Z... se tient respectueusement à ma gauche, mais debout. Bientôt arrivent d’une chambre voisine deux autres Circassiens plus jeunes, de vingt-cinq à trente ans. Ils ont l’air assez dur, sauf le plus jeune. Ils ont le regard sévère, ils portent de grandes moustaches et un long poignard à leur ceinture. Quand ils sont au grand complet, l’un d’eux va frapper à la porte de l’appartement qui renferme les femmes ; la porte s’ouvre, les Circassiens s’arrêtent pour me laisser passer, et j ’entre le premier. Cet appartement a pour tout meuble, des nattes étendues sur le sol et une sorte de moustiquaire appliqué le long bu mur. Dans le fond, je remarque huit jeunes filles, debout, appuyées comme des statues contre le mur. Elles sont assez mal vêtues, cependant elles ont fait leur toilette. Ces malheureuses ont l’air timide et craintif, mais elles ne paraissent pâs avoir peur de moi. Z... prétend qu’elles voudraient être achetées. ' Au moment où j ’entrais dans la chambre des esclaves,- j ’éprouvais une violente émotion; mon coeur battait avec force. Je savais que j ’allais voir quelque chose de dégradant, et puis ces quatre marchands ont quelque chose de Croque-mitaine. D’un côté, il y a sept esclaves; de l’autre, une toute petite fille de sept ans environ. Je les examine toutes, puis après avoir surmonté mon émotion, je lui demande le prix de la plus âgée. Ces pauvres filles avaient mis leurs plus beaux habits; malgré cela, comme je l’ai déjà dit, leur accoutrement n’était pas riche. Toutes ces esclaves tiennent à être achetées, car alors, comme elles tombent toujours dans les mains de gens riches, leur sort est heureux. Ainsi les Turcs et les riches Arabes achètent une jeune fille blanche ou noire, à l’occasion du mariage de leur fille, afin qu’elle ait une compagne. D’autres fois, ils achètent une esclave jeune pour la faire élever et la marier à leur fils. Toutes étaient très-blanches ; je n’ai point voulu examiner leurs seins, leur bouche, leurs narines, ni leurs organes génitaux. Celle que j’avais choisie, avait une figure maigre, mais intelligente ; à côté d’elle, il y en avait une qui n’était pas mal; une autre était assez grande, mais elle avait la figure commune. J ’ai dit au marchand que je n’en trouvais aucune à ma convenance. Le prix de celle qui me convenait, était de trente cinq bourses, trois mille cinq cents francs. J ’ai regardé encore, et j ’ai fait signe au marchand de passer dans la pièce à côté. Là j ’ai dit que c’était cher, que cette somme n’était rien pour moi, mais que je n’en trouvais aucune à ma convenance ; j ’ai demandé si on n’avait rien de mieux à me présenter, on m’a répondu négativement. Comme je n’offrais aucun prix, les marchands ont dit qu’ils comprenaient bien que j ’étais venu, seulement pour voir, non pas pour acheter. J ’ai répondu que j ’ache- terais, si je trouvais quelque chose de joli. Z... ma dit que j ’aurais dû offrir quinze bourses; je n’aurais pas osé, dans la crainte qu’on ne me laissât la marchandise sur les bras.
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