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« soustraire à leur fureur. Les plus grandes richesses consistaient alors «en troupeaux et dans les biens de la terre encore ornée de riantes «campagnes; et ces campagnes devinrent la proie des flammes; et les «troupeaux périrent, les uns dans ces vastes incendies, et les autres «furent entraînés dans les solitudes, avec les habitants de tout sexe « réduits en esclavage. » A ces déprédations des barbares succédèrent, sous Théodose I I , les concussions des gouverneurs, qui se hâtèrent de recueillir les derniers produits de la Pentapole expirante; lorsque enfin, quelque temps après, une nouvelle et dernière invasion changea à jamais les destinées de la Cyrénaïque, et acheva l’oeuvre de destruction que les Libyens avaient commencée. Les Musulmans, dont les rapides conquêtes s’expliquent aisément par 1 incertitude des conseils et la faiblesse qui caractérisaient alors les souverains de Byzance, commencèrent par envahir les provinces les plus reculées de l’empire. Amrou-Ben-el-As, favorisé par les Coptes, s’empara de l’Égypte l’an 64o de Jésus-Christ. La Cyrénaïque chercha d ’abord à se soustraire au joug musulman; elle y réussit à cette époque par un traité qu’elle stipula avec le conquérant arabe : Amrou respecta les engagements qu’il avait pris avec les habitants de la Pentapole, et les distingua expressément de ceux de l’Égypte, dont la vie et les biens, disait-il, dépendaient du caprice de sa volonté. Mais ces avantages furent de courte durée : six ans après la conquête de l’Égypte par Amrou, les fils d’Ommiah, ralliés sous l’étendard de Mahomet, pénétrèrent dans la Cyrénaïque et s’en emparèrent. L ’ancienne Barcé, destinée à être dans tous les temps le siège de peuplades barbares, fut occupée par les Ommiades. A cette dynastie succéda celle des Abassides, et celle des Fathimites à cette dernière. Les Chrétiens, soufferts dans cette contrée jusqu’au neuvième siècle, furent obligés de l’abandonner sous les Fathimites. La Pentapole était alors complètement ruinée; Barcah elle-même n’était plus qu’une petite bourgade; Adjedabia et Sort, situées sur les bords de la grande Syrte, réunissaient dans leur enceinte la plupart des habitants de cette province. Les Fathimi tes avaient été expulsés par les Aïoubi les, lorsque ces descendants de l’ancienne Colchide, ces esclaves qui entouraient le faste des sultans, voulurent à leur tour exercer le pouvoir dont ils n’avaient été jusqu’alors que les instruments. Le calife Moaddham tomba sous leurs coups, et cette victime assura aux Mamelouks le pouvoir suprême en Égypte, durant deux siècles et demi environ. En 1517, les Ottomans, conduits par Sélim I , s’emparèrent de cet état et de ses dépendances ; trente- trois ans après cet événement, Tripoli d’Afrique ayant été conquise par un des généraux de Soliman I I, la Cyrénaïque fut jointe à cette ville, et forma avec elle un seul royaume gouverné par des pachas. Telles furent les principales phases de la civilisation de la Grèce africaine, et des catastrophes qui l’anéantirent. Livrée à des hordes barbares, Cyrène'gît maintenant ignorée. Le temps, qui rassembla tour à tour plusieurs peuples dans son enceinte, en a confondu les traces ; il en a dispersé les ruines. Les monuments des arts ont disparu; témoins et asyles souillés des races passées, quelques tombeaux épars dans la plaine indiquent seuls au voyageur le lieu où s’élevait jadis la ville au trône d ’or. Mais si les travaux des hommes sont anéantis, la nature est restée la même. Le soleil n’éclaire plus que le deuil de l’antique cité; les pluies bienfaisantes ne tombent plus que sur des déserts : mais ce soleil émaille encore des prairies toujours vertes, ces pluies fécondent des champs toujours fertiles; les forêts sont toujours ombreuses, les bocages toujours riants, et les myrtes et les lauriers croissent dans les vallons solitaires, sans amants pour les cueillir, sans héros pour les recevoir. Cette fontaine qui vit élever autour d’elle les murs de Cyrène, jaillit encore dans toute


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