lyrienne d’ailleurs ne fut jamais qu’un comptoir maritime appuyé sur un liinterland, mais qui possédait au long du littoral de filiales nombreuses, jusqu’à Tingis et Sala, les Tanger et Rabat d’aujourd’hui. Vint le grand Massinissa et sa lutte acharnée contre Syphax. La littérature tragique en a retenu l’épisode de Sophonisbe, fille d’Asdrubal, princesse déplorable qui paya de sa vie l’adultère malgré elle dû à la foi punique, la donnant, selon l’intérêt de l’heure, à l’un puis à l’autre des antagonistes. Massinissa enfin l’emporte. Cotte Cirla qui lient de l’empereur Constantin son nom moderne — Ii’sanlhina sous la forme arabe — se fait gloire que le vainqueur y ait placé sa cour brillante, où fleurissaient les civilisations grecque et latine. Quand, après un demi siècle de règne, il laissa ses Etats partagés entre ses trois fils Micipsa, Adherbal et Iliempsal, commence, ou plutôt recommence l’anarchie qui sera endémique deux mille années durant. Tout en s’entredéchirant, les Numides prennent parti pour Marius ou Sylla.j César ou Pompée, Antoine ou Octave. Jugurtha les réunit de nouveau en un faisceau qui brave les légions. Epopée immortalisée par Salluste. Elle finit avec le héros, qu’a livré la trahison et que les vainqueurs laissent mourir de faim en son cachot. Dès lors, morcelée entre de nombreux princes asservis à Rome, la Numidie reprendra un semblant d’unité sous Juba II, élevé dans le palais d’Auguste et l’époux de Séléné, fille d’Antoine et de Cléopâtre. Après lui, nouvel affaiblissement. Les trois premiers siècles de notre ère voient la prospérité de la province romaine d’Afrique. A son tourelle périclite. Les Berbères se réorganisent sous forme fédérative. Très intense était la vitalité de ce peuple qui depuis a perdu jusqu’à son nom, ne survivant que chez une énergique tribu de l’Atlas marocain. C’est alors l’incursion des Vandales venus de l’Ibérie. Ils s’accordent avec la populalioùjndigène, comme eux attachés à l’hérésie du LybienArius. Au demeurant ne pénètrent-ils point l’intérieur. Genséric règne cinquante ans à Cartilage, d’où il va mettre Rome à sac. Mais dans ce climat amollissant se perdent les vertus guerrières des barbares. Hildéric n’est plus qu’un vassal de l’empire ¿’Orient. Vainement Gélimer s’efforce-t-il de maintenir le royaume goth d’Afrique. Il est balayé par les Grecs.. Antalas tente de faire renaître l’indépendance numide. Justinien envoie contre lui Bélisaire. Le protectorat byzantin s’établit, s’armant de forteresses dont des vestiges subsistent auprès des ruines romaines. La persécution des donatistes — le nom de cet évêque schismatique est conservé par une localité voisine de Constantine — provoquejun Soulèvement formidable. Le palrice Salomon en a difficilement raison. Dévastation, massacres. Selon Pro- cbpe, au cours de ces guerres cinq millions de Berbères auraient péri. Enfin se produit ce considérable fait historique de l’invasion musulmane, qui, partie des sables de l’Yemen_et du Hed- jaz, ne sera arrêté qu’à Poitiers par la chevalerie de Charles Martel. L’Islam à cette heure est tout neuf. Voici quelque douze ans que le Prophète a. été ensevoli à Médine, en cette petite chambre carrée, tendue de riches étoffes, où désormais, sans jamais s’éteindre, l’huile parfumée brûlera dans des lampes d’or. Son cercueil en bois de cèdre revêtu de larmes d’argent repose entre ceux de son beau-père Abou-Bekr, de sa fille Fatma et d’Omar, le premier khalife. Une tombe ouverte y attend le fils Méryem, Sidna-Aïssa, qui — les Juifs ayant crucifié un faux Jésus — est remonté vivant au ciel pour en redescendre au jour du Jugement. Si vraiment « Islam » signifie l’action de s’abandonner à la volonté d’Allah — l'Informé, le Perspicace, le Distributeur, Il est Unique — cette aveugle soumission du m'slem « le résigné », en donnant naissance au fatalisme n’a pas tout d’abord engendré l’indolence qui en est la soeur jumelle. Car la ruée de l’Orient sur l’Occident fut de sauvage énergie. Vers 644 se place, sous la conduite d’Amr-Ibn-el-Asr, la première razzia, chassant les Grecs de la Cyrénaïque. Puis Abdallah-ben-Zobéir s’empare de « Carthadjina » aux portes de laquelle est tué le patrice Gré- gorius, que les Arabes nomment Djoredjir. L’an 46 de l’hégire, qui est notre 667, entre en lice le grand conquérant Okba-ben-Nafi. Avec lui le flot submerge toute PIfrykia, du golfe de Gabès au cap Spartel. Non sans luttes. Il faut trente ans pour que, dit l’historien Ibn-Khaldoun, « la liberté de la Berbérie descende au sépulcre, d’où elle ne devait sortir ni à la troisième aurore, ni à la troisième semaine, ni à la troisième année. »Encore les fils des vaillants Numides sont-ils vaincus, non domptés. Des soulèvements ravagent cette terre saturée de sang. Mouvements religieux parfois autant que nationaux. Car si les Berbères ont embrassé l’islamisme, c’est dans ses schismes. Prophètes et mahdis se manifestent chez eux, engendrant des sectes sans nombre. Nul peuple ne'fut aussi versatile en matière de foi. Après avoir adoré les divinités phéniciennes, puis sacrifié àcelles du paganisme romain, renonçant à Jupiter et Vénus comme à Tanit et Baâl, ils étaient revenus à leurs dieux primitifs : Siniferna, celui de la guerre, Mastinon, sorte de Moloch. Des tribus juives immigrées lors des persécutions de Caligula.et de Sévère leur avaient apporté le monothéisme mosaïque. Volontiers ils s’étaient faits chrétiens, et au xiu8 siècle il s’en trouvait encore parmi eux. Celte résistance exaspérait les khalifes de Bagdad, suzerains des émirs et oualis d’Ifrykia, ces Abbassides dont la puissance 0 : Haroun-al-Reschid ne traita-t-il point de pair avec Charle- magne? — dura jusqu’à l’effroyable invasion mogole qui fit de l’Asie un charnier. L’un de ces commandeurs des Croyants se résolut à envoyer contre d’aussi obstinés rebelles «une armée dont la tête de colonne serait déjà chez eux alors que l’arrière-garde se trouverait encore chez lui. » Légère exagération sans doute : les Orientaux sont des Gascons graves. Tant il y a qu’en ce temps une épouvantable saignée semble avoir été décisive. Les vaincus dès lors s’associèrent aux vainqueurs. Quand les Arabes sont appelés en Espagne par le comte Julien, ils ont pour compagnons d’armes les Berbères. C’est à un chef de ceux-ci que doit son nom Djebel-Tarik, devenu
27f 123
To see the actual publication please follow the link above