ce n’eft plus un enfant avoué de la Nature ; elle le tnéconnoit ; le repouffe, honteufe de fon propre ouvrage qu’ont défiguré d’autres mains. Après avoir interrompu fi long-temps le fil des petits, événemens de mon Voyage, pour établir une fois des aperçus certains fur ces Hotténtots trop peu connus jufqu’à nos jours, il manquerait quelque chofe aux éclairciffemens que j’ai donnés, fi je ne parfois, pas d’une efpèce particulière qu’on pourroit appeler compojite, & qui ne date tout au plus que d’un fîècle; je ne crois point qu’aucun Voyageur en ait fait mention. Cette nouvelle efpèce , un jour, en effacera d’anciennes, & l’époque de fa puiffance amènera fans doute de grands changemens dans la Colonie , & hâtera fa ¡1 ruine. La multiplication de ces individus , qui peut devenir infinie , devrait alarmer la politique des Hollandois ; mais elle dort & femble f e : foncier fort peu des conféquences funeftes de fon inertie. Je veux parler des enfans naturels provenus du mélange des Blancs avec les femmes Hottentotes, & de ces mêmes femmes avec les Nègres. On les nomme communément au Cap Bajlers ; cette dénomination appartient néanmoins plus particulièrement aux premiers , parce que les féconds font moins nombreux ; les Hottentotes ne fe livrant pas facilement aux Nègres, pour lefquels elles ont une forte de mépris, attendu, difent-elles, qu’ils fe laiffent vendre comme des bêtes , aulieu d’un autre côté qu’elles fe regardent comme honorées d’avoir un commerce avec les Blancs, & de porter le titre de leurs maîtreffies. C’eft cette race provenue de ces dernières unions qui gagne & multiplie confidérablement ; elle eft libre comme le Hottentot; mais elle s’eftime au-deffus de lui, malgré le mépris qu’on en fait au Cap , où l’on n’eft pas même dans l’ufage de les baptifer. Le caraÛère de ces individus tient plus de l’Européen que du Hottentot ; ils ont plus de courage, plus d’énergie que ce dernier ; le travail ne les rebute point ; en revanche , plus bouillans , plus entreprenans, ils ont plus de méchanceté; il n’eft pas rare de les voir affaffiner tes maîtres auxquels ils ont vendu leurs fervices; ce font eux encore plutôt que les Nègres qui fe déclarent les premiers machinateurs des trahifonsde toute efpèce qui fe commettent, chaque jour , fur les habitations ; le Hottentot trop doux , trop apathique pour fe livrer a des entre- prifes atroces, n’auroit pas même affez de force pour -fe charger de leur exécution ; les plus mauvais traitemens ne font point capables de lui en infpirer la penfée ; en un mot le Colon qui n’a chez lui que des Hotténtots à fon fervice , peut dormir tranquille, certain qu’il ■ feroit averti bientôt du danger , s il en étoit menacé. Le Bafter-Blanc eft bien fait, robufte ; fa peau d’un jaune plus clair que celle du Hottentot, a la couleur d une écorce de citron défféché ; la vue en eft défagréable. Ses cheveux font noirs plus longs & moins crépus; la communication des femmes de cette nouvelle fabrique rend, comme il eft naturel de le croire, une efpèce encore plus blanche dont la chevelure eft auffi d’autant moins frifée , & quoiqu’en allant toujours graduellement, il n’y ;ait plus à la fin de différence fenfible avec les cheveux & la blancheur de la peau des Européens , la proéminence des pommettes des joues fe fait toujours remarquer ; c’eft un caraâère indélébile qu’on reconnnoît jufqu’après la quatrième génération. La copulation des femmes Hottentotes avec les Nègres donne naiffance à des individus bien fupérieurs à ceux dont je viens de parler; ils font d’une ftature plus belle & plus diftinguée; ils ont une figure plus agréable & plus revenante ; leur couleur , qui tient le milieu entre le noir du père & le fond olivâtre de la mère, eft bien moins choquante pour les yeux; leurs qualités phyfiques & morales font auffi très différentes ; on les recherche pour le travail; mais ce qui les rend fur-tout eftimables & très-précieux, c’eft qu’ils joignent à beaucoup d’activité, fans turbulence, formante d’une fidélité qui ne fe dément jamais, & qui n’eft guèfei le partage d’aucun Bafter-Blanc ; malheureufement cette efpèce là n’eft pas la dominante, à caufe de la difficulté d’unir ces Hottentotes aux Nègres , dont elles ne font aucun cas» Il eût été depuis long-temps de l’intérêt public & particulier des Colons d’exciter l’adminiftration à propager cette efpèce d’hommes; les facrifices n’auroient pas été bien onéreux, & le prix des avances & des frais fe feroit retrouvé par la. fuite au centuple.
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