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Damiette m’apparut d’abord en l’air, puis peu à peu elle s’abaissa, mais elle lue semblait presque sur le rivage. En descendant à terre, je constatai que j ’avais été victime d’une illusion. Dans mon voyage à l ’isthme, j ’ai remarqué que les objets paraissaient très-rappro- chés ; j ’attribue ce phénomène à la grande transparence de l’air. Un fait analogue se produit dans les pays de montagnes ; ainsi, quand pour la première fois je visitai les Pyrénées, je croyais les montagnes très-rapprochées lorsque j ’en étais encore à une grande distance ; l ’habitude corrige cette erreur d’appréciation. Tous ces faits reconnaissent une même cause*': la grande raréfaction de l’air. En effet, l ’air est plus raréfié dans les montagnes que dans les vallées ; il l ’est aussi beaucoup au niveau du sol, dans les pays chauds,' mais j ’ai vu, à Damiette, l'air trembloter par échauffement à trente et quarante pieds encore au-dessus du sol. J ’ai cherché, pendant mon voyage, l’explication des faits que j ’observais, mais sans pouvoir y parvenir.^. D’ordinaire, quand on regarde à l’horizon en plein Océan, et qu’un navire se montre, on aperçoit d’abord le haut des mâts, les cordages et les voiles, puis enfin le vaisseau lui-même ; il en est de même des tours et des phares qu’on peut rencontrer. Le navire, la tour, le phare ne sont vus en entier que lorsqu’ils sont sur la ligne de l’horizon. Dans les lieux où se produit le mirage, c’est tout le 'contraire qui arrive. L’objet que l’on aperçoit ne semble pas sortir de l ’eau, il apparait réellement en l ’air, ce sont les parties supérieures qui sont vues les premières avec une grande netteté. Tandis qu’un navire qui vient vers vous, en mer, paraît s’élever, il y a dans le mirage un phénomène inverse^ L’objet vu d’abord en l ’air, croit de haut en bas, tout en gardant la position qu’il avait auparavant. Le navire qui s’élève au-dessus des flots, s’élève réellement, il change de place, l ’objet aperçu dans un lieu où il y a mirage, ne change pas de place ; il est toujours en l ’air, mais il croît jusqu’à ce qu’il soit complet. Les maisons sont en l ’air, les parties les plus élevées se voient les premières, et quand le phénomène est complet, quand la série de maisons qui composent une ville est toute visible, alors la ville paraît en l’air. La base de toutes les maisons est sur une ligne horizontale. Une bande d’air semble séparer la base des maisons de la ligne d’horizon, mais la base des maisons n’est nette que quand on voit la maison tout entière. A mesure qu’on se rapproche, l’ensemble des maisons semble descendre vers la ligne d’horizon, et après quelque temps, les maisons reposent sur l’eau. Puis on aperçoit la terre et la ville sous son véritable aspect. Un fait notable, c’est que par l ’effet du mirage, les objets s’aperçoivent à une grande distance et avec une netteté qu’il est difficile d’imaginer. Ainsi, quand je voyais Port-Saïd en l ’air, je distinguais parfaitement la couleur des toits, des chalets, du pavillon d’un navire. Or, ce dernier était à trois ou quatre kilomètres en dehors de Port-Saïd. La langue de terre sur laquelle est bâtie la ville a 750 mètres environ, et comme je la voyais obliquement, elle devait avoir la moitié au plus, mais


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