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leur provende, chameaux accroupis, chiens faméliques et farouches, enfants demi-nus se vautrant dans le sable, pêle-mêle avec les chèvres familières en quête d’une problématique pâture, femmes portant de l’eau dans des jarres de terre peinte aux formes archaïques — parfois hélas! leur sont substituésde vieux bidons à essence abandonnés dans le désert par des automobiles... Ce patriarche aux yeux morts dans sa face émaciée et terreuse allongée d’une barbe blanche qui, jambes croisées siir le seuil de sa maison de laine, du mâtin âù soir égrène son chapelet en noyaux d’olives... Au pas il reconnaît une roumia et la salue d’ün courtois « bonjôr, madame ». Vie primitive, rudimentaire, niais lumineuse sous le soleil de Dieu. Aigu et grêle, l’appel mystiqué monte du haut minaret. L’heure bénie est venue où le roi du désert va s’engloutir dans l’océan des sables.' Spectacle dont chaque jour on s’émerveille : la grande onde fauve s’accentuant en orangé, une violente explosion de pourpre, un passage exquisement subtil de vert citrin — Panéantissemènt enfin dans l’indigo profond de la nuit. lillftf t ^ Je serais désolée si, au cas où ces lignes tomberaient sous leurs yeux, certaines appréciations du caractère national offensaient mes amis arabes. Un jugement fût-il erroné, son mérite essentiel est d’être sincère; aussi ne saurait-il se laisser influencer par des sympathies personnelles. La détermination d’ailleurs des lignes générales d'un type ethnique laisse beaucoup de jeu aux individualités. Parmi les bons souvenirs emportés dé Touggourt je dois mentionner celui du cadi Koraïschi. Originaire de Cohstanline, sa parfaite connaissance de notre langue, les ouvertures de son esprit s’alliant à la coutumière bonne grâce indigène m’ont rendu fort agréable son commerce. Et je ne dois oublier ni sa maison élégante et nette, où des gazelles privées viennent manger dans la main, ni sa femme, avec qui malheureusement la conversation était faüe de gestes, de sourires et de bonne volonté, ni la timide et charmante Fatma- Zorah, qui a fait ses études à l’ecole française, et à qui son père laissé une demi-liberté lui permettant dé fréquenter dans les ménages militaires. Céla- est bien que les filles de bonne famille arabe secouent l’héréditaire torpeur intellectuelle comme physique dé leur sexe, qu’elles prennent des clarlésde la culture qui domine le môndey qu?elles s’affranchissent de l’excès des contraintes entravant leur développement naturel. La société indigène ne saurait que gagner à cette adjonction de forces. Mais qu’Allah les préserve d’abandonner leurs costumes somptueux. Parlant sérieusement, il est à souhaiter qu’elles demeurént en accord avec le caractère de la race, sans même rejeter peut-être certains de ces préjugés qui font corps avec l’armature des principes, lesquels elles ne remplaceraient point par les nôtres. Il semble peu expédient d’incliner la réforme de leur éducation à émuler leurs soeurs européennes. Non que je trouve nos


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