pied à torro pour lui embrasser labolle, lo supplie : « Par la tête de Ion père, ne fais pas cetto folio d’attaquer. » Lo fils de Saint Louis riposte:. « Ceux de ma raco no reculent jamais. » La charge sonne. Morris à droite, Yusuf à gauche, lui au centre, la poignée de braves tombe comme la foudre sur l’ennemi surpris. Tout est balayé. Pas assez en nombre pour la prendre ontiôre, on coupe la zmala eu deux et s’empare de 1a moitié. L’émir ne doit son salut qu’à la vitesse de Sa monture. 11 laisse sur lo terrain 300 cadavres, 3.000 prisonniers, un immense butin. Il y laisse Surtout son prestige. L’affaire nous a coûté neuf tués, douze blessés, vingt-huit chevaux. Et quand l’infanterie avec l’artillerie arrivèrent, hors d’haleino, ayant couvert Ironie lieues en trente-six heures, sans puits, elles n’avaient pas laissé en arrière un traînard ni perdu un mulet. Ce succès, pivot sur lequel évolua, pour biontôt s’effondrer, la puissance du grand rebelle, était dû au sang-froid, à la décision, à l’énergie du duc d’Aumale. Car il n’y faut pas voir seulement le coup de tête d’un intrépide jeune prince, impatient de gagner ses éperons. Folie, soit. A la guerre folie souvent est sagessse. La retraite — je tiens cette opinion de feu mon vieil ami le général du Barail qui, sous-lieutenant, y fut blessé — était plus périlleuse que le combat. L’éveil donné à l’émir, pas un hommo peut-être de la colonne morcelée n’eût échappé. C’était question do vaincre ou mourir. Pour l’avoir compris, ce fils de roi a justifié ce qu’en disait son chef: « Décision prompte, courage entraînant, corps infatigable, amour du travail, le tout dirigé par une haute intelligence et un ferme bon sens ». II s’y connaissait, Bugeaud --î Bou-el- Nessra, « le Père de la Victoire ». Qui a eu l’honneur d’approcher le duc d’Aumale, d’autre part accompli par le charme de son esprit, la profondeur de sa culture, la séduction de sa personne, no saurait que ratifier un jugement aussi autorisé. Epris de poésie, l’Arabe abonde en qualificatifs, hyperboles, métaphores. Il amplifie tout nom d’un surnom. Boghar, c’est « le Balcon du Sud ». Si en effet, surtout de la vieille tour du télégraphe optique, la vue embrasse les monts et les vaux du Tell, de l’autre côté elle s’étend Sur le désert, déroulant son tapis fauve semblable à une peau de lion. Dans le flot do lumière orangée dont le baigne le couchant, on me montre le ruban à peine sensible qu’y dessine la piste sur laquelle demain je m'élance à la découverte du Sahara. Et de vivre mon rêve obstiné je me sens comme oppressée par une émotion où met sa note mélancolique le mystère des profondeurs infinies. CHAPITRE IV LE SAHARA D’ALGER Avant de monter en automobile on trouve une égoïste satisfaction à regarder le départ de la diligence. D’où les entreprises de messageries algériennes ont-elles pu tirer ces falotes guimbardes, qui déjà devaient être réformées aux temps préhistoriques des « Laffite et Caillard? » On se demande avec effroi comment tiendront le coup cette carcasse déjetée, ces ferrailles disloquées, ces ais disjoints, ces roues branlantes. Par quel phénomène de compression contiendra- t-elle ce qui s’y enfourne de voyageurs, pressés comme sardines en boîte? Indigènes pour la plupart, il est vrai, ayant l’habitude des postures recroquevillées. Mais ces mobilisés qui rejoignent... Est-ce l’effet du cou nu, de la veste si courte, qu’ils sontdonc gros, les zouaves territoriaux. Et toujours il en arrive, il en arrive, et même, correctement voilées, des moukères portant un enfant, une couple do couffins. Sur le toit, un entassement de colis à frémir. Miracle que ne s’effondrent point ces planches délabrées. Et toujours on en ajoute. Jusqu’à un panier de poisson, suintant sa glace fondue, qui déjà a fait un bon bout de chemin et va à Ghar- daïa. Cinq cents kilomètres par celte voie rapide, sous le soleil africain !... Autant l’abandonner à lui-même: il serait assuré d’arriver par ses propres moyens... Faute d’autre place, une femme européenne escalade intrépidement les marche-pied jusqu’au siège du conducteur, au niveau des bagages. Il semble étroit déjà pour ce volumineux personnage. Adossée à une barre de fer, ses pieds reposent sur une planchette vacillante. Elle se couvre la tête d’une mantille et paraît très satisfaite de son sort. Moins heureux ce maigre Espagnol couleur cuir de Cor- doue, arrivé au tout dernier moment. Mais on s’arrange toujours. Impavide, par un rétablissement des poignets il se hisse au sommet de la pile, y étend sa couverture bariolée, s’y assied
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