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étonnant qu’ils se soient soulevés d’eux-mêmes? Ne sait-on pas du reste qu’immédiatement après l’annexion d’Aoude l’emblème de la vengeance (fleur du Lotos) se colportait dans tous les régiments de Cipayes? Un autre motif de mécontentement existait depuis longtemps, c’était la tendance bien marquée du gouvernement de Calcutta à faire disparaître les castes, pour arriver ensuite àun nivellement religieux. Or, l’Indien consentirait à tout perdre plutôt que de perdre sa caste. Pour lui, ce serait renier ses dieux; renier ses aïeux, tomber plus bas que le paria, plus bas que la bête immonde ! Manou l’a écrit : « Celui qui perd sa caste doit être repoussé et insulté par les parias mêmes. » Disons-le donc, le complot était déjà arrêté; il se préparait, quand on distribua des cartouches graissées au 19" régiment indigène à Barrackpour. Ce régiment s’insurgea. On ouvrit une enquête à la suite de laquelle l’existence de la graisse, réprouvée par la religion des Hindous, fut reconnue; et dès lors on permit aux Cipayes de ne plus déchirer les cartouches avec les dents. On distribua des cartouches de même nature au 34e régiment; il s’insurgea aussi, et une tentative d’assassinat fut faite sur un officier et un sous-officier Européens. Le régiment rebelle fut licencié; mais la Compagnie continua à faire distribuer de semblables cartouches; alors on vit se développer le système des incendies : les casernes, lés hôpitaux brûlaient et la main incendiaire demeurait toujours invisible! Le 9 mai 1857, quatrevingt-cinq cavaliers du 3' régi— ment, qui avaient refusé de charger leurs armes, subirent la dégradation et furent mis aux fers devant les troupes assemblées. Ils étaient de plus condamnés à dix ans de chaînes. Le lendemain, c’était nn dimanche, à la tombée de la nuit, des cris affreux se firent entendre: les trois régiments sortent; la prison est forcée; les condamnés de la veille sont délivrés et dirigés sur Delhi, point de ralliement. Des Européens sont massacrés, et la nuit, éclairée de lueurs sinistres, est une longue suite d’incendies, de pillages, d’assassinats. Cependant les cavaliers ont pris les devants et gagné Delhi ; l’insurrection les suit. Nous ne rappellerons pas les horreurs que l’humanité eut à déplorer en ce moment : Delhi n’avait pas une seule compagnie d’Européens à opposer à l’insurrection; aussi s’y proclama-t-elle souveraine. Elle plaça le Grand Mogol à sa tête, arbora le croissant pour rallier les Indiens musulmans, et fit publier que la domination anglaise n’existait plus. Une lutte horrible, sauvage, s’engage alors ; le sang demande du sang ; la civilisation et la barbarie sont aux prises. Le dominateur arrogant et l’opprimé qui retrouve sa haine se prennent corps à corps et semblent vouloir se surpasser par leurs atrocités ! Delhi! Lucknao! Cawnpour! ces noms rappellent des scènes qui font frémir! Le 8 juin, au camp des insurgés, à Kalliampour, Néna-Sahib est reconnu pour chef. Sa devise est : Extermination de la race maudite, et il tient à justifier cette devise. La ruse, la trahison, le parjure, tout servit, en effet, 46


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