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le mahmal le transportent sur le dromadaire. L’animal s accroupit, et je remarque qu’il ne grogne pas quand on le charge, puis il se lève, et la musique se fait entendre de nouveau. Quatre dromadaires, montés par le derviche et trois pèlerins, viennent derrière lui. Quand tout est organisé, le cortège se met en marche. Pour élargir les voies, les cawas distribuent de temps à autre de grands coups de bâton. Les Arabes .les reçoivent sans se plaindre; bien plus, ils semblent comprendre que les coups de bâton'sont l’accompagnement obligé de la fête. Au moment où le cortège s’éloignait, une autorité quelconque lance à la foule, qui s’est approchée du kiosque, de petites pièces d’or de cinq piastres égyptiennes, me dit-on. Tout le monde se précipite pour les ramasser, mais les cawas, qui étaient tout prêts, font pleuvoir une grêle de coups de bâton sur les plus avides. L Arabe'battu se relève, mais s’il se baisse encore, de nouveaux coups l ’atteignent. Cette mêlée, en public est très-drôle et fait la joie des spectateurs, pour lesquels une fête sans.coups de bâton serait dépourvue d’intérêt. Ce fait peint bien les moeurs du pays; les habitants sont habitués dès l ’enfance à recevoir des coups et à ne pas s en formaliser. Les cawas avaient beau jeu, car les victimes leur tendaient l’échine de bonne volonté. Nous quittons la gare pour aller nous rafraîchir ; nous” demandons ensuite à plusieurs Arabes de quel côté s’est dirigé le cortège, mais ils essayent de nous tromper; ils nous regardent de travers. Nous recevons une pierre sur la capote de notre voiture, ce qui paraît singulièrement effrayer M. Coulomb, dont la bravoure ne semble pas exagérée. Les passants, nous dit-on, nous appellent « chiens. » Il y a trois ans, un officier de la marine française s’était arrêté, pour voir le cortège du tapis, dans une des rues du Caire qui avoisinent la citadelle. Il fut rencontré là par de fidèles croyants qui le bâtonnèrent d’importance; il ne dut son salut qu’à l’intervention d’un Arabe qui le fit entrer dans sa maison. L’affaire fit grand bruit ; l’officier avait été abîmé et fut longtemps à se rétablir; on pendit le coupable, c’était justice. Au Caire, il n’est pas difficile de trouver un criminel, les individus étant divisés par corporations et chaque corporation ayant un cheik. Dopeli, 2 6 fév r ie r 1862. Nous rencontrons dans la grande rue qui mène à Set- tisenap, le cortège des gens qui vont au Dopeh. Pour ne pas me répéter trop souvent, je laisse de côté les détails pour ne parler que d’un fait qui m’a frappé. A un moment donné, un mouvement inaccoutumé s’est produit dans la foule, les Arabes se couchaient à terre. Un de mes compagnons, qui voyait mieux que moi, m’a assuré que l’on forçait bien des gens à se coucher à grands coups de bâton, et qu’on les maintenait à terre avec les pieds. Suivant l ’usage, on éreintait le derrière de ces malheureux en attendant le passage du cheik. Plusieurs cheiks ont passé sur les hommes couchés pour s’assurer que tout allait bien, et que le cheval pourrait avancer sans crainte. J ’ai vu ensuite des individus mar


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