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Mais voici le mirage qui va commencer. A mesure que nous nous éloignions, Port-Saïd, au lieu de diminuer de bas en haut en paraissant s’enfoncer dans l’eau, paraissait s’élever en l ’air. Les maisons semblaient s’élever en totalité, sans présenter la moindre déformation. L’atmosphère paraissait s’engager entre la ligne d’horizon formée par l’eau et la base des maisons. Cette bande d’atmosphère avait la couleur, l’aspect, la diaphanéité de l’air. Ce phénomène a été croissant jusqu’à ce que la bande d’atmosphère finît par égaler la moitié de la hauteur des chalets (je parle de souvenir, car cette mesure ne m’a pas préoccupé au moment même ; d’après mes.dessins, elle me semble exacte). Quoi qu’il en soit, il y eut un moment pendant lequel le phénomène resta stationnaire : Port-Saïd était en l’air, les bâtiments les plus élevés paraissaient les plus élevés, les maisons n’étaient pas renversées, mais la ville semblait avoir été élevée en l ’air, tout d’une pièce, et comme si une bande d’air s’était interposée entre la ligne d’horizon formée par l ’eau et la base des maisons. En quittant Port-Saïd, je ne pouvais voir les mâts des navires ; eh bien, alors ils devinrent distincts et je les apercevais, avec ma longue-vue, bien entendu ; je distinguais même les cordages et le pavillon. Les couleurs m’apparaissaient avec leurs nuances, et je voyais surtout la couleur rouge qui terminait un pavillon tricolore. Les maisons, les chalets se présentaient avec leurs contours, avec leurs détails,. leurs couleurs. Mais bientôt la base des maisons, des chalets, de tous les autres bâtiments, a cessé d’être distincte. Au lieu d’une ligne nette, j ’avais une ligne diffuse. Je dois faire observer que sur la surface de l’eau, sur la ligne d’horizon, je ne voyais pas l ’air vibrer comme l ’air échauffé ; les maisons n’étaient point tordues comme quand on les voit a travers une couche d’air échauffé, elles ne tremblotaient pas. Or, ce phénomène de tremblotement est constant quand on aperçoit un objet à travers une couche d’air échauffé; les lignes droites sont alors tordues. A mesure que nous nous éloignions, l ’air paraissait gagner sur la base des maisons. Le sommet, les lignes des toits étaient très- nettes ; seule, la base était diffuse dans la partie où elle était continue à l ’air. Les parties les plus élevées sont celles qui sont restées distinctes les dernières ; ainsi le sommet du phare, du minaret, le pavillon tricolore dont j ’ai parlé, ont disparu les derniers, puis tout a disparu. Il était onze heures et demie, j ’avais quitté la ville à six heures du matin,, soit cinq heures et demie auparavant. En arrivant à Damiette à trois heures, j ’ai aperçu d’abord le sommet de la mosquée vers le nord-est, puis vers l ’est, mais plus au sud, les palmiers. A mesure que j ’avançais, la mosquée et les arbres devenaient plus nets, mais de.haut en bas. Enfin, il y eut un moment où la mosquée et les arbres paraissaient être en 1 air et séparés de l ’eau par une bande d’air. Puis, autant que je puis me le rappeler, la mosquée sembla s’abaisser pour arriver au niveau de la ligne d’horizon formée par l’eau, et la terre apparut au-dessous d’elle ; mais cette ligne de terre était fort amincie.


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