La favorite servait la femme légitime, elle est restée debout pendant toute la réception, de même que toutes les autres femmes présentes, excepté, bien entendu, les visiteuses. La femme légitime a dit qu’elle ne fumait pas, suivant l’habitude des Européens. Cependant elle avait les dents fort noires ; peut-être leur donne-t-elle cette couleur avec de la teinture. Comme on parlait du sort des femmes en Orient, elle a dit qu’on était loin en Europe de connaître les pleurs du harem. Ce mot semble prouver que les femmes d’Orient commencent à souffrir de leur état de. passivité et qu’elles sont malheureuses de n’être que des instruments de plaisir. La favorite est fort bien, elle avait les cheveux coupés courts comme les autres femmes. Elle ne portait sur elle aucun bijou. Bien que mise simplement, elle avait une très-belle robe. Elle servait le café à sa maîtresse et aux visiteuses. Des dames sont venues, accompagnées de trois petites filles fort jolies, de dix ans environ. Elles ont dansé des pas fort lascifs ; elle se contournaient en arrière et de côté, se ployant complètement ; puis, à plusieurs reprises, elles ont fait des cabrioles. Elles faisaient aussi saillir leur ventre en avant. Toutes ces danses étaient bien au sens de la musique. A terre, il y avait quatre vieilles bouffonnes qui amusaient la société. La femme légitime a dit à madame K... que,si elle voulait emporter une collection d’antiquités en Europe, ellejui ferait cadeau des quatre vieilles. Dans ce harem, il y avait en tout seize femmes. Les appartements étaient meublés à l ’européenne. Madame K... a vu une pendyle sur une console. Il y avait aussi un piano, car la maîtresse et la favorite vont apprendre à jouer de cet instrument. IV IN F I D É L I T É S DE S F EMME S D E HAREM Si les femmes de harem n’étaient pas surveillées par les eunuques, elles se donneraient au premier venu. Ainsi madame X... raconte qu’un menuisier maltais, âgé de dix-huit ans, travaillait dans le jardin d’Ismaïl- Pacha. Une des femmes (elle me dit une princesse) s’étant mise à la fenêtre l’aperçut et lui fit signe d’approcher. Lorsque le jeune homme fut arrivé près de la fenêtre, elle lui jeta un mouchoir brodé. Le Maltais ramassa le mouchoir, puis il lança une orange à la femme. Un eunuque étant survenu, la femme n’eut que le temps de disparaître au plus tôt, et le Maltais en fit autant. Sans cela, la malheureuse aurait été fort maltraitée .par l’eunuque. L... Bey me raconte deux avantures galantes qu’il a eues : Un jour, avant son mariage, il se promenait à cheval, habillé à l’égyptienne, le sabre au côté, quand il fut atteint par une voiture conduite par un eunuque. Une roue lui ayant légèrement écorché la jambe, le bey se met en grande fureur ; il crie, il tempête, il injurie l’eunuque en montrant la plus grande audace. Aussitôt la
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