dont les conques laiteuses à pistil d’or exhalant une odeur de citron, en se reflétant dans l’eau morte, donnent l’harmonie faite de bleu sourd, de vert froid, de blanc ambré, avec de légères touches jaunes, qui est celle de la céramique arabe. Au demeurant, que sert de savoir où l’on va? Plutôt vaguer à l’aventure et découvrir des sites dont on ignore les noms, moins encore, do ces aspects accidenlols des choses qui ne se décrivent point et sont pour l’oeil une caresse. Au creux d’un ravin, au flanc d’une hauteur, c’est une maison mauresque noyée dans les verduresduisantes. Sa blancheur à aveugler se drape du manteau rutilant d’un bougàinvillier violet ou couleur de feu, de la douceur d’une pâle glycine, de la grâce frêle d’un jasmin. Moitié bordj, moitié villa, ancienne demeure de plaisance, dont étaient bien défendus les trésors et les femmes, d’un de ces boucaniers qui, entre deux croisières de sang et de rapine, s’y vautraient dans le luxe oriental fait de joyaux, de parfums, de riches étoffes, de fleurs, de fraîcheur et de voluptés. Aujourd’hui exploitation où un laborieux colon cultive en primeurs tomates et petits pois. Cette nature africaine est toute en contrastes. Vous descendez une sente sinueuse, profondément encaissée entre des talus calcinés, semblant taillés dans un bloc de porphyre, que couronnent les larges raquettes épineuses des figuiers de Barbarie. Le désert lointain vous souffle à la face l’haleïne brûlante du sirocco. Un tournant et vous débouchez sur un petit pré frais où rêve une cigogne, gravement perchée sur une de ses échasses roses. Une humble métairie arabe, cube de plâtre percé d’entrées de pigeonnier, des lainages de couleurs vives séchant sur une haie de roseaux empanachés de gris, de ces poules algériennes au cou déplumé qui s’effarent, un chien méfiant qui vous guette, une chèvre accrochant ses longues soies rousses au buisson qu’elle ravage, un adolescent bronzé et nu dans sa gandoura, nonchalamment occupé au teillage de fils d’aloès, un gros figuier, une treille, un puits... Coin perdu. Nul n’y va ni n’en vient. On ne sait comment on y est arrivé, c’est avec peine qu’on en sort. C’est exquis. Et te croissant délié de la' jeune lune qui doucement se lève par-dessus les frondaisons légères d’un bouquet d’eucalyptus s’échevelant sur le ciel verdissant, d’une divine pâleur. Des riens: un groupe de pins d’un vert intense au- sommet d’une crête d’un rouge ardent, une dégringolade d’yeuses dans une gorge sombre, un palmier surgissant auprès d’une coupole blanche, pareil à une aigrette sur un turban... Et l’on, songea cevôÿageur que d’Annunzio nous montre, retour de contrées de splendeur, et qu’émeut la simple vision « d’un maigre’cyprès florentin à l’orée d’un bois d’oliviers ».
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